Au Canada, jamais les feux de forêt n’ont semblé aussi destructeurs. Quinze millions d’hectares, soit l'équivalent du quart de la France métropolitaine, ont d'ores et déjà été balayés par les flammes. Ici, le réchauffement climatique est deux à trois fois plus rapide que dans le reste du monde, alors, forcément, l’année la plus chaude jamais enregistrée sur le globe, 2023, a été dure. Pompiers, secouristes et habitants des localités à risque doivent apprendre à vivre avec un risque croissant d’incendies ravageurs. Reportage de nos correspondants, François Rihouay et Joanne Profeta.
Au Canada, plus de 8 000 départs de feu sont dénombrés chaque année, selon le ministère des Ressources naturelles. Le pays, grand comme vingt fois la France, abrite 347 millions d'hectares, soit près de 9 % de la superficie forestière mondiale. Les forêts sont principalement composées de conifères, tels le pin, le sapin et l'épinette, et d’une variété de feuillus. Entre ces surfaces hautement inflammables et le réchauffement climatique qui s’accélère, le cocktail est explosif.
Alors que la saison des feux de forêts a déjà commencé, nos reporters se sont rendus en Colombie-Britannique, dans l’ouest canadien. Une équipe des avions-citernes intervient d’ores et déjà sur une centaine de feux actifs. Le souvenir douloureux de l’été de 2023, "saison de l’enfer" au cours duquel huit pompiers ont perdu la vie, hante encore les esprits. Les équipes traquent notamment les redoutables "feux zombies", qui subsistent sous la neige pendant des mois.
Les conséquences économiques et humaines des incendies de forêts de l’été dernier continuent de se faire sentir. La reconstruction du village de Lytton, dévasté par les flammes en 2023, vient, par exemple, tout juste de commencer… Selon l’Union des assureurs du Canada, le coût total des catastrophes naturelles dépasse les trois milliards de dollars. Un million et demi de foyers ne peuvent déjà plus protéger leurs maisons et devront se tourner vers le gouvernement en cas d’accident, mettent en garde les assureurs. L'Institut canadien du climat prévoit que les dépenses liées au climat atteindront pas moins de 25 milliards de dollars canadiens d'ici 2025, réduisant ainsi la croissance économique du pays de moitié.
Pour Mathieu Bourdonnais, ancien pompier et professeur adjoint au Centre de recherche sur l’environnement à l’Université de Colombie-Britannique, la clé pour éviter de futures saisons de feux dévastatrices réside dans une collaboration renforcée entre les forces du feu et les populations autochtones, ainsi que dans des solutions basées sur la nature et l’adaptation des infrastructures.