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Mis en cause par les familles des victimes, Villepin demande à être entendu

Les familles des victimes de l'attentat de Karachi ont fait part de leur intention de porter plainte contre l'ex-président Jacques Chirac et l'ancien Premier ministre Dominique de Villepin. Ce dernier s'est dit prêt à être entendu comme témoin.

Des familles de victimes de l'attentat de Karachi vont porter plainte contre l'ancien président français Jacques Chirac et l'ex-Premier ministre Dominique de Villepin pour "mise en danger de la vie d'autrui" et "homicide involontaire", a annoncé vendredi à l'AFP leur avocat, Me Olivier Morice.

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Sandrine Leclerc, porte-parole du collectif de familles des victimes de l'attentat de Karachi
Mis en cause par les familles des victimes, Villepin demande à être entendu

Ces familles ont chargé leur avocat de porter plainte à Paris pour ces chefs. Elles ont pris cette décision après qu'un ancien patron d'une société de commercialisation de matériels militaires, la Sofresa, eut révélé jeudi devant le juge Renaud Van Ruymbeke qu'un cadre des Directions des constructions navales (DCN) lui avait fait part de "risques pour ses personnels" en cas d'interruption du versement de commissions.

Ces déclarations intéressent au plus haut point les familles de victimes de l'attentat de Karachi (Pakistan) en mai 2002 puisque la justice suit depuis plus d'un an la piste de représailles pakistanaises à l'arrêt, décidé par M. Chirac, du versement de commissions sur la vente de sous-marins Agosta promises par le gouvernement d'Édouard Balladur.

"On a privilégié l'arrêt d'un contrat, au risque de sacrifier le personnel", a déploré Me Morice.

"Notre plainte va viser le cheminement menant à la décision d'arrêter les commissions, elle vise Jacques Chirac, Dominique de Villepin, Michel Mazens [ancien PDG de la Sofresa, NDLR] et Dominique Castellan [ancien PDG de la branche internationale de DCN]", a précisé Me Morice.

Au cours de son audition, révélée vendredi par le site d'informations Mediapart, M. Mazens a fait part au juge des risques qui pesaient sur le personnel de DCN en cas d'arrêt des commissions, décidé en 1995 par M. Chirac.

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Dominique de Villepin a déclaré vendredi à TF1 vouloir être entendu par la justice et a fait état de "très forts soupçons" de rétrocommissions vers la France en 1995, en marge de contrats d'armement.

L'ancien Premier ministre a demandé à être entendu comme témoin par le juge Renaud Van Ruymbeke qui enquête sur un volet financier de l'affaire Karachi, "le plus rapidement possible [...] et si possible dès la semaine prochaine".

"Très forts soupçons de rétrocommissions"

Secrétaire général de l'Élysée sous la présidence de Jacques Chirac, il a confirmé l'existence de "très forts soupçons de rétrocommissions" -c'est-à-dire des faits de corruption- dans deux contrats, dont celui de vente de sous-marins au Pakistan en 1994, ayant conduit le président à ordonner l'arrêt du versement des commissions, légales, pour ces contrats.

M. de Villepin a estimé qu'il n'avait eu à l'époque "aucune information spécifique circonstanciée" sur un risque terroriste en cas d'arrêt de versement des commissions.

Il a expliqué que Jacques Chirac, en arrivant à l'Élysée en 1995, avait "souhaité moraliser la vie publique internationale, c'est-à-dire interrompre tous les contrats qui avaient ou pouvaient donner lieu à rétrocommissions".

Ces rétrocommissions "illégales" revenaient "vers la France vers des personnes, des personnalités, politiques ou non politiques", a-t-il ajouté.

Une partie de ces commissions seraient revenue vers des décideurs français et auraient servi au financement de la campagne présidentielle de M. Balladur, dont Nicolas Sarkozy était le porte-parole, selon des documents et témoignages versés au dossier.

M. de Villepin a cependant assuré que la décision d'interrompre ces commissions n'avait pas d'objectif politique, en réponse aux soupçons de volonté "d'assécher" les sources de financement des balladuriens. Rival de M. Chirac, Édouard Balladur avait été écarté au premier tour de la présidentielle de 1995.

L'Élysée déplore des "insinuations"

L'Élysée a réagi vendredi par un communiqué de son secrétaire général, Claude Guéant que l'enquête sur l'attentat de Karachi en 2002 et une présumée affaire de corruption lors de la présidentielle de 1995 ne concernaient pas Nicolas Sarkozy et a déploré les "insinuations".

"Il n'est [...] pas acceptable que ce drame soit utilisé comme un argument de circonstance pour alimenter la démarche entreprise par ceux qui n'ont d'autre préoccupation que
d'impliquer le chef de l'État, par une succession d'insinuations, dans une affaire qui ne le concerne en rien", écrit-il.

Le bras droit de Nicolas Sarkozy dénonce "des allégations calomnieuses, parfois présentées comme de prétendues certitudes, portées contre la personne ou l'action de Nicolas Sarkozy et qui ne reposent cependant sur aucun commencement de preuve".