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La mystérieuse disparition de détenus d'Alligator Alcatraz, le centre de rétention de Trump
Des médias rapportent que des centaines de personnes détenues dans le centre de rétention pour immigrés en situation irrégulière, situé en Floride et connu sous le nom d'"Alcatraz des alligators", ont disparu de la base de données en ligne de la police américaine de l'immigration (ICE). Selon des associations de défense des droits des immigrés, il n'est ainsi plus possible de les localiser.
Le président américain Donald Trump visite un centre de détention temporaire pour migrants connu sous le nom informel d'"Alligator Alcatraz" à Ochopee, en Floride, aux États-Unis, le 1er juillet 2025. AFP - ANDREW CABALLERO-REYNOLDS

Des centaines de personnes passées par l'"Alcatraz des Alligators", le centre de rétention pour migrants construit au milieu des marécages de Floride, ont disparu des radars. Selon le journal Miami Herald, les deux tiers des 1 800 individus qui y étaient détenus en juillet n'apparaissent plus dans la base de données en ligne de de la police américaine de l'immigration (ICE).

Environ 800 détenus ne sont pas enregistrés dans la base de données en ligne de l'ICE. Et dans 450 cas, aucun lieu n'est indiqué. Le site se contente d'inviter à "appeler l'ICE pour plus de détails". "Une mention vague qui, selon les avocats, pourrait signifier qu'un dossier est encore en cours de traitement, qu'un détenu est en plein transfert entre deux sites ou sur le point d'être expulsé", précise le quotidien américain.

"Certains détenus d'Alligator Alcatraz qui n'ont pas pu être localisés dans la base de données de l'ICE pourraient ainsi avoir été expulsés même si les données internes obtenues par le Herald montrent que la grande majorité des personnes incarcérées n'avaient pas reçu d'ordre définitif d'expulsion d'un juge avant d'entrer dans l'établissement", ajoute le Miami Herald.

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Des proches sans nouvelles

Le journal américain relate notamment le cas de Michael Borrego Fernandez, un ressortissant cubain de 35 ans, détenu à Alligator Alcatraz pendant presque tout le mois de juillet. Selon son avocat, il a ensuite été transféré au centre de détention de Krome, à Miami, puis à celui d'Otay Mesa à San Diego. Sans nouvelles de lui pendant une semaine alors qu'il souffrait de problèmes de santé, ses proches ont finalement appris qu'il avait été expulsé vers l'État mexicain de Tabasco. 

Interrogé à ce sujet par le quotidien espagnol El Paris, le Département américain de la Sécurité intérieure (DHS) a répondu que "le nombre de détenus à Alligator Alcatraz fluctue constamment, car ils sont expulsés et transférés vers les centres de détention de l'ICE pour une procédure d'expulsion ultérieure", et que "tous les détenus ont la possibilité de communiquer avec leurs avocats et leur famille". "L'objectif de l'ICE est d'expulser les clandestins du pays le plus rapidement possible", a expliqué le DHS.

L'ouverture début juillet d'Alligator Alcatraz, construit dans une vaste zone humide subtropicale regorgeant d'alligators, de crocodiles et de pythons, a suscité l'indignation parmi les détracteurs de la politique migratoire répressive de Donald Trump, qui ont qualifié le site d'"inhumain". Amnesty International rapporte notamment un accès insuffisant à l'eau potable, aux produits d'hygiène, un manque de soins médicaux adéquats, un accès minimal aux avocats et aux informations juridiques qui compromet la capacité des personnes à contester leur détention, ainsi que des atteintes psychologiques et la peur induite chez les prisonniers par l'emplacement de l'établissement dans un environnement dangereux et isolé.

La mystérieuse disparition de détenus d'Alligator Alcatraz, le centre de rétention de Trump
Vue générale d'un centre de détention temporaire pour migrants, connu sous le nom informel d'"Alligator Alcatraz", le jour de la visite du président américain Donald Trump, à Ochopee, en Floride, aux États-Unis, le 1er juillet 2025. REUTERS - Evelyn Hockstein

Une fermeture prochaine ?

Sous le feu des critiques, cette prison controversée pourrait bientôt fermer ses portes. Le centre serait déjà en train d'être vidé de ses détenus, selon un échange de messages consultés par l'agence Associated Press et le New York Times. Dans un courriel envoyé à un rabbin du sud de la Floride lui demandant s'il pouvait servir comme aumônier dans l'établissement, le directeur exécutif de la Division de gestion des urgences de Floride, Kevin Guthrie, a en effet répondu : "Nous allons probablement être réduits à 0 personne d'ici quelques jours."

Cette baisse de la population du centre de rétention fait suite à une décision de la juge de district américaine Kathleen Williams, qui a ordonné en août à la Floride et à l’administration Trump de cesser d’amener de nouveaux détenus dans l’établissement et de réduire progressivement ses activités dans les 60 jours. Selon le média public américain NPR, la magistrate a émis cette injonction préliminaire en réponse à une plainte déposée par deux groupes environnementaux et la tribu Miccosukee. 

Ces derniers ont plaidé que la construction et l'exploitation devaient être interrompues jusqu'à ce que les autorités fédérales et étatiques se conforment aux lois environnementales fédérales. Selon leur plainte, l'installation de la prison menace des zones humides écologiquement sensibles qui abritent des espèces végétales et animales protégées. Dans son ordonnance, la juge Kathleen Williams a déclaré que les plaignants avaient démontré que la construction précipitée enfreint la loi fédérale exigeant la consultation du public, l'examen des alternatives et une étude d'impact environnemental.

D'autres centres de détention

Mais cette fermeture est désormais contrariée. Après un appel déposé par la Floride et l'administration Trump, un tribunal d'Atlanta en Géorgie a annulé début septembre l'ordonnance du juge Williams. "Alligator Alcatraz est en fait, comme nous l'avons toujours dit, toujours en activité", s'est félicité le gouverneur de Floride Ron DeSantis. "Un juge de gauche a statué de manière invraisemblable que, d'une manière ou d'une autre, la Floride n'était pas autorisée à utiliser son propre territoire pour cette mission importante parce qu'elle n'avait pas fait d'étude d'impact environnemental", a-t-il ajouté.

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En réponse, un avocat du Centre pour la diversité biologique, l'un des plaignants dans le procès, a affirmé que la décision était "un coup dur pour les Everglades d'Amérique et toutes les créatures vivantes qui s'y trouvent, mais l'affaire est loin d'être terminée".

Fermeture ou pas, ce recours montre que l'administration de Donald Trump et les États dirigés par les républicains ne comptent pas abandonner ce type de centres de détention. La BBC souligne ainsi que d'autres installations temporaires sont en cours de construction dans plusieurs États dirigés par les Républicains. Le média britannique mentionne un centre en Floride surnommée "Deportation Depot" ("Dépôt de déportation") et un autre dans l'Indiana que les responsables de la sécurité intérieure ont baptisée "Speedway Slammer", en référence au circuit automobile d'Indianapolis.

Cité par la BBC, Tom Homan, le responsable de la politique d'expulsions de l'administration Trump, a ainsi affirmé que même si Alligator Alcatraz était une "excellente installation de transition", il ne le voyait pas comme une solution à long terme. "Je pense que l'ICE a besoin de plus d'installations physiques", a-t-il ajouté. "Nous avons maintenant les fonds nécessaires pour construire des infrastructures… des installations permanentes."