Au temps de la Gabelle, l’or blanc était un vrai enjeu commercial. Et l’histoire se poursuit. Depuis quelques temps les paludiers de Guérande livrent une guerre économique avec les coréens du sud. Nous sommes allés en Loire-Atlantique mener l’enquête.
La petite cité fortifiée sur la côte d’amour est un fief en apparence paisible. En réalité, elle est le théâtre d’une sévère bataille d’intelligence économique contre la concurrence coréenne. Non pas que les paludiers veillent jalousement sur le secret d’un sel récolté depuis des siècles selon les mêmes principes ancestraux, mais ils estiment avoir été abusés.
Lorsqu’en 1993 une délégation de sud coréens arrive à Guérande pour demander à recevoir les enseignements des paludiers, ils sont accueillis à bras ouverts. Les agriculteurs français se montrent magnanimes. Il faut dire que c’est une belle aubaine : les coréens leur font miroiter des marchés dans le sud-est asiatique.
Mais quelques années après, les guérandais apprennent que, sous couvert d’une obscure raison sanitaire, la vente de sel de Guérande est interdite en Corée. Et pire : les coréens commercialisent leur propre sel en copiant l’emballage et le design des produits de leurs homologues français.
Les paludiers se sont trouvé un peu désarçonnés, sans vraiment avoir les moyens de se défendre. Le député-maire de Guérande, Christophe Priou, déplore l’incapacité de l’Union Europe à prendre des décisions pour protéger les produits de terroir qui font la renommée de la France. Le consommateur a de plus en plus de mal à s’y retrouver. Comment reconnaître une moutarde de Dijon d’une moutarde américaine, un cabernet français d’un cabernet californien, un cognac d’un brandy russe ? Impossible de distinguer les contrefaçons parmi les kyrielles de produits vendus dans les étals des supermarchés.
L’invité de notre émission, Jean-Louis Buër directeur de l’INAO (Institut national des appellations d’origine) explique que le sel de Guérande ne bénéficie pas de l’AOC (Appellation d’origine contrôlée). Ce label ne peut être délivré qu’à un produit alimentaire et non à un produit minier ! Mais il assure qu’il recevra bientôt la norme IGP (Indication géographique protégée).
En attendant les producteurs vont devoir se prémunir pour faire face à cette nouvelle forme de compétition économique.