L'Euro-2024 s'offre une demi-finale indécise mercredi 10 avril (21 h) entre des Pays-Bas d'attaque, attirés par l'ivresse de sommets rarement fréquentés, et une équipe d'Angleterre passée de favorite à funambule, perchée en permanence sur un fil au-dessus du vide.
L'affiche à Dortmund aurait dû placer les Anglais, vice-champions d'Europe à l'effectif serti de pépites, en vainqueurs désignés. Ce ne sera pas le cas, tant les "Oranje" apparaissent revitalisés face à des "Three Lions" aux griffes élimées.
"L'Angleterre défie la logique du football - il n'est pas normal de jouer aussi mal et de continuer à gagner", a fustigé l'ex-international Jamie Carragher, après la qualification, auprès du Daily Telegraph.
En Allemagne, l'équipe du capitaine Harry Kane n'a gagné qu'une seule fois dans les 90 minutes imparties, contre la Serbie (1-0) en ouverture du premier tour. Ont suivi deux matches nuls face au Danemark (1-1) et la Slovénie (0-0), un huitième de finale contre la Slovaquie (2-1 ap) sauvé dans le temps additionnel puis la prolongation, et un quart arraché aux tirs au but devant la Suisse (1-1, 5-3 tab).
L'Angleterre a ronronné, entre prudence et incapacité à accélérer, et elle a peiné à concrétiser sa menace offensive, redoutable sur le papier mais inefficace en réalité: dans les matches à élimination directe, elle a réussi cinq tirs cadrés en 240 minutes.
Des Anglais en progrès ?
Malgré cela, la sélection de Gareth Southgate s'est hissée dans le dernier carré d'une compétition majeure pour la troisième fois en quatre tentatives, après le Mondial-2018 (défaite contre la Croatie) et l'Euro-2021 (victoire contre le Danemark). La finale du 14 juillet à Berlin est à portée de tirs et le groupe y croit, dopé par sa résilience et sa solidarité.
Après le premier tour, "nous avons montré une meilleure version de nous-mêmes avec le ballon, plus libres", a assuré Southgate. "J'ai eu l'impression que le groupe avait changé et que l'on se trouvait à un moment du tournoi où l'on se demandait 'qu'est-ce qui est possible, réalisable ?', plutôt que ce qui pouvait mal tourner".
Les Pays-Bas ont cultivé leur espoir de manière différente. Passé un premier tour sans éclat (une victoire, un nul, une défaite), ils ont mis le turbo contre la Roumanie (3-0) et renversé la Turquie (2-1). L'impression laissée est celle d'une montée en puissance au fil du tournoi et d'une facilité à se procurer des occasions, deux atouts que les Anglais n'ont pas dans leur manche.
Le sélectionneur Ronald Koeman dispose notamment de deux accélérateurs de particules avec Memphis Depay et Cody Gakpo, une doublette d'attaquants décisive sur les pelouses allemandes.
Vingt ans d'attente
Positionné sur l'aile gauche, et non dans l'axe comme à Liverpool, Gakpo fait mal aux défenses adverses par ses qualités de percussion et de finition. Le joueur de 25 ans compte trois buts en cinq matches, ce qui fait de lui le co-meilleur artificier de l'Euro avant les demi-finales. Son total aura même été plus élevé sans un hors-jeu contre la Roumanie et un but contre-son-camp attribué au Turc Mert Müldür sous sa pression.
Gakpo n'est pas le seul "Anglais" de la bande : le gardien Bart Verbruggen (Brighton) et les défenseurs Virgil van Dijk (Liverpool), Nathan Aké (Manchester City), Micky van de Ven (Tottenham) évoluent tous en Premier League, considérée comme le championnat le plus relevé.
Les Pays-Bas pourront une nouvelle fois compter sur la vague de leurs supporters colorés pour faire tanguer l'Angleterre et atteindre la première finale d'un tournoi international depuis 2010 (défaite au Mondial en Afrique du sud).
En attendant, ils n'ont pas disputé une demi-finale depuis longtemps : dix ans en grande compétition (Mondial-2014), vingt ans à un Euro (2004). Après leur titre de champions d'Europe 1988, en Allemagne, les Néerlandais ont perdu les trois demi-finales disputées à un Euro (1992, 2000, 2004).
Avec AFP