C’est une piste d'atterrissage en terre battue, située sur une minuscule île, à 2 500 kilomètres des côtes chinoises. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle a joué un rôle essentiel, alors que la Chine était à ce moment alliée aux États-Unis, avec pour adversaire commun le Japon. Aujourd'hui, ce modeste aérodrome, immortalisé dans plusieurs livres et documentaires, ainsi que dans la mini-série de HBO "The Pacific", se trouve au centre d'une course aux armements moderne entre Washington et Pékin.
L'armée américaine a diffusé des images de la piste restaurée et de l'atterrissage d'un KC-130J.
.@PacificMarines aircraft land on a newly designated airstrip on the island of Peleliu, demonstrating the #USINDOPACOM #JointForce ability to adopt emerging concepts to support and defend the #FreeAndOpenIndoPacific.
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📍 #Palau
📸 LCpl Hannah Hollerud pic.twitter.com/f9VsOyZD79
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Accepter Gérer mes choixLes Palaos, une nation insulaire, est l'un des rares pays du Pacifique à reconnaître Taïwan. De quoi agacer la Chine qui considère Taïwan comme une province sécessionniste, d’autant que les Palaos entretiennent également des relations étroites avec les États-Unis.
Pour l'armée de l'air américaine, l'avion KC-130J est un atout logistique essentiel : il est capable de ravitailler des avions de chasse et des hélicoptères en vol, et de parcourir en un vol plus de 6 000 kilomètres. Peleliu pourrait donc devenir un centre de ravitaillement et de logistique important sur le théâtre du Pacifique.
En mars dernier, les États-Unis ont annoncé qu’ils accorderaient plus de 7 milliards de dollars (environ 6,5 milliards d’euros) d’aide pour les Palaos, la Micronésie et les Îles Marshall sur une période de 20 ans. Cet investissement permet non seulement aux États-Unis d'accéder à ces territoires, mais aussi aux citoyens palois de travailler et d'étudier aux États-Unis, de s'enrôler dans l'armée américaine et le cas échéant, de bénéficier des prestations de soins de santé des vétérans.
"La situation exige que Washington envoie un signal fort"
Zsuzsa Anna Ferenczy, professeur adjoint à l'université nationale Dong Hwa de Taïwan et ancienne conseillère politique auprès de l'Union européenne, explique la position stratégique des Palaos :
Je vis à Taïwan et d'après ce que je vois, l'inquiétude générale augmente parce que la Chine a renforcé sa présence militaire dans la mer de Chine méridionale. Par conséquent, les pays de la région réagissent à cette menace croissante.
Les États-Unis étant un acteur clé dans cette région, des pays comme le Vietnam, les Philippines, Taïwan, les Palaos et, dans une certaine mesure, la Corée du Sud ont renforcé leurs partenariats avec Washington. En outre, étant donné l'importance des routes navales pour l'économie internationale, nous devons comprendre ces actions américaines dans ce contexte. La situation exige que Washington envoie un signal fort indiquant que les provocations et les actions de la Chine auront des conséquences.
Peleliu n'est pas la seule base que les États-Unis cherchent à renforcer. En avril 2024, les États-Unis ont annoncé leur intention de reconstruire un aérodrome sur l'île de Tinian, qui fait partie du Commonwealth des îles Mariannes du Nord, un territoire américain situé au nord de Guam. Comme Peleliu, l'aérodrome de Tinian a été opérationnel pour la dernière fois pendant la Seconde Guerre mondiale.
Outre la restauration des bases américaines historiques dans la région, les États-Unis ont pris ces dernières années des mesures pour accroître leur accès aux bases militaires dans les pays alliés de la région, note Zsuzsa Anna Ferenczy :
Ces dernières années, les tensions entre Taïwan et la Chine se sont accrues, en grande partie à cause du refus de Pékin d'entamer un dialogue avec Taïwan. La Chine a intensifié la pression économique, politique et militaire sur Taïwan, envoyant un message clair sur sa position intransigeante sur la question. Mais il semble peu probable que la Chine bouleverse radicalement le statu quo par une guerre totale, optant plutôt pour une approche graduelle par le biais d'une guerre hybride, comprenant des tactiques cybernétiques et économiques, ainsi qu'une ingérence politique visant à saper la démocratie taïwanaise.
Malgré les pressions exercées par la Chine, des pays comme les Palaos ont choisi de s'aligner sur ceux qui recherchent la paix et la stabilité dans la région plutôt que sur Pékin, qui semble vouloir saper l'ordre existant. Néanmoins, Taïwan a perdu plusieurs alliés au profit de l'influence chinoise, ce qui met en évidence les allégeances complexes et changeantes dans cette compétition stratégique.
Les bases régionales dans le Pacifique ne sont pas le seul instrument sur lequel Washington a des vues. Selon des experts militaires, le Pentagone s'efforce d'accélérer le développement d'"essaims de drones" : ces escadrons de centaines, voire de milliers de drones doivent contribuer à tasser les velléités chinoise dans le Pacifique.