Après l'assaut meurtrier mené par Tsahal contre la "flottille de la paix" lundi, la communauté internationale presse l'ONU de mener une enquête sur les circonstances du drame. Au grand dam d'Israël qui se dit capable de mener seul les investigations.
Israël a refusé que les Nations unies se chargent de l’enquête sur l’assaut de Tsahal qui a coûté la vie à huit militants pro-palestiniens turcs et un Américain. Le chef de la diplomatie israélienne, Avigdor Lieberman, a déclaré que l’État hébreu "est capable de mener une enquête crédible sans l’ONU". Des propos qui laissent sceptique la communauté internationale mais pas les États-Unis, qui apportent leur soutien au pays.
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Pour Azadeh Kian-Thiebault, spécialiste du Moyen-Orient au CNRS, le comportement de l’État hébreu est "suicidaire". "Israël est en train de s’isoler par rapport au monde arabe et surtout par rapport à la Turquie." En menant cette enquête seul, Tel-Aviv "souhaite évidemment appuyer sa version des faits pour ne pas perdre la face, souligne la spécialiste. Mais cette position est gravissime pour ses relations internationales." Pourtant Israël ne cède pas. Une tactique destinée, selon Azadeh Kian-Thiébault, à "souder la population autour du gouvernement, créer une solidarité nationale qui justifierait l’isolement".
Pour calmer le jeu, Israël a toutefois proposé la participation d’observateurs étrangers au processus. De leur côté, les États-Unis se sont inquiétés de ce que l'État hébreu ne puisse être en charge d’une enquête "qui devra satisfaire aux critères internationaux". Un député américain démocrate, Denis Kucinich, a cependant appelé, vendredi, le président américain, Barack Obama, à demander une enquête indépendante "qui ne soit pas menée pas le pays dont la conduite est remise en cause".
Les pays arabes en colère
Mardi, la Ligue arabe et l’Organisation de la conférence islamique (OCI) ont convoqué le Conseil des droits de l’Homme en session extraordinaire pour réclamer la mise en place d’une commission d’enquête internationale. Lors du vote, Israël a rejeté la résolution votée par 32 des 47 membres du Conseil. "Il est tout à fait normal que les pays arabes soient irrités par la position israélienne", explique Azadeh Kian-Thiebault. Car au-delà du problème gazaoui, c’est tout le processus de paix au Moyen-Orient qui est menacée. " Les États arabes ont l’impression d’être exclus des grands lignes politiques, d’être méprisés. Confier l’enquête à Israël reviendrait à justifier à leurs yeux l’impunité du pays".
Les corps des neuf militants tués lors de l'assaut israélien contre la flottille d'aide internationale ont été transférés à l'institut médico-légal d'Istanbul. Selon les médecins légistes, ils ont tous été tués par balle dont l'un à bout portant. Il s'agit de huit Turcs et d'un Américain d'origine turque.
Entre les deux camps se trouve le Quartet (ONU, Union européenne, États-Unis et Russie) et plus précisément l’Union européenne qui peine à trouver un consensus. Pour la spécialiste, l’Europe est dans une position très délicate. La France et le Royaume-Uni se sont d’ailleurs abstenus lors du vote du Conseil des droits de l’Homme. "Les pays du Vieux Continent sont les bailleurs de fonds des Palestiniens. Ils sont obligés de regarder de loin cette affaire sans prendre de réelles positions pour ne contrarier ni leurs partenaires arabes ni leur allié israélien", explique-t-elle.
Mardi matin, les 15 pays membres du Conseil de sécurité de l’ONU sont pourtant parvenus à s’entendre sur un texte commun. La résolution adoptée à l’unanimité recommande une enquête rapide, impartiale, crédible et transparente, mais sans désigner le pays ou l’organisation qui sera responsable des investigations.