Oleg Kachine, un journaliste du quotidien russe Kommersant était dans le coma samedi matin après avoir été agressé dans la nuit à Moscou. Ses deux jambes ont été cassées, sa mâchoire fracturée et il souffre d'un traumatisme crânien.
AFP - Un journaliste politique du quotidien russe indépendant Kommersant était dans un coma artificiel samedi après avoir été grièvement blessé par deux agresseurs à Moscou, ses collègues dénonçant une nouvelle attaque contre la liberté de la presse en Russie.
"Oleg Kachine a été grièvement blessé et hospitalisé. Il va être maintenu dans un coma artificiel pendant les prochains jours", a indiqué le journal.
Le journaliste de 30 ans souffre d'un grave traumatisme crânien, a indiqué son épouse Evguenia Milova. Il a aussi des fractures d'un tibia, des mâchoires inférieure et supérieure, des phalanges des mains.
Il a dû être amputé d'un doigt, et les médecins n'ont fait pour l'instant "aucun pronostic" sur son état, selon Kommersant.
Le journaliste a été agressé dans la nuit de vendredi à samedi par deux hommes qui l'attendaient dans la cour de son immeuble rue Piatnitskaïa, en plein centre de Moscou, selon des témoins.
"Il avait le visage en sang, les jambes aussi, il montrait sa main fracturée", a raconté une voisine interrogée par la télévision russe.
Une enquête a été ouverte pour "tentative de meurtre", a indiqué le Parquet de Moscou.
Remarquant que ni son i-phone, ni l'argent qu'il avait sur lui n'avaient été volés, les collègues d'Oleg Kachine ont estimé que l'agression était sans ambiguïté liée aux reportages et enquêtes du journaliste.
"Il est clair que les gens qui ont fait ça n'aimaient pas ce qu'il disait et ce qu'il écrivait", a déclaré le rédacteur en chef de Kommersant, Mikhaïl Mikhaïline.
Journaliste politique à Kommersant, un des principaux quotidiens indépendants à Moscou, Oleg Kachine couvrait les activités de la présidence russe, mais aussi les manifestations de l'opposition.
Il avait aussi travaillé sur les mouvements de jeunes, notamment extrémistes, et avait couvert ces derniers mois les manifestations contre la construction controversée d'une autoroute à travers la forêt de Khimki dans la banlieue de Moscou.
La mobilisation contre ce projet a contraint fin août le président Dmitri Medvedev à en suspendre la réalisation.
Emblématique, selon ses détracteurs, de la primauté d'intérêts privés sur le droit en Russie, ce dossier a donné lieu à plusieurs reprises à des violences.
Un activiste écologiste local, Konstantin Fetissov, agressé mercredi dernier, est dans un état très grave et a lui aussi été plongé par les médecins dans un coma artificiel, a indiqué samedi le mouvement de défense de Khimki.
Un journaliste local, Mikhaïl Beketov, avait été passé à tabac en 2008 par des inconnus et amputé d'une jambe après des mois dans le coma. L'enquête n'a à ce jour rien donné.
Le président Medvedev a ordonné samedi au procureur général Iouri Tchaïka et au ministre de l'Intérieur Rachid Nourgaliev de superviser personnellement l'enquête sur l'agression d'Oleg Kachine.
"Les criminels doivent être punis", a-t-il également écrit sur Twitter.
Plusieurs dizaines de collègues du journaliste et de représentants de l'opposition ont pour leur part manifesté devant le siège de la police de Moscou.
"Tant que nos journalistes seront battus et intimidés, nous n'aurons pas d'Etat de droit ni de démocratie", a déclaré l'ex-dissidente soviétique et défenseur des droits de l'Homme Lioudmila Alexeeva.
De nombreux journalistes ont été agressés, blessés ou assassinés ces dernières années en Russie, les enquêtes de police ne débouchant que très rarement.
Le cas le plus connu est celui de la journaliste d'opposition Anna Politkovskaïa, assassinée à Moscou en 2006. Quatre ans après, le commanditaire de ce meurtre n'a toujours pas été identifié par la justice.
Selon le Comité pour la protection des journalistes, basé à New-York, 52 journalistes ont été tués en Russie depuis 1992.