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Le Liban accueille le président syrien Bachar al-Assad

Le président syrien effectue ce vendredi sa première visite au Liban depuis 2002. Un tournant dans les relations entre les deux pays, longtemps restées au point mort après l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri en 2005.

Le président  libanais Michel Sleimane accueille, vendredi, le roi Abdallah d'Arabie saoudite et le président syrien Bachar al-Assad pour un sommet tripartite inédit. Cette visite intervient alors que le Liban traverse une crise qui menace la stabilité du pays.

Le tension est, en effet, brusquement montée d'un cran à Beyrouth après les mises en garde répétées du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, qui affirme s'attendre à ce que des membres de son parti soient accusés par le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) chargé de juger les auteurs de l’attentat qui a tué l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, en février 2005. Le complot, fomenté par les États-Unis et Israël, était, selon lui, destiné à porter atteinte à "la Résistance" et à semer la discorde entre sunnites et chiites.

En 2008, des combats de rue à caractère confessionnels, qui avaient opposé des partisans de l'actuel Premier ministre - et fils de Rafic Hariri -, le sunnite Saad Hariri, et ceux du parti chiite, s'étaient soldés par la mort d'une centaine de personnes.

"Calmer les esprits"

Forts de leur influence respective au pays du Cèdre, le monarque saoudien, protecteur du camp sunnite, et le président syrien, allié du parti chiite pro-iranien, se rendent donc à Beyrouth pour tenter de désamorcer toute nouvelle crise. "Cette visite historique a pour objectif de calmer les esprits qui se sont échauffés après les discours enflammés de

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Explications de notre correspondant Isabelle Dellerba

Hassan Nasrallah. Sans s’ingérer dans les affaires libanaises, Syriens et Saoudiens peuvent aider à faire baisser la tension", déclare à France24.com le député Ahmad Fatfat, membre du Courant du futur de Saad Hariri

Ce sommet est par ailleurs un évènement diplomatique majeur. Le dernier passage des deux chefs d’État au Liban remonte en effet à 2002, à l’occasion du Sommet arabe de Beyrouth. En froid après l’assassinat de Rafic Hariri, détenteur de la nationalité saoudienne et proche de la famille royale, la Syrie, qui avait été accusée du crime par une partie de la classe politique libanaise, et l’Arabie saoudite ont entamé un rapprochement à l’automne 2009.

Realpolitik

Une détente qui a conduit à l’apaisement des relations exécrables entre la Syrie et le Liban. Car la venue du président Bachar al-Assad à Beyrouth, confirmée ce jeudi par une source de la présidence libanaise, marque un tournant dans les relations syro-libanaises. Son père, Hafez el-Assad, ne s’était rendu au Liban qu’une seule fois, en 1975...

Cette visite était impossible il y a encore quelques mois, tant la rancœur à l’égard de l’ancien occupant syrien (de 1976 à 2005), toujours influent au pays du Cèdre, avait empoisonné les rapports entre les deux pays. "La visite du président Assad est un signe politique fort qui démontre son respect envers les institutions libanaises et qui confirme que les relations entre les deux pays sont reparties sur des bases plus saines, respectant les intérêts de chacun", reprend Ahmad Fatfat.

Jusqu’à présent en effet, les déplacements officiels se faisaient dans l’autre sens. Ainsi, le président Sleimane s’est rendu à plusieurs reprises à Damas depuis son élection en mai 2008. Saad Hariri, pourtant convaincu de l’implication de la Syrie dans l’assassinat de son père, lui a emboîté le pas à trois reprises. "En acceptant de devenir Premier ministre, Saad Hariri a mis de côté ses émotions personnelles au nom des intérêts stratégiques et économiques majeurs du Liban. Notre pays se doit d’avoir des relations stables et sincères avec son voisin syrien", explique Ahmad Fatfat.

Les deux pays, qui n’entretiennent des relations diplomatiques bilatérales que depuis 2008, ont signé récemment des accords économiques. Un compromis entre affection et realpolitik qui ne signifie pourtant pas que le Premier ministre libanais a tourné la page. "Le tribunal reste sacré à ses yeux et, pour l’instant, personne au Liban ne connaît le contenu de l’acte d’accusation qui sera publié par cette juridiction", conclut Ahmad Fatfat.