Le gouvernement d'Angela Merkel a décidé de revenir sur la décision prise par l'ex-chancelier Gerhard Schröder de fermer toutes les centrales nucléaires allemandes d'ici à 2021. Une annonce qui provoque la colère d'une partie de la population.
Il aura fallu pas moins de 14 heures de négociations ininterrompues à la coalition gouvernementale au pouvoir en Allemagne pour parvenir à un compromis. Mais, finalement, les chrétiens démocrates de la CDU d’Angela Merkel et les libéraux du FDP ont tranché lundi : les 17 centrales nucléaires du pays vont pouvoir fonctionner 12 ans de plus, en moyenne. À savoir, dans le détail :14 ans pour les plus récentes, 8 ans pour les plus anciennes.
Cette décision met fin à plusieurs mois de "poker menteur"; comme l'a souvent écrit la presse allemande. Le gouvernement d’Angela Merkel, qui sait que la population est majoritairement hostile à l’énergie nucléaire, a marché sur des œufs pour éviter une crise politique majeure. L’Allemagne est, en effet, le pays européen dans lequel les Verts sont historiquement les plus forts et où l’opposition à l’énergie atomique relève surtout de la peur d’un accident du type de celui de Tchernobyl.
Le mensuel allemand "Focus" raconte sur son site Internet, ce lundi, que des centaines de manifestants sont restés devant la Chancellerie pendant les discussions, "protestant pendant 14 heures au son des vuvuzelas". L’opposition, quant à elle, n’a pas tardé à promettre un "automne chaud pour le gouvernement", selon les termes de Claudia Roth, la patronne des Verts allemands. "Le gouvernement ramène sur le devant de la scène l’une des polémiques les plus sensibles de notre pays, sans aucune raison", regrette Sigmar Gabriel, le porte-parole des sociaux-démocrates du SPD, dans le quotidien "Die Welt" de ce lundi.
L'atome, une nécessité ?
Le maintien de l'activité des centrales nucléaires allemandes figurait pourtant dans le programme de la CDU lors des dernières élections générales, en 2009, comme le rappelle le quotidien de gauche "Süddeutsche Zeitung". Angela Merkel avait alors fait part de son intention de revenir sur le calendrier établi par le socialiste Gerhard Schröder, qui prévoyait une fermeture de toutes les centrales nucléaires implantées dans le pays d’ici à 2021. Le chancelière estime en effet que l’atome est nécessaire pour éviter d'"ouvrir la porte à d’importantes augmentations du coût de l’électricité".
La bataille qui s’engage en Allemagne, où la décision du gouvernement doit encore être examinée par le Parlement, oppose "le plus important front anti-nucléaire d’Europe au lobby nucléaire, l’un des plus puissants du pays", explique le quotidien conservateur "Frankfurter Allgemeine Zeitung". Le SPD a prévenu qu’il n’hésiterait pas à porter cet accord devant la Cour constitutionnelle si le Parlement l’avalise.
Un combat de titan qui va se chiffrer en milliards d’euros. Le nouveau calendrier nucléaire devrait rapporter aux grands groupes énergétiques 1,6 milliard d’euros d’ici à 2016, selon le calcul effectué par plusieurs médias allemands. "L’accord entre la CDU et le FDP a été rédigé par le lobby nucléaire", s’insurge le parti radical de gauche Die Linke.
Pour tenter de tuer la polémique dans l’œuf, le gouvernement a assuré qu’il y aurait une enveloppe juteuse pour les énergies renouvelables. Le ministre de l’Environnement (CDU), Norbert Röttgen, a même évoqué 15 milliards d’euros d’investissements d’ici à 2016.