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"De Gaulle est perçu comme anti-américain alors qu’il ne l’était pas"

Le général de Gaulle jouit d’une image contrastée à l’étranger. Adulé dans certains pays, son personnage continue de susciter l'hostilité ailleurs, comme aux États-Unis. Un universitaire américain fait le point pour FRANCE 24.

Le général Charles de Gaulle est mort le lundi 9 novembre 1970 à Colombey-les-deux -églises, à l'âge de 79 ans. Quarante ans après, FRANCE 24 interroge un universitaire américain sur ce qu’il reste de l’héritage du Général aux États-Unis.

Nathanael Greene est un spécialiste de la France au XXe siècle, à l’université Wesleyan dans le Connecticut.

FRANCE 24 : Quelle est l’image de Charles de Gaulle aux États-Unis ?

Nathanael Greene : Difficile de dire quelle image il a aujourd’hui, mais à l’époque il n’était pas très apprécié de la plupart des Américains. Les gens ont vidé des bouteilles de vin et de champagne dans les gouttières quand il s’est retiré de l’Otan ou quand il a prononcé un discours critique sur le rôle des États-Unis au Vietnam. Il était vu par beaucoup comme profondément anti-américain, alors qu’il ne l’était pas. Finalement, il aura été un allié sur lequel on peut compter, même s’il a toujours refusé d’être soumis à l’Amérique. Les gens ont apprécié le fait qu’il se rende aux États-Unis pour l’enterrement de John F. Kennedy, ils se sont dit qu’il n’était finalement pas si mauvais que ça.

FRANCE 24 : Quelles sont ses principales réussites sur le plan intérieur et international ?

Nathanael Greene : Sa principale contribution à destination du peuple français est d’avoir établi une légitimité des institutions. Sa constitution, qui date de 1958, est toujours en place et elle permet de créer un environnement politique viable et stable. Il faut aussi mentionner son rôle dans la Résistance au régime de Vichy puis son action pour prévenir une guerre civile ou une occupation américaine à la libération. Sur le plan international, il a défini la place de la France dans le monde. Il a été le premier à s’ouvrir à la Chine. Il ne parlait pas à l’Union soviétique mais à la Russie. Il est l’un des rares à avoir prédit l’effondrement du communisme. Et il a anticipé le fait que l’Europe deviendrait une "Europe des nations".

FRANCE 24 : Quelles sont les principales idées reçues sur De Gaulle en France et à l’étranger ?

Nathanael Greene : La principale idée reçue sur De Gaulle est qu’il était un dirigeant autoritaire rétrograde, voire même un dictateur. Il a pourtant largement démontré qu’il était un démocrate porté par la volonté du peuple. En 1969 [peu après les événements de mai 68] il a convoqué un référendum tout en indiquant qu’il démissionnerait si les réformes qu’il proposait n’étaient pas approuvées par le peuple. Il a perdu le référendum et s’en est allé le jour suivant. Une autre idée fausse à propos du Général est qu’il était conservateur. En réalité, il a œuvré à des développements sociaux extraordinaires, comme le système de sécurité sociale français. Cependant, certains n’ont eu de cesse de faire de lui un fasciste du fait de son style olympien et de son attitude distante.

Visite du président américain John F. Kennedy à Paris - Juin 1961

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