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Larry Ellison, le dinosaure de la tech qui dispute à Musk le titre d'homme le plus riche du monde
Fondateur d'Oracle, l'une des plus importantes firmes technologiques américaines, Larry Ellison est devenu brièvement mercredi l'homme le plus riche du monde devant le patron de Tesla, Elon Musk. Dopée par une flambée historique de la valorisation boursière de son entreprise, ce proche de Donald Trump a vu sa fortune personnelle bondir en une journée de 100 milliards de dollars. Un record.
Larry Ellison, président et directeur technique d'Oracle Corporation, dans le bureau ovale de la Maison Blanche, le 3 février 2025, à Washington. © Evan Vucci, AP

Son nom est moins connu du grand public que celui du bruyant patron de Tesla et Space X, pourtant Larry Ellison apparaît comme un personnage tout aussi haut en couleur : adepte du transhumanisme, playboy au train de vie exubérant, patron emblématique de la Silicon Valley et figure centrale de l'alliance des Big Tech avec Donald Trump... Larry Ellison, 81 ans, est devenu, mercredi 10 septembre, l'homme le plus riche du monde, avant qu'Elon Musk ne regagne sa couronne.

Comme le rapporte Bloomberg, la fortune totale de l’octogénaire a bondi à 393 milliards de dollars, soit un gain de 100 milliards en une seule journée. Du jamais vu dans l'histoire, qui s'explique par une hausse tout aussi inédite de la capitalisation boursière d'Oracle, l'entreprise qu'il a fondée en 1977 et dont il détient 40 %.

Championne des bases de données et du cloud, Oracle a vu son cours de bourse augmenter de 39 % grâce à des commandes spectaculaire en matière d’intelligence artificielle. Le montant des contrats s’est en effet envolé à la fin du trimestre, atteignant 455 milliards de dollars contre 138 milliards à l’issue du précédent exercice. Le plus emblématique est celui conclu avec OpenAI, estimé à 30 milliards de dollars par an.

Des chiffres qui donnent le tournis et démontrent une nouvelle fois l'ampleur de la révolution technologique en cours. En mettant à disposition ses capacités en puissance de calcul à distance, Oracle est devenue en temps record un pilier de l’entraînement des modèles d’IA, au même titre que Nvidia, le spécialiste des processeurs graphiques.

Pourtant, difficile d'imaginer il y a encore quelques années que Larry Ellison, considéré comme le dernier dinosaure de l'informatique aux États-Unis, jouerait les premiers rôles dans le domaine de l'IA, à l'instar des quadragénaires Sam Altman ou Mark Zuckerberg. Mais c'était sans compter l'appétit sans fin de l'octogénaire pour les défis technologiques et le soutien d'un certain Donald Trump.

Dépenser sans compter

Parti de rien pour atteindre le sommet, le parcours de Larry Ellison ressemble à une parfaite success story à l'américaine. Né en 1944 à New York d'un père pilote à l'US Air Force et d'une jeune femme juive non mariée, il est confié à neuf mois à un oncle et une tante de Chicago. Il ne reverra sa mère biologique qu'à l'âge de 48 ans.

Le jeune Larry suit des études supérieures de sciences et mathématiques qu'il abandonne pour rejoindre à la fin des années 1960 le soleil de la Californie, et plonge dans le grand bain de l'informatique.

Après avoir décroché un contrat de deux ans pour la création d'une base de données pour la CIA, l'agence centrale de renseignement du gouvernement américain, il fonde avec deux associés et une mise de départ de 2 000 dollars Oracle corporation.

Le succès est fulgurant. Mais le prodige de l'informatique joue avec le feu. Pour embellir les résultats, il fait enregistrer de simples commandes comme des ventes fermes pour amadouer les actionnaires. Quand la supercherie est découverte, les procès s’accumulent et Oracle frôle la faillite au début des années 1990.

Larry Ellison met à nouveau sa firme dans le rouge en ratant le virage du cloud computing. Mais une nouvelle fois, "Billion dollars Larry" redresse la barre pour faire d'Oracle un mastodonte de la tech.

Déjà deuxième fortune mondiale à la fin des années 2000, le rival de Bill Gates n'est pas du genre économe. Il dépense sans compter pour assouvir ses passions. Grand amateur d'art nippon, il signe un chèque de 200 millions de dollars pour faire construire une villa dans le style médiéval japonais à Palo Alto en 2001. Dans les années qui suivent, il fait l'acquisition d'une douzaine de propriétés à Malibu. En 2012, il achète pour 300 millions de dollars la sixième plus grande île d'Hawaï, Lanai, où il reçoit le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, dont il est proche.

Réputé pour sa vie personnelle tumultueuse avec cinq mariages à son actif, ce playboy au bronzage impeccable affiche un train de vie princier multipliant les virées en yacht, en voitures de luxe et en jet privé. Titulaire d'une licence de pilote, il possède plusieurs avions, dont deux aéronefs militaires.

Mais c'est surtout par ses talents de navigateur que Larry Ellison se distingue. Marin accompli, il remporte notamment avec son maxi-yacht Sayonara, la tragique édition 1998 de la course Sydney - Hobart, au cours de laquelle six marins sont emportés par une tempête. Propriétaire de l'Oracle Team USA, double vainqueur de la Coupe de l'America, il a cofondé SailGP, une ligue de courses de catamarans à grande vitesse qui organise des compétitions dans le monde entier. Larry Ellison touche également au tennis. En 2009, il fait l'acquisition du tournoi d'Indian Wells et investit massivement pour en faire l'une des enceintes les plus emblématiques de ce sport.

Un fidèle de Donald Trump

Ces dernières années, Larry Ellison se diversifie dans le divertissement et les médias en finançant les opérations de son fils David, patron de Paramount, dont la fusion avec sa firme Skydance est effective depuis août. "Un deal" qui pourrait avoir coûté sa place à l'animateur Stephen Colbert du Late Show, diffusé sur CBS, propriété de Paramount, et réputé pour son ton irrévérencieux vis-à-vis de Donald Trump.

Contrairement à Elon Musk qui, avant sa "bromance" avec le président américain, effectuait des dons aussi bien aux démocrates qu'aux républicains, Larry Ellison est un donateur historique du Grand Old Party. Le fondateur d'Oracle et PDG jusqu'en 2014, entretient des liens étroits avec Donald Trump. En 2016, il organise notamment une levée de fonds pour soutenir la candidature du milliardaire dans l'une de ses somptueuses villas californiennes. Selon le Washington Post, il participe aussi en 2020 à une conférence téléphonique avec des proches de Donald Trump destinée à élaborer une stratégie visant à contester l’élection de Joe Biden.

Pendant la dernière campagne présidentielle, Oracle se met une nouvelle fois au service du trumpisme. L'entreprise élabore une base de données de 20 000 profils républicains destinés à former la nouvelle administration aux ordres, promue par la Heritage Foundation, cercle de réflexion ultraconservateur dont le "Project 2025" constitue la feuille de route du deuxième mandat de Donald Trump.

Depuis, tous les signaux sont au vert entre les deux hommes. Le nouveau locataire de la Maison Blanche a fait d'Oracle l'un des favoris pour le rachat des activités américaines de TikTok, sous la menace d'une interdiction sur le sol américain. L'entreprise fondée par Larry Ellison est aussi au cœur du projet Stargate, colossal programme d’infrastructures de 500 milliards de dollars qui doit faire des États-Unis, le numéro 1 incontesté de l’intelligence artificielle. À 81 ans, "Billion dollars Larry", est définitivement revenu au centre du jeu.