Le nouveau président de la Commission électorale a émis des doutes sur la tenue du second tour de la présidentielle prévue dimanche. De nouvelles consultations doivent se tenir, ce vendredi, et une décision définitive sera prise.
La tenue du second tour de l’élection présidentielle guinéenne, prévue dimanche, semble compromise. C’est en tout cas ce qu’a laissé entendre le nouveau président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni), Siaka Toumani Sangaré, après une série de rencontres, jeudi, avec plusieurs responsables politiques à Conakry.
"Le suspense va durer encore un peu, commente Pauline Simonet, envoyée spéciale de France 24 en Guinée. Le président de la Céni devait rencontrer les deux candidats encore en lice, Cellou Dalein Diallo, le leader de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) et Alpha Condé, le chef du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG) en fin de matinée", avant de se prononcer définitivement sur un éventuel nouveau report du scrutin dans la soirée.
Hier, Siaka Toumani Sangaré avait déclaré qu’il serait "difficile" d'organiser le second tour de la présidentielle le 24 octobre, après avoir rencontré les membres de la Céni, le Premier ministre de la transition, Jean-Marie Doré, et la présidente du Conseil national de la transition (CNT, qui fait office de Parlement), Rabiatou Serah Diallo.
"Même si le mot report n’a pas encore été officiellement prononcé, relève Pauline Simonet, on prépare la population guinéenne à cette idée en expliquant que le scrutin sera très difficile à organiser après-demain."
Le premier tour, le 27 juin, s'était déroulé dans le calme, même si des accusations de fraudes et d'irrégularités avaient été formulées dans les heures qui avaient suivi le vote. Des violences, qui s'étaient soldées par la mort d'une personne et avaient fait plusieurs blessés, s'étaient en revanche déclenchées à quelques jours du 19 septembre, date initialement prévue pour le déroulement du second tour, ce qui avait conduit à le reporter.
"Retards déplorables"
Selon James André, envoyé spécial de France 24 à Conakry, la Céni s’est fait voler une trentaine d’ordinateurs, ce qui complique davantage encore l’organisation du scrutin.
Problèmes d’acheminement du matériel électoral et d’affichage des listes, distribution des cartes d’électeurs non-effectuée : Siaka Toumani Sangaré avait déjà fait état, jeudi, de "retards déplorables" dans l’organisation de l’élection.
“Les gens vont être déçus” en cas de report, ajoute James André. "L’élection suscite beaucoup d’intérêt et les Guinéens ont vraiment hâte d’aller voter. Les deux candidats sont prêts, et les risques de tension ont été réduits depuis l’arrivée de Sangaré à la tête de la Commission électorale."
Pour le Premier ministre de la transition, Jean-Marie Doré, comme pour de nombreux représentants de la société civile toutefois, la priorité "n’est pas d’aller à l’élection le plus vite possible, mais que le scrutin soit crédible", rappelle Pauline Simonet.
La France, qui s’est exprimée par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a suggéré, jeudi, que le vote soit repoussé d'une semaine.
Une déclaration qui semble avoir déplu à Conakry, où elle a été perçue comme “une provocation et une ingérence dans les affaires intérieures du pays”, reprend James André.
Le second tour de la présidentielle guinéenne est censé sceller le retour à un régime civil après le putsch militaire de décembre 2008 qui avait conduit à la prise de pouvoir de Moussa Dadis Camara.
Lors du premier tour, l’ancien Premier ministre Cellou Dalein Diallo était arrivé en tête du scrutin, rassemblant sur son nom 43,69 % des suffrages, contre 18,25 % à son rival, Alpha Condé.
Les analystes redoutent que le maintien, coûte que coûte, de la date du 24 octobre pour le second tour ne mette en péril la crédibilité du scrutin.