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Total mis en examen pour corruption dans l'affaire "Pétrole contre nourriture" en Irak

Le groupe pétrolier français été mis en examen le 27 février pour corruption dans l'affaire "Pétrole contre nourriture", un programme mis en place entre 1996 et 2003 pour aider l'Irak, alors sous embargo, à nourrir sa population.

L’affaire "Pétrole contre nourriture" semblait être enterrée. C’était compter sans le juge Serge Tournaire, qui, le 27 février, a mis en examen le groupe pétrolier Total, comme personne morale, pour corruption, complicité et recel de trafic d’influence.

Le magistrat soupçonne l’entreprise française, vedette du CAC 40, d’avoir obtenu du pétrole en versant des pots-de-vin au régime de Saddam Hussein. Le groupe aurait ainsi contourné le programme "pétrole contre nourriture" de l’ONU.

Pendant plus d’un mois, le groupe a gardé secrète la procédure dont il est l’objet. Mais, mardi, le quotidien économique "Les Echos" a révélé l’affaire en s’appuyant sur "une information mentionnée discrètement dans le rapport annuel de Total rendu public la semaine dernière".

Une précédente procédure s’était soldée par un non-lieu

L’avocat de Total, Jean Veil, et un porte-parole du groupe ont confirmé, mardi, la mise en examen. "Cette décision relance la procédure judiciaire, a en outre admis l’avocat. Le juge a pris cette décision contre toute attente alors que son prédécesseur et le parquet avaient jugé le contraire, au moins implicitement", a-t-il poursuivi.

Une enquête lancée en 2007, toujours dans le cadre de l’affaire "Pétrole contre nourriture", avait abouti à la mise en examen de plusieurs personnalités – notamment l’ancien ministre de l’Intérieur Charles Pasqua et l’actuel PDG de Total, Christophe de Margerie. En septembre 2009, le procureur avait requis un non-lieu contre l’ensemble des personnes poursuivies. Il avait estimé que le dossier ne contenait aucun élément susceptible de prouver les délits.

Depuis, le dossier semblait en sommeil. Le juge Serge Tournaire, successeur de Xavière Siméoni sur ce dossier, a fait valoir "une autre analyse des faits juridiques" pour relancer l’affaire, et mettre en examen le groupe pétrolier.

Réseau de corruption à l’échelle mondiale

Le programme "Pétrole contre nourriture" mis en place par l’ONU entre 1997 et 2003 devait permettre à l’Irak de vendre son pétrole et d’acheter, en échange, nourriture et médicaments pour la population étranglée par l’embargo international. Des sanctions avaient été prononcées par le Conseil de sécurité de l’ONU après l’invasion du Koweït par l’Irak en 1990.

Le régime de Saddam Hussein avait détourné des milliards de dollars en organisant un vaste réseau de corruption et d’influence à travers le monde.

Selon un rapport américain, près de 2 milliards de dollars ont ainsi été détournés. La commission Volker, mise en place par l’ONU pour enquêter sur ces accusations, a révélé en 2005 que 2 200 entreprises basées dans 66 pays différents, avaient versé et perçu des pots-de-vin au gouvernement irakien pour obtenir les marchés. Des procédures sont actuellement en cours dans plusieurs pays du monde.