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Retraites, économies : début du marathon budgétaire pour la Sécurité sociale
L'Assemblée nationale a démarré mardi l'examen du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Au menu, la suspension de la réforme des retraites et d'autres mesures qui divisent les députés, au point que l'adoption du texte n'est pas certaine.
La ministre de la Santé Stéphanie Rist s'exprime à l'Assemblée nationale le 29 octobre 2025 à Paris. © Thibaud Moritz, AFP

L'Assemblée nationale a entamé mardi 4 novembre l'examen du budget de la Sécurité sociale, qui contient la suspension de la réforme des retraites mais aussi plusieurs mesures explosives, et dont l'adoption la semaine prochaine est encore très incertaine.

Franchises médicales, durée des arrêts de travail,... Les discussions sur le Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) s'annoncent inflammables. La gauche dénonce "un musée des horreurs", et le RN un "copier-coller mal fagoté" d'un projet initial de François Bayrou.

Le gouvernement a prévu des économies massives pour réduire le déficit de la Sécu à 17,5 milliards en 2026, contre 23 cette année. "Sans maîtrise, le système finirait par se consumer de lui-même", a déclaré la ministre de la Santé Stéphanie Rist.

Mardi soir, les députés ont entamé les débats sur le fond en supprimant l'article liminaire, tableau obligatoire des prévisions de dépenses et recettes de la Sécu pour 2025 et 2026. Un premier vote par essence politique, mais serré. Le RN, les Insoumis, les ciottistes et les communistes ont voté sa suppression, les socialistes ont majoritairement voté pour le maintenir, et les écologistes se sont abstenus.

Vote sur l'ensemble du texte le 12 novembre

Les députés ont aussi écarté dans un vote plus large l'objectif de dépenses de l'Assurance maladie (ONDAM) 2025, la quasi-intégralité des députés PS et écologistes ayant cette fois voté la suppression. Un net coup de frein en 2026 sur ces mêmes dépenses d'assurance maladie, qui n'augmenteraient que de 1,6 %, est au cœur des débats, car il supposerait 7,1 milliards d'euros d'économies par rapport à l'évolution naturelle.

La ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin a estimé que l'objectif réel de dépenses était plus élevé une fois certains transferts opérés, et assuré que le gouvernement allait débloquer "un milliard de plus à répartir entre l'hôpital, le médicosocial et France Santé".

Les débats sur les articles sont programmés jusqu'à dimanche soir, avant un vote sur l'ensemble du texte le 12, après deux journées de relâche en raison de l'Armistice du 11-Novembre. Selon plusieurs sources parlementaires et gouvernementale, la discussion sur la suspension de la réforme des retraites, condition de la non-censure du PS, pourrait toutefois être renvoyée au 12 novembre, avant le vote, pour permettre au maximum de députés d'être présents.

Mais il faudrait pour cela les députés adoptent la partie "recettes", dont l'examen a commencé mardi soir, et qu'ils avaient rejeté en commission. S'ils la repoussent à nouveau, l'ensemble du texte sera rejeté sans aborder la partie "dépenses" et donc la suspension de la réforme des retraites. Le budget sera quoi qu'il en soit remanié. "C'est sur le PLFSS que le sort du gouvernement se joue dans les jours qui viennent", a résumé à l'AFP le socialiste Jérôme Guedj.

Retraites, économies : début du marathon budgétaire pour la Sécurité sociale
Le Premier ministre Sébastien Lecornu (C) à l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de budget, le 31 octobre 2025 à Paris. © Alain Jocard, AFP

Sébastien Lecornu a lui-même déclaré être prêt à certains compromis, notamment pour renoncer au gel des pensions de retraite, - casus belli pour de nombreux groupes -, et des minimas sociaux. Mais "on ne va pas mettre l'économie à terre", a-t-il prévenu devant les députés Renaissance.

Incertitudes

Des incertitudes planent sur le financement de la suspension de la réforme des retraites (au moins 100 millions d'euros en 2026 et 1,4 milliard en 2027). Les propositions gouvernementales d'une surtaxe sur les complémentaires santé, ou d'une sous-indexation des retraites, ont été fustigées en commission.

Pour remplir les caisses, le PS propose une hausse de la CSG sur les revenus du capital, mécanisme auquel Sébastien Lecornu semble ouvert, comme certains députés Renaissance ou MoDem. Le débat sur cette mesure devrait avoir lieu mercredi.

Thibault Bazin (LR), rapporteur général du budget est contre, estimant qu'elle pèsera sur "les produits d'épargne de millions de Français". "Le sujet n'est pas ce que le gouvernement accepte (...) c'est ce que vous votez entre vous", a insisté plus largement Amélie de Montchalin, invoquant la promesse gouvernementale de renoncer à l'arme du 49.3.

Les députés devront se hâter avec près de 2 500 amendements déposés (une partie sera irrecevable). Le 12 novembre, le texte sera transmis au Sénat en raison des délais constitutionnels. Si le vote a lieu, l'adoption du texte dépendra en grande partie des abstentions. À gauche d'abord, alors que le PS a pour l'instant exclu de voter. Au RN aussi éventuellement, Marine Le Pen n'ayant pas exclu la possibilité d'une abstention - tout comme celle d'un vote contre.

Avec AFP