Déjà fragilisée par la crise mondiale, l'économie russe risque d'être plombée par les conséquences de la canicule et des incendies. Des économistes estiment le coût de la catastrophe à 14 milliards de dollars.
REUTERS - La canicule et les incendies qui sévissent en Russie pourraient coûter jusqu'à 14 milliards de dollars au pays, estiment mardi des économistes, alors que la météo ne prévoit aucun répit pour cette semaine.
Soucieux de soigner son image d'homme d'action et de minimiser les retombées politiques du désastre, le Premier ministre Vladimir Poutine s'est envolé à bord d'un avion bombardier d'eau au-dessus d'un brasier situé au sud-ouest de Moscou.
La télévision publique a diffusé des images du chef du gouvernement dans le cockpit de l'appareil, écouteurs sur la tête et boîtier de commande à la main.
Les autorités s'efforcent désormais d'éviter que l'incendie ne devienne politique. Le gouvernement et la mairie de Moscou ont notamment été accusés de ne pas avoir su répondre efficacement à la crise.
Lundi soir, le ministre des Situations d'urgence, Sergueï Choïgou, a proposé d'injecter 54 milliards de roubles (1,37 milliard d'euros) sur trois ans pour moderniser les services de lutte contre les incendies, dont l'efficacité a été mise en cause.
Mais les détracteurs de ce projet le jugent trop peu ambitieux et estiment qu'il ne pourra remettre sur pieds un service essoré par une gestion à court-terme et le manque d'équipement.
Le politologue Stanislav Belkovsky, critique envers le Kremlin, a ainsi jugé que ces dépenses "ne résoudraient rien du tout". Selon lui, ce sont des dizaines de milliers de camions de pompiers et des dizaines de bombardiers d'eau qui manquent à la Russie, alors que le pays n'en construit plus.
Deux victimes des flammes
Selon le ministère des Situations d'urgence, la superficie touchée par les incendies restait la même mardi, avec 557 foyers répartis sur 1.740 km2. Une porte-parole a précisé que 42 bombardiers d'eau et près de 166.000 personnes étaient mobilisés contre les flammes.
Deux d'entre elles - un agent du ministère de l'Intérieur et un gardien de prison - ont péri lundi dans les environs du centre de recherche nucléaire de Sarov et dans la république voisine de Mordovie, ce qui porte à 54 le nombre de victimes directes des flammes.
Le maire de Moscou Iouri Loujkov, critiqué pour ne pas être rentré de vacances la semaine dernière, a estimé que seule la nature était responsable de la catastrophe.
"C'est un nouveau défi que nous envoie le ciel", dit-il dans une interview publiée mardi par le quotidien russe Izvestia.
Mais le Kremlin n'a guère goûté son absence la semaine dernière, et l'a fait savoir via une source interne citée par les trois grandes agences de presse du pays. "L'absence du maire n'a certainement pas facilité la prise rapide des décisions qui s'imposaient", a déclaré cette source.
Quant au chef des services forestiers de la région de Moscou et des provinces voisines, il a été limogé par la ministre de l'Agriculture Elena Skrinnik.
La vague de chaleur, la pire jamais enregistrée en Russie, a détruit de nombreuses récoltes et les incendies ont plongé Moscou dans un nuage de fumées toxiques.
Selon Alexandre Morozov, économiste en chef pour la Russie et la CEI chez HSBC, la canicule et ses conséquences pourraient retrancher un point de pourcentage de croissance du produit intérieur brut (PIB) russe.
Avant le désastre, une croissance de 4% était prévue pour le PIB russe en 2010, après la chute de 7,9% subie en 2009 à cause de la crise financière.
"Les pertes dans l'agriculture semblent plus graves à présent, et je pense qu'elles contribueront à (la perte de) 0,5 point de pourcentage. Le demi-point restant viendra des autres secteurs: production industrielle, demande et productivité en baisse", a déclaré Morozov.
Le nuage toxique qui s'étend sur Moscou devrait quant à lui diminuer les bénéfices du secteur commercial et de la restauration.
Selon les météorologistes, les températures dépassent les 32°C depuis 50 jours consécutifs à Moscou et dans le centre du pays. Des pics moyens à 35°C au moins sont à prévoir pour toute cette semaine, a indiqué à Reuters le directeur adjoint des services météo, Dmitri Kiktov.