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Le Parlement européen dénonce la politique de la France à l'égard des Roms

De nombreux élus européens, notamment issus des groupes socialistes, libéraux et Verts, ont sévèrement critiqué la France pour sa politique d'expulsion des Roms, qu'ils jugent contraire au droit à la libre circulation.

AFP - La France s'est retrouvée sur le banc des accusés mardi au Parlement européen en raison de sa politique à l'égard des Roms, jugée "inacceptable" par de nombreux élus car contraire au droit à la libre circulation en Europe.

Plusieurs groupes politiques dont celui des socialistes, des libéraux et des Verts ainsi que des communistes ont présenté des projets de résolution condamnant les expulsions de citoyens roumains et bulgares vers leur pays d'origine par les autorités françaises. Un vote doit intervenir jeudi.

Lors d'un débat en session plénière, plusieurs chefs de groupes sont montés au créneau pour dénoncer le tour de vis sécuritaire en France.

Le chef des Libéraux Guy Verhofstadt a mis en garde contre la "tentation populiste, parfois raciste", qui s'exprime selon lui en France et d'autres pays de l'UE. "Cette attitude est incompatible avec les principes qui font notre Union", a estimé l'ancien Premier ministre belge.

"Les Roms, ce sont des citoyens européens, des citoyens à part entière. Nous ne pouvons jamais accepter que leurs droits soient violés. Cette Europe doit rester un continent de liberté et de tolérance", a-t-il martelé.

Le chef de file des socialistes, l'Allemand Martin Schulz, a dénoncé "une chasse aux sorcières" et mis nommément en cause le président français Nicolas Sarkozy, le Premier ministre François Fillon et le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux.

"Dites publiquement que ce que fait la France (à l'égard des Roms) contredit les traités européens", a lancé de son côté le chef du groupe Vert Daniel Cohn-Bendit à l'adresse du président de la Commission européenne José Manuel Barroso.

Mais, sur ce point, le leader écologiste n'a pas été entendu. Le chef de l'exécutif européen s'est refusé à condamner Paris.

M. Barroso, qui avait rencontré la veille M. Sarkozy à Paris, a certes rappelé que tous les citoyens européens bénéficiaient de la liberté de circulation dans l'UE mais, a-t-il insisté, "tous nos citoyens ont aussi des obligations".

"Il faut toujours mettre l'accent entre la liberté de circulation et la sécurité. Sinon, nous aurons un danger d'exploitation de ces questions par des forces extrémistes qui pourront exploiter de façon populiste le sentiment d'insécurité", a estimé M. Barroso.

Selon Paris, les reconduites vers leur pays d'origine de citoyens roumains et bulgares se justifient pour des raisons de sécurité publique.

La commissaire européenne chargée de la Justice Viviane Reding, qui a fait part en août d'une "certaine inquiétude" vis-à-vis de la politique française à l'égard des Roms, devait à son tour s'exprimer dans l'après-midi devant les députés européens.

Bruxelles a demandé à Paris "des informations détaillées sur le fait de savoir si et dans quelle mesure les garanties requises (par le droit européen) ont été appliquées dans des cas récents" de reconduites aux frontières de ressortissants bulgares et roumains.

Bruxelles veut s'assurer notamment de la nature réellement "volontaire" des 828 départs de Roms que Paris dit avoir dénombrés vers la Roumanie et la Bulgarie entre le 28 juillet et le 30 août. L'exécutif européen cherche aussi à savoir si les personnes pourront revenir en France si elles le souhaitent.

Le versement aux Roms rapatriés d'une "aide au retour" de 300 euros "n'est pas en soi suffisant pour les sortir du champ d'application de la directive européenne sur la liberté de circulation", note un rapport de la Commission.

En août, le Comité de l'ONU pour l'élimination de la discrimination raciale avait rappelé la France à l'ordre, l'exhortant à "éviter" les renvois collectifs de Roms et les "discours politiques discriminatoires".

Le pape Benoît XVI avait lui aussi exprimé sa désapprobation sur le sujet, appelant, en français, "à savoir accueillir les légitimes diversités humaines".