Après le rapt de cinq Français, le groupe industriel affirme que la loi locale interdit aux hommes chargés de la sécurité du personnel d'être armés. Selon Niamey, Areva a préféré cette option aux services de l'armée proposés par le gouvernement.
AFP - Le gouvernement nigérien et le groupe français Areva se sont rejeté dimanche la responsabilité de la sécurité du personnel à Arlit (nord du Niger), après l'enlèvement le 16 septembre sur ce site minier de cinq Français, un Togolais et un Malgache.
Les sept otages ont été kidnappés à leur domicile en pleine nuit par un groupe armé qui, selon Paris et Niamey, pourrait appartenir à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
Après avoir annoncé dès jeudi un nouveau renforcement des mesures de sécurité à Arlit (1.000 km au nord-est de Niamey), Areva et Vinci ont finalement entrepris d'évacuer leurs expatriés de la région.
A Paris, confirmant des propos d'un salarié nigérien d'Areva interrogé par l'AFP, une porte-parole du géant nucléaire a expliqué que les agents des sociétés de sécurité privées affectées à la surveillance du domicile des expatriés "n'étaient pas armés".
Cette disposition relevait d'un accord avec le gouvernement nigérien qui assurait la présence à Arlit de 350 gendarmes et militaires qui, eux, étaient armés, a-t-elle dit.
"Ces agents (privés) n'étaient pas armés parce qu'ils n'étaient pas autorisés à l'être" par la loi locale, a-t-on fait valoir du côté du groupe de construction Vinci.
La porte-parole d'Areva a affirmé que militaires et gendarmes pratiquaient rondes et patrouilles pour la protection du site où logeaient les expatriés. Selon Vinci, ils étaient "entraînés spécialement pour la lutte antiterroriste".
"Qu'elle (Areva) ne rejette pas la responsabilité sur le gouvernement", a répliqué le porte-parole du gouvernement nigérien, Laouali Dan Dah.
"Si les ravisseurs ont pu opérer avec cette facilité, c'est parce que, entre autres, la sécurité du personnel était assurée par des agents privés qui n'étaient pas armés", a-t-il tranché. Les autorités avaient proposé à Areva de confier à l'armée "la sécurité de ses agents", mais l'entreprise "a fait le choix d'assurer la sécurité de son personnel", a-t-il affirmé.
Selon lui, les militaires sont seulement affectés à la protection des "stratégiques" sites d'extraction d'uranium.
Les relations entre Areva et Niamey ont connu ces dernières années des tensions, le pouvoir du président Mamadou Tandja (renversé en février) ayant accusé le groupe français de liens avec la rébellion touareg, dont le dernier front a été actif dans la région de 2007 à 2009.
Début 2009 est venu le temps de la normalisation avec la signature d'un accord d'exploitation par Areva de la mine géante d'Imouraren, près d'Arlit, qui devrait propulser le Niger du rang de troisième à deuxième producteur mondial d'uranium.
Il n'y avait "aucun dispositif sérieux de sécurité" autour des domiciles des expatriés, a estimé l'ex-ministre nigérien de l'Intérieur Idi Ango Omar, pointant aussi des "complicités" sur le site, évoquées de source proche de l'enquête.
M. Omar a également soutenu que les sociétés de gardiennage privées appartenaient à d'ex-chefs de la rébellion touareg.
"Selon toute vraisemblance", des employés de ces sociétés ont "participé à la première rébellion", celle des années 1990, et certainement pas à la seconde, a répondu la porte-parole d'Areva.
En juin 2008, quatre Français du groupe avaient été brièvement retenus par un mouvement rebelle touareg.
Dimanche, un habitant d'Arlit a souligné que la cité était désormais "sous haute sécurité" avec l'arrivée depuis la veille de "renforts de soldats".
Dans un courrier officiel en date du 1er septembre, dont l'AFP a obtenu copie, le préfet d'Arlit évoquait une situation sécuritaire "en train de se dégrader" dans la région.
Le 23 août, "une colonne de 8 Toyota" avait été signalée dans la zone mais "la riposte" des forces de sécurité n'avait "pas permis à ce groupe armé" d'"enlever du matériel militaire et du personnel expatrié", écrivait-il.