
En visite officielle de deux jours au Liban, le président iranien a profité d'un meeting organisé par le parti chiite du Hezbollah dans la banlieue sud de Beyrouth pour fustiger l'État hébreu.
Le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, qui a entamé mercredi une visite officielle de deux jours au Liban, a été chaleureusement accueilli par plusieurs milliers de Libanais. Composée principalement de sympathisants chiites du Hezbollah, la foule était massée le long de l’autoroute, menant à l'aéroport de Beyrouth, décorée aux couleurs de l'Iran.
Des ballons et des affiches du chef de l'État iranien étaient agités tout au long de la voie attenante à la banlieue sud de la capitale libanaise contrôlée par le Hezbollah. "Les partisans du Hezbollah ont accueilli Ahmadinejad comme un héros, lui
jetant du riz, se bousculant pour apercevoir le cortège présidentiel qui avançait au pas", précise Isabelle Dellerba, correspondante de France 24 au Liban. Le président iranien a longuement salué la foule, "une scène étonnante et inédite pour un chef d’État étranger en visite au Liban", ajoute-t-elle.
À son arrivée à Beyrouth, il était attendu par des députés, par les deux ministres du Hezbollah chiite au sein du gouvernement d'union et par le président du Parlement allié du Hezbollah, le chiite Nabih Berri. Il s'est ensuite dirigé vers le palais présidentiel de Baabda, près de Beyrouth, où un accueil officiel lui a été réservé par son homologue libanais, Michel Sleimane. D’importants accords de coopération économiques ont été signés par les deux parties, notamment dans le domaine de l’énergie.
Charge anti-Israël
Le président iranien a également prononcé un discours au cours d'un meeting organisé par le Hezbollah dans la banlieue sud de Beyrouth. Louant la "résistance" du Liban face à Israël, il a affirmé que l’État hébreu allait vers sa fin. "J'annonce que le régime sioniste poursuit sa chute et aucune puissance ne peut le sauver en raison du front résistant au Liban, en Syrie, en Palestine, en Irak et ailleurs", a-t-il clamé, sous les applaudissements et les cris "Mort aux États-Unis !", "Mort à Israël !" Apparaissant sur un écran géant, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a appuyé ses dires.
Ahmadinejad a également défendu le Hezbollah contre une éventuelle accusation dont le parti pourrait faire l'objet dans le cadre de l'enquête de l'ONU sur l'assassinat, en février 2005, du Premier ministre libanais Rafic Hariri. "Au Liban, un ami et patriote a été assassiné de manière vicieuse. Maintenant, en fabriquant des informations et en manipulant un système légal, ils accusent d'autres amis [le Hezbollah, ndlr] du crime, a lancé le président iranien, en référence au Tribunal spécial pour le Liban (TSL). Ils tentent de parvenir à leurs fins en créant des dissensions" entre Libanais.
Une visite controversée
Mais la première visite officielle au Liban de Mahmoud Ahmadinejad est loin de faire l’unanimité à Beyrouth. La confirmation de sa venue, au cours du mois d’août, avait même provoqué une controverse tant la scène politique et l’opinion publique libanaises sont divisées sur cette question. "Cette visite ne peut que nuire à l’image du Liban où sera reçu un chef d’État qui est en conflit ouvert avec la communauté internationale et qui est rejeté au sein même de son pays après une réélection contestée", regrette Samir Frangié, ancien député et membre de l’alliance politique majoritaire au Parlement libanais.
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Ahmadinejad compte également se rendre jeudi dans le sud du Liban, le fief du Hezbollah, non loin de la frontière avec Israël, où il doit prononcer un discours. "Le président iranien va consacrer beaucoup de temps au Hezbollah, le parti chiite que son pays soutient militairement, financièrement et idéologiquement. Ensemble, ils devraient réaffirmer leur volonté de poursuivre la lutte contre Israël", explique Isabelle Dellerba. Un geste perçu comme une "provocation" par la majorité parlementaire libanaise."Sa présence aux abords de la frontière ressemble à une provocation et l’État hébreu peut prendre prétexte de cette visite pour porter un coup à la stabilité du pays", regrette Samir Frangié, interrogé par France24.com.
Le parti d’Hassan Nasrallah ne voit pas les choses de la même manière. "La visite du président iranien est une preuve de l'amitié et du soutien que Téhéran accorde au Liban, que ce soit à la résistance, à l'armée ou encore aux institutions" a déclaré de son côté, lundi, le numéro deux du Hezbollah, Naïm Kassem. Fondé en 1982 sous l'impulsion des Gardiens de la révolution iraniens pour lutter contre l’invasion israélienne du Sud-Liban, le "parti de Dieu" n’a jamais caché sa filiation avec le régime iranien.
"Ahmadinejad n’est pas un président ordinaire"
Malgré le retrait des troupes israéliennes en 2000 après 22 ans d'occupation, le Hezbollah a conservé son arsenal au nom "de la résistance contre l’ennemi sioniste". Depuis, le seul parti armé du Liban est suspecté par ses détracteurs de vouloir étendre l'influence iranienne dans le pays, à défaut d’y instaurer un régime islamique. Il est également accusé d’être une base avancée de l’Iran au Moyen-Orient et de calquer son agenda sur celui de Téhéran. Des arguments qui ont toujours été réfutés par ses dirigeants. "Ahmadinejad n’est pas un président ordinaire […]. En déclarant il y a quelques années que le Liban sera le cimetière des États-Unis ou que la destruction d’Israël passe par le pays du Cèdre, il fait porter au pays une charge qu’il ne peut pas supporter", conclu Samir Frangié.