Pierre Camatte a été libéré par Al-Qaïda au Maghreb islamique. En échange, l'organisation terroriste a obtenu la libération de 4 islamistes. Une décision qui suscite l'ire de la Mauritanie et de l'Algérie, d'où deux d'entre eux sont originaires.
AFP - La branche maghrébine d'Al-Qaïda a libéré mardi l'otage français qu'elle détenait depuis près de trois mois dans le nord du Mali, peu après après avoir obtenu de Bamako la remise en liberté de quatre islamistes.
La libération de l'otage français survient sur fond de crise diplomatique entre le Mali et deux pays voisins. L'Algérie et la Mauritanie ont en effet décidé de rappeler, chacun, leur ambassadeur à Bamako pour protester contre la remise en liberté de présumés terroristes algériens et mauritanien.
Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), qui retient par ailleurs toujours cinq autres otages européens, avait menacé de tuer Pierre Camatte si elle n'obtenait pas la liberté de ces quatre islamistes (deux Algériens, un Burkinabè, un Mauritanien).
"Pierre (Camatte) a été libéré. Il se porte bien, c'est le plus important", a déclaré par téléphone à l'AFP l'un des principaux négociateurs maliens, sous couvert de l'anonymat, mardi en début de soirée.
Pierre Camatte, 61 ans, avait été kidnappé en pleine nuit le 26 novembre 2009 dans un hôtel de Ménaka (nord-est) par des Maliens de la région qui l'auraient ensuite "vendu" à Aqmi, selon des sources maliennes proches du dossier.
Depuis, il aurait été retenu par le groupe de l'Algérien Abdelhamid Abou Zeïd, responsable de l'assassinat en juin 2009 d'un touriste britannique, l'otage Edwin Dyer.
La remise en liberté s'est faite dans le grand nord du Mali, dans la région de Kidal, selon ce négociateur, ne souhaitant pas en dire davantage.
Le secrétaire d'Etat français à la Coopération, Alain Joyandet, interrogé dans la journée au sujet de la libération des quatre islamistes, avait répondu à la chaîne de télévision LCI: "C'est un premier signe après les demandes que la France a faites, j'espère que tout cela est une question d'heures et de jours".
itLe chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, avait effectué deux visites à Bamako, les 1er et 13 février, et le secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, s'était aussi déplacé pour le 2ème voyage.
Lundi, un conseiller du président malien Amadou Toumani Touré avait justifié la remise en liberté des quatre islamistes réclamée par Al-Qaïda en disant: "Nous étions confronté à un problème: comment tout faire pour sauver la vie du Français".
Mais, dans les pays voisins, cette attitude a été critiquée comme une faiblesse inacceptable face au terrorisme.
Comme la Mauritanie l'avait fait lundi, l'Algérie a décidé mardi de rappeler, "pour consultation", son ambassadeur en poste à Bamako.
La décision de Bamako de libérer "des terroristes recherchés par des pays voisins est un développement dangereux pour la sécurité et la stabilité dans la région sahélo-saharienne et sert, objectivement, les intérêts du groupe terroriste s'activant dans la région sous la bannière d'Al-Qaïda", a déclaré le ministère algérien des Affaires étrangères.
En Mauritanie, le porte-parole du parti au pouvoir (Union pour la République, UPR), Saleh Ould Dehmache, a jugé que la décision malienne n'avait "pas été bien calculée", car "elle encourage et rétribue les forfaits de ces groupes hors-la-loi qui menacent la paix dans toute la région".
Les cinq otages européens toujours détenus dans le désert malien ont été capturés sur le territoire mauritanien: trois Espagnols le 29 novembre puis un couple d'Italiens le 17 décembre.
Pour la libération de l'Italien, les ravisseurs avaient exigé non seulement la remise en liberté des quatre islamistes au Mali mais aussi la sortie de prison de combattants détenus en Mauritanie, selon une source proche du dossier.