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Les enfants, victimes silencieuses du mal-logement

En France, 600 000 enfants vivent dans un logement insalubre ou trop petit. Une situation qui s'est encore aggravée en 2009, déplore le 15e rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre sur le mal-logement publié aujourd'hui.

Les enfants sont les victimes silencieuses de la crise du logement. Selon le 15e rapport annuel sur le mal-logement en France rendu public aujourd'hui par la Fondation Abbé Pierre, quelque 600 000 d'entre eux ne sont pas hébergés dans des conditions décentes.

Si les familles ou parents isolés vivent rarement dans la rue avec leur progéniture, l'association précise que leurs enfants "circulent entre les squats, les abris de fortune et les structures d’hébergement d’urgence ou, souvent, recourent à l’hébergement chez un tiers".

En 2004, le rapport du Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (Cerc) soulignait déjà qu’un million d’enfants vivaient sous le seuil de pauvreté dans l'Hexagone. Le rapport de la Fondation Abbé Pierre entre, lui, dans le détail : 18 000 mineurs sont sans domicile fixe (SDF), 2 000 vivent dans des habitats de fortune (cabane ou habitat provisoire), les autres vivant chez un tiers, à l'hôtel ou dans un logement insalubre.  

Seule avec 4 enfants dans un hôtel de Corbeil-Essonnes

Les conséquences du mal-logement sur la vie des mineurs sont lourdes : échec scolaire, intimité inexistante, vie sociale réduite, sans parler des effets néfastes d'un appartement insalubre sur la santé (saturnisme, affections respiratoires, mauvaise alimentation, trouble du sommeil, etc.).

La Fondation Abbé Pierre prend l'exemple de madame S., qui vit seule avec ses quatre enfants âgés de 1 à 10 ans dans un hôtel de Corbeil-Essones depuis le mois de juillet 2008. Travailleuse intermittente, son salaire n’excède pas 600 euros par mois. Seules quelques allocations complètent ses revenus.

"L’hôtel, c’est vraiment difficile [...]. Mes enfants sont toujours en retard à l’école. Ils sont trop fatigués. Ils ne peuvent pas faire leurs devoirs à la maison", raconte-t-elle.

Mal-logés, souvent dans des appartements surpeuplés, les mineurs n’ont d’autres choix que de faire leurs devoirs - quand ils les font - dans la voiture, les escaliers de l’immeuble ou des lieux de vie commune bruyants.  

 "La grande surprise de cette analyse est que, non seulement, le mal-logement produit des conditions de vie insupportables pour les enfants mais que, en plus, cela peut durablement pénaliser leur parcours. Il s'agit donc d'une question sociale majeure", explique Christophe Robert, directeur d'études à la Fondation Abbé Pierre, au micro de la radio France Info.

Les pouvoirs publics "aveugles" et "indifférents"

La crise du logement s’est accentuée en 2009, sous l'effet de la crise économique et financière. Si près de 10 millions de personnes l'ont subie de plein fouet, ils sont 3,5 millions à être mal logés en France, d’après la Fondation Abbé Pierre.

Ralentissement des constructions, contraction du marché immobilier, augmentation des loyers et stagnation du pouvoir d’achat : les raisons de cette précarisation de l’habitat en France sont nombreuses.

Face à cette situation, la Fondation Abbé Pierre fustige le manque d'initiative des pouvoirs publics. Malgré l’inscription d’un programme de construction et d'acquisition de 100 000 logements sociaux supplémentaires en 2009 et 2010 dans le Plan de relance lancé en décembre 2008, les mesures prises par le gouvernement sont insuffisantes, déplore-t-elle.

"La politique menée par les autorités reste non seulement aveugle aux besoins sociaux mais elle est aussi indifférente aux souffrances de ceux qui ne peuvent accéder à un logement ou s’y maintenir dans des conditions dignes", souligne le rapport. Un tableau qui risque de se noircir encore avec le million de chômeurs qui verront leurs droits s'arrêter cette année...

Pour consulter le rapport mal-logement 2010 de la Fondation Abbé Pierre dans son intégralité, cliquez ici.