Selon le gouvernement français, l'Organisation mondiale du commerce (OMC) fait état dans son verdict préliminaire de "subventions massives" reçues par le constructeur américain Boeing au détriment de son concurrent européen Airbus.
AFP - L'avionneur Airbus et la France ont revendiqué mercredi une victoire dans la guerre des Titans qui oppose le constructeur européen à Boeing, assurant que l'OMC avait tranché en faveur de Bruxelles en jugeant illégales des années d'aides de Washington au géant américain.
"Boeing bénéficie de milliards de dollars de subventions gouvernementales qui sont jugées illégales par l'OMC", a expliqué le directeur de la communication d'Airbus Rainer Ohler, à l'issue d'un verdict préliminaire rendu par l'Organisation mondiale du commerce.
"La synthèse des conclusions tirées par le panel condamne les subventions massives reçues par Boeing qui violent les règles de l'OMC et donnent raison pour tout l'essentiel à la plainte de l'Union européenne", indiquait peu auparavant un communiqué du gouvernement français.
Bruxelles et Washington, qui ont reçu en main propre le document de 750 pages à Genève, se sont montrées plus prudentes, se refusant à commenter en profondeur les conclusions du deuxième volet du dossier le plus lourd jamais porté devant l'OMC, en 2004.
Les deux capitales, qui représentent leurs avionneurs Airbus et Boeing dans cette interminable guerre, ont confirmé avoir obtenu le rapport préliminaire qui doit statuer sur une vingtaine de programmes d'aides à Boeing.
Après les déclarations fracassantes de la France et de l'avionneur, la Commission a juste avancé d'un pas en saluant "une analyse approfondie" et "un très bon résultat".
Les deux parties vont toutefois désormais s'attacher à décortiquer le document juridique complexe dont la version finale ne sera publiée que dans plusieurs mois.
Au-delà de la série d'exonérations fiscales et sociales dont Boeing a pu bénéficier, la question clé du jugement concerne les modalités des aides versées par la Nasa et le Pentagone à l'avionneur américain, des programmes de recherches et développement.
Pour l'UE, il ne fait pas de doute que ces aides, estimées à quelque 24 milliards de dollars, constituent des subventions américaines déguisées derrière des contrats spatiaux et d'armement.
Les experts s'attendent à un jugement moins tranché, permettant plusieurs lectures.
"Ce sera vraisemblablement un résultat assez mitigé et assez compliqué", explique ainsi une source diplomatique proche de l'OMC.
Ce verdict était très attendu après le premier jugement rendu le 30 juin par le gendarme du commerce mondial qui a condamné certaines aides européennes à Airbus (EADS).
Bruxelles s'était offusquée du retard pris sur le dossier Boeing par l'Organe de règlement des différends (ORD) alors que celui-ci avait reçu quasiment simultanément le 6 octobre 2004 les deux plaintes de la Commission et de Washington s'accusant mutuellement de subventionner illégalement leurs avionneurs.
Elle estimait que ce retard avait laissé dominer l'idée qu'elle avait perdu la guerre alors que le premier jugement contenait également un élément positif, l'aval sur le principe des aides au lancement.
"Nous avons aujourd'hui une vision plus claire de la situation des deux parties dans le conflit aéronautique", a estimé la Commission.
"Ce rapport met les pendules à l'heure", a insisté Paris, estimant que les subventions européennes en faveur d'Airbus dénoncées par l'OMC étaient d'une "ampleur très inférieure à ce qu'a reçu Boeing".
Désormais, les deux parties apparemment renvoyées dos-à-dos, n'ont plus, selon les experts, d'autre issue que de renégocier une trêve. Ce qu'ont souhaité d'une seule voix mercredi Airbus et l'UE.
"Maintenant que les deux rapports sont disponibles, il est temps d'arrêter de se rejeter la faute", a expliqué M. Ohler appelant à des négociations pour "définir de nouvelles règles du jeu équitables" pour l'aéronautique mondiale, a-t-il ajouté.
"Le vrai défi pour l'UE et les Etats-Unis reste de trouver une approche mutuellement acceptable", a insisté Bruxelles.