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Plusieurs partis de l’opposition ont annoncé, hier, qu'ils ne participeraient pas aux différentes élections prévues dans le pays le 11 avril. Mercredi déjà, le candidat de l'ex-rébellion sud-soudanaise s'était retiré de la course à la présidentielle.

Les élections présidentielle, législatives et régionales qui doivent se dérouler du 11 au 13 avril au Soudan devaient être le premier scrutin pluraliste de ces 24 dernières années dans le pays, mais les principaux partis d’opposition ont annoncé, jeudi, leur intention de ne pas y participer.

Lors de ce scrutin, les électeurs soudanais seront appelés à élire leur président, leurs députés, le Parlement du Sud-Soudan, et les gouverneurs et les assemblées des différents États de la fédération. Les élections du 11 avril s'inscrivent dans le cadre de l’Accord de paix globale signé en janvier 2005 entre l’ex-rébellion sud-soudanaise et les autorités de Khartoum. Le texte, qui a mis fin à deux décennies de guerre civile, prévoit également la tenue d’un référendum d’autodétermination au Sud Soudan en janvier 2011, à l’issue duquel la région pourrait faire sécession.

Mercredi, Yasir Arman, le candidat à la présidentielle du Mouvement populaire de libération du Soudan (MPLS), le parti né sur les cendres de l'ex-rébellion sud-soudanaise, avait déjà décidé de retirer sa candidature. Les représentants des principaux partis de l'opposition, rassemblés dans une coalition baptisée "Consensus national" - Le parti Umma (nationaliste), le Parti unioniste et démocratique (PUD) et le Parti communiste en font notamment partie -, ont décidé de lui emboîter le pas, ajoutant toutefois qu’ils ne participeraient pas non plus aux scrutins législatifs et régionaux, contrairement au MPLS.

Craintes de fraudes

"Les forces du Consensus national ont décidé de boycotter les élections à tous les niveaux", a ainsi déclaré Mariam al-Mahdi, membre du parti Umma, lors d'une conférence de presse à Omdurman, une ville voisine de Khartoum, la capitale soudanaise.

Officiellement, l’opposition justifie sa décision en expliquant craindre la fraude et le bourrage des urnes, explique Taoufik Mjaied, journaliste à FRANCE 24. Elle accuse notamment la Commission électorale de ne pas être indépendante et déplore que les bulletins de vote, qui devaient être imprimés par une entreprise slovène, soit finalement édités par une imprimerie nationale.

Il ne resterait plus que cinq petits candidats pour affronter le chef de l’État sortant, Omar el-Béchir, lors de la présidentielle. Il s'agit principalement d'indépendants et de membres de petits partis de la scène politique soudanaise. Parmi eux figure le célèbre opposant islamiste Hassan al-Tourabi.

Selon Mohamed Zaki, qui appartient au parti Umma, les forces du Consensus national reviendront sur leur décision si le gouvernement accepte notamment de renouveler la commission électorale nationale.

Les partis d’opposition misent sur le fait qu’Omar el-Béchir a tout intérêt à ce que le vote se déroule dans les conditions les plus normales possibles. Sous le coup d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité au Darfour, une région de l’ouest du pays en proie à un violent conflit, celui-ci cherche à légitimer son pouvoir par les urnes.

Ménager la chèvre et le chou

La stratégie du MPLS est, elle, plus délicate. Il participe d'une part à un gouvernement d’union nationale aux côtés du parti du président El-Béchir, le Parti du Congrès national, formé en vertu de l’accord de paix de 2005. En outre, il n’a pas intérêt à se mettre complètement à dos l'homme fort de Khartoum, afin que celui-ci ne cherche pas à remettre en cause la tenue du référendum sur le statut du Sud-Soudan, prévue en début d'année prochaine. "Ces élections importent peu pour les sudistes. Ce qui compte pour eux, c’est le référendum pour l’autodétermination", confirme Taoufik Mjaied.

En se retirant de la présidentielle sans boycotter les autres scrutins, le MPLS ménage donc, selon de nombreux observateurs, la chèvre et le chou. D’un côté, il réaffirme "sa volonté de rester dans l'opposition et de faire front avec l'opposition du Nord, qui s'est prononcée très clairement en faveur du boycott", a expliqué sur RFI Roland Marchal, chercheur au Centre d’études et de recherches internationales. De l’autre, il "sauvegarde l’essentiel en participant au processus électoral : le référendum".