Lors d'"assises constituantes" organisées à Lyon ce week-end, les Verts de Cécile Duflot (photo) et le mouvement Europe Écologie vont fusionner en vue de nouvelles conquêtes électorales. Focus sur un tournant de l'écologie politique en France.
Un nouveau parti écologiste va voir le jour à Lyon, ce samedi, lors "d’assises constituantes" au centre des Congrès. Le parti des Verts et le mouvement Europe Écologie vont en effet fusionner pour écrire une nouvelle page de l’écologie politique en France. Ce rapprochement vient sceller une alliance politique forte d’une percée remarquée lors des élections européennes de 2009 (16,3 % des voix contre 7,41 % pour les listes Vertes en 2004), confirmée un an plus tard lors des régionales de mars dernier par un score à deux chiffres (12,5 % des voix).
"Cette coalition a obtenu des résultats très probants lors des derniers scrutins. Incontestablement, c’est cela qui a fait naître le besoin et la nécessité de transformer cette alliance en un grand parti pour affronter les élections nationales de 2012", explique Daniel Boy, directeur de recherche au Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF) et politologue spécialiste de l’écologie politique.
Quel programme ?
Oubliés les cinglants revers des Verts lors des législatives de 2002 (4,51 % des voix) ou encore lors de la présidentielle de 2007 (1,57 % des voix pour Dominique Voynet). Les écologistes de 2010 comptent à présent capitaliser sur leurs récents succès. Objectif : "la conquête de la majorité", selon Cécile Duflot, secrétaire nationale des Verts, interrogée par le quotidien les Échos.
Si les militants des Verts ont récemment approuvé ce rapprochement (à 85,1 %), des questions demeurent, en particulier sur la capacité des deux entités à s’entendre sur un programme et sur une stratégie d’alliance, notamment avec le Parti socialiste.
"Quand il s’agit d’environnement, il est plus aisé de s’entendre comme ce fût le cas lors des dernières élections régionales, note Daniel Boy. Reste à savoir s’ils peuvent se mettre d’accord sur d’autres enjeux tels que la politique sociale, la sécurité ou encore les affaires étrangères où des dissensions peuvent apparaître". D’autant plus que le profil de leurs adhérents diffère. "Les militants des Verts sont très ancrés à gauche, voire à l’extrême-gauche, ce qui n’est pas très évident concernant ceux d’Europe Écologie qui sont plus hétéroclites et qui seront moins pressés de s’unir à des partis de gauche", développe Daniel Boy. L’ensemble de ces questions doit être tranché lors d’un congrès au printemps 2011.
Quel leader ?
Lors des assises de Lyon, dont l'animateur vedette Nicoals Hulot est l'invité d'honneur, le "mouvement unifié" adoptera un nom et un logo. Il s’agira également de savoir qui va piloter le parti jusqu’à l'automne 2011, date à laquelle les adhérents désigneront leur candidat pour la présidentielle dans une primaire dont les modalités n’ont pas encore été arrêtées. Pour l’instant seuls l’ex-juge Eva Joly (Europe Écologie), eurodéputée franco-norvégienne et le député Yves Cochet (Verts) se sont déclarés candidat à la candidature pour la présidentielle.
"Les rôles semblent bien répartis, affirme Daniel Boy. L’inspirateur du rapprochement, Daniel Cohn-Bendit s’est mis pour l’instant en retrait, Cécile Duflot n’est pas intéressée par la présidentielle et donc disponible pour gérer la fusion, tandis qu’Eva Joly s’est publiquement déclarée candidate".
L’histoire de l’écologie politique française étant jalonnée de divisions et de guerres d’ego qui ont enrayé sa progression par rapport à d’autres mouvements similaires en Europe, le risque de voir le parti retomber dans ses travers existe. Et les signes avant-coureurs ne manquent pas. Ainsi Yves Cochet juge ce matin sur France-info Eva Joly "pas assez écolo" tandis que Cohn-Bendit affirmait dans le Parisien de jeudi que "le sectarisme des Verts n'a pas disparu". Ambiance.
Par ailleurs, cette union ne fait pas l’unanimité au sein de la famille écologiste. Ainsi le Mouvement écologiste indépendant (MEI) fondé et présidé par Antoine Waechter, et CAP 21 de Corinne Lepage, députée européenne, ont refusé de se rendre à Lyon ce week-end. Cette dernière a dénoncé sur France 2, "un relookage" des Verts et une "OPA" sur Europe Écologie.