Le fournisseur d’accès à Internet a finalement accepté d’envoyer les mails d’avertissement exigés par l’Hadopi...
Xavier Niel, le PDG de Free, capitule. Dans un entretien au quotidien économique Les Échos, il le reconnaît : "Nous allons commencer à envoyer les e-mails ce lundi". Dorénavant, l’Hadopi, la police du Net censée lutter contre le téléchargement illégal, peut compter sur la coopération de tous les fournisseurs d’accès à Internet (FAI).
Free avait provoqué l’ire du ministère de la Culture en refusant, depuis début septembre, d’envoyer ces fameux mails signifiant aux internautes qu’ils sont soupçonnés de téléchargement illégal. Un décret avait été adopté en urgence, en fin de semaine dernière, pour forcer la main à Free : les FAI qui refusent de jouer le jeu devront payer une amende de 1 500 euros par mail non envoyé.
Free ne compte pas pour autant rentrer sagement dans les rangs. Xavier Niel répète, dans son entretien aux Échos, que la loi créant l’Hadopi est "mauvaise et ne résout rien", et en appelle à une grande concertation pour trouver un moyen efficace de lutter contre le piratage.
Cette carte de l’"outsider dérangeant l’ordre établi", le fournisseur d’accès à Internet la joue depuis ses débuts. Avec succès. Free entre dans l’arène en 2002, avec fracas. Face à France Telecom, Noos (aujourd’hui Numericable) et autres Bouygues, Xavier Niel innove et propose un abonnement à tarif unique (29,99 euros), et surtout une box à tout faire : internet, téléphone et télévision. Un franc succès qui incitera ses concurrents à s’aligner sur ce modèle économique. En 10 ans, Free est devenu le troisième fournisseur d’accès à Internet, après France Telecom et Numericable.
4e licence mobile
Le groupe est aussi le seul à s’être entêté face au triumvirat Bouygues, Orange et SFR pour décrocher le 10 octobre la 4e licence mobile. Des grosses pointures comme Numericable et Virgin se sont retirés en 2009, découragés par les modalités de l’appel d’offres (plus de 300 millions d’euros pour acheter la licence, obligation de couvrir 25 % du territoire en deux ans etc.). Les trois opérateurs "historiques", qui voyaient d’un mauvais œil l’arrivée d’un quatrième opérateur, font un lobbying intensif pour l’éviter.
D'autant plus que Free souhaite appliquer au mobile la même formule que pour Internet : faire baisser les prix par tous les moyens. Une promesse dérangeante dans ce petit monde de la téléphonie qui avait été condamné par la justice française en 2009 à une amende de 92 millions d’euros pour "entente" sur les prix.
Lorsque ce n’est pas Free qui dérange, c’est son PDG Xavier Niel. À ses débuts, déjà, à la fin des années 80, il s’était mis à dos une partie du monde du minitel rose pour avoir démarché de manière agressive les clients de ses concurrents. Cet apolitique proclamé a également tendance à investir dans des médias hostiles au président Nicolas Sarkozy, comme les sites Bakchich ou encore Mediapart. Son rachat du quotidien Le Monde en juin dernier, en partenariat avec le banquier Mathieu Pigasse et l’homme d’affaires Pierre Bergé, aurait été très mal perçu par l’Élysée.
Cette posture du seul contre tous a conrtribué à rendre populaire les idées de Xavier Niel dans le domaine d'Internet. L'homme, qui continue à passer pour un iconoclaste est devenu l'un des hommes les plus riches de France (devant Martin Bouygues et Vincent Bolloré). Aujourd'hui, Free affiche un chiffre d’affaires de 869 millions d’euros.