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Une vague de rigueur s'abat sur l'Europe

Après la Grèce, l'Espagne et le Portugal, la Grande-Bretagne et l'Italie ont annoncé à leur tour des plans de réduction de leurs déficits publics. Tour d'horizon européen de ces mesures d'austérité.

Conséquence de la crise grecque, de plus en plus de pays européens sont engagés dans une véritable lutte contre les déficits. Afin d'assainir leur situation budgétaire et de rassurer les marchés, les États adoptent les uns après les autres des plans de rigueur. Au risque de provoquer la colère des populations et des syndicats...

En Italie, le gouvernement de Silvio Berlusconi a approuvé le 25 mai au soir un plan d'austérité visant à réduire le déficit budgétaire de 5,3 % du produit intérieur brut (PIB) cette année à 2,7 % en 2012, soit une économie de 24 milliards d'euros sur deux ans.

Le projet de budget du ministre de l'Économie, Giulio Tremonti, prévoit notamment un gel des salaires des fonctionnaires pendant trois ans, une réduction des dépenses des ministères et des fonds alloués aux collectivités locales, un non-remplacement de 80 % des agents qui quitteront le secteur public entre 2011 et 2013, une baisse des salaires des hauts fonctionnaires et des ministres les mieux payés, un départ à la retraite différé de plusieurs mois pour une majorité des salariés et une lutte renforcée contre l'évasion fiscale. Giulio Tremonti a en revanche exclu toute augmentation d'impôts.

Si deux syndicats importants se sont dits prêts à soutenir les mesures, la plus grande centrale syndicale italienne - la CGIL - a dénoncé des mesures "injustes", "le plus gros des sacrifices étant demandé aux salariés". 

Le 24 mai, c'est Londres qui a annoncé un plan de réduction des dépenses publiques de 7,3 milliards d'euros sur l'année fiscale. Gel des embauches dans la fonction publique, baisse des dépenses des différents ministères... Ces coupes franches décidées par le nouveau gouvernement de David Cameron, issu d'une coalition entre conservateurs et libéraux-démocrates, ravissent le patronat. Elles ont en revanche fait bondir les syndicats, qui y voient un retour au tatchérisme. Et le ministre des Finances, George Osborne, a prévenu : des mesures encore plus radicales doivent être annoncées le 22 juin, lors de la présentation du budget d'urgence. Objectif : réduire l'énorme déficit public du pays qui s'élève à plus de 11 % du PIB.

En Espagne, le gouvernement a adopté le 20 mai d'impopulaires mesures d'austérité afin d'économiser 15 milliards d'euros en 2010 et 2011. Il avait déjà entériné en janvier un plan d'austérité de 50 milliards d'euros.

Madrid va tenter de ramener ses déficits, qui ont explosé à 11,2 % du PIB en 2009, à environ 6 % en 2011, puis 3 % en 2013. Parmi les mesures annoncées figurent une réduction de 5 % des salaires des fonctionnaires, une baisse des dépenses d'investissement de l'État et un gel de la revalorisation automatique des retraites en 2011.

Alors que l'une des principales centrales syndicales assure qu'il y aura "probablement" une grève générale le 8 juin, lundi le Fonds monétaire international (FMI) a à nouveau appelé l'Espagne à prendre des réformes "urgentes" pour améliorer le fonctionnement de son marché du travail et de son système bancaire.

Hausse d'un point de la TVA, réduction des salaires dans la fonction publique et des dépenses de l'État, instauration d'une surtaxe sur les bénéfices des grandes entreprises supérieurs à 2 millions d'euros... Le Portugal n'échappe pas au tour de vis général. Le Premier ministre José Socrates, a annoncé le 13 mai ces mesures d'austérité, "fondamentales pour défendre l'économie du Portugal, mais aussi pour défendre l'Europe et la zone euro". Les syndicats appellent à manifester le 29 mai.

En Grèce, point de départ de la crise financière qui secoue l'Union européenne, les manifestations se succèdent depuis l'annonce du plan d'austérité par le gouvernement, en contrepartie du plan d'aide historique de 750 milliards d'euros adopté par l'Union européenne et le FMI. La quatrième grève générale en quatre mois a eu lieu le 20 mai, perturbant transports et secteur public.

La réforme des retraites est au cœur de la cure d'austérité que s'est engagé à mettre en place le gouvernement de Georges Papandréou. L'âge moyen de départ à la retraite devrait passer de 61,4 à 63,5 ans d'ici à 2015, alors que les pensions devraient être réduites, en moyenne, de 7 % d'ici à 2030. Le plan grec, qui doit permettre d'endiguer la dette abyssale de 300 milliards d'euros, prévoit également d'imposer de nombreuses taxes spéciales supplémentaires, sur le carburant, l’électricité, l’alcool ou encore les jeux d’argent, et une nouvelle hausse de la TVA. Aucun secteur, ou presque, n'est épargné.

L'Irlande, considérée avec la Grèce, l'Espagne et le Portugal comme l'un des "maillons faibles" de l'Union européenne, a pris dès 2008 des mesures de rigueur. Le gouvernement a imposé une baisse générale des allocations sociales et une réduction de 5 à 15 % des salaires des fonctionnaires. Avec un déficit qui devrait frôler les 20 % du PIB en 2011, Dublin entend continuer à appliquer des mesures d'austérité.

En France, la réforme des retraites est au centre du débat économique et politique. Alors que l'UMP tient aujourd'hui sa convention sur le sujet, le gouvernement semble décidé à repousser l'âge légal de départ à la retraite, actuellement fixé à 60 ans. Nicolas Sarkozy a décrété jeudi "priorité nationale" le redressement des comptes publics : Paris, qui a promis à Bruxelles de ramener son déficit public à 6 % en 2011 et 4,6 % en 2012, devrait enregistrer cette année un déficit historique de 8 % de son PIB. La "rigueur" serait nocive mais les économies budgétaires ne sont pas "incompatibles avec une stratégie de croissance, au contraire", a insisté le président français.

Selon un sondage Infraforces publié le 25 mai, plus de 90 % des Français estiment que la crise financière va affecter tous les aspects de leur vie quotidienne, et avant tout l'emploi et les retraites. Ils sont convaincus, à près de 78 %, que le gouvernement va mener une politique de rigueur.