
Jeux paralympiques, J-100. Alors que la préparation de l'événement planétaire handisport entre dans sa dernière ligne droite lundi 20 mai, le président du CIP, Andrew Parsons, a accordé un entretien à France 24.
Élu président du Comité international paralympique en septembre 2017, le Brésilien était à la tête du comité paralympique brésilien de 2009 et 2017. Fort d'une longue expérience, il se veut rassurant quant au succès des Jeux parisiens.
Andrew Parsons estime que la France est en voie de réussir son pari de faire des plus beaux Jeux paralympiques de l'Histoire. Il affirme également que Paris 2024 laissera un héritage durable en France en matière d'accessibilité et d'inclusion.
Où en sommes-nous à 100 jours des Jeux paralympiques ?
Nous sommes très satisfaits de l'état d'avancement en termes de planification opérationnelle. Nous avons beaucoup appris des événements-tests de l'année dernière.
Nous avons des accords de diffusion avec 164 pays. Et pour la première fois de l'Histoire des Jeux paralympiques, nous avons dû mettre en place des quotas de journalistes par pays. C'est une preuve du succès.
Nous sommes très optimistes. Les spectateurs seront de retour, ce qui créera une atmosphère de celle de Tokyo en 2021 et de Pékin en 2022. Et il y a le facteur Paris ! Les sites d'épreuves seront au cœur de la ville ce qui va créer une ambiance incroyable. Le cécifoot (le football pour aveugles, ndlr) face à la Tour Eiffel, le taekwondo au Grand Palais, l'équitation à Versailles… Les images diffusées dans le monde entier seront extraordinaires.
Sur le plan sportif, le niveau sera également élevé. Il ne cesse d'augmenter chaque année. Avec cette combinaison de facteurs, nous aurons de grands Jeux.
Les Jeux de Londres restent la référence historique. L'objectif de Paris est de faire mieux : est-ce un objectif toujours réaliste ?
Que veut dire "faire mieux" que Londres ? Pour nous, Londres a fait passer le mouvement paralympique dans une dimension supérieure. Douze ans plus tard, il faut que Paris permette un nouveau pas en avant.
Le but sera de générer le plus large impact à l'échelle mondiale. Nous voulons que non seulement, ce qui se passe sur les terrains de Paris change la vie des personnes handicapées en France et dans le monde mais aussi, que ça fasse avancer les droits de l'Homme.
L'un des indicateurs du succès populaire de ces jeux sera les ventes de billets. Pour le moment, seul un tiers seulement a été écoulé. Est-ce inquiétant ?
Nous avons tiré quelques leçons de Londres et de Rio. Nous comprenons désormais beaucoup mieux la courbe de vente des billets. À Londres, 1,3 million avait été vendu dans les trois derniers mois, 2 millions lors des huit dernières semaines pour Rio. Actuellement, nous sommes dans une courbe similaire à celle de Londres. Je reste confiant que nous arriverons à vendre tous les billets avant la cérémonie d'ouverture.
Nous pensons que l'un des aspects positifs des billets pour les Jeux Paralympiques est leur prix. Pour chaque sport, vous pouvez trouver des billets à 15 € ou moins. L'idée n'est pas seulement d'avoir des billets abordables et de les vendre mais aussi de permettre aux gens et d'amener leurs familles. Les Jeux paralympiques sont une bonne occasion d'éduquer les gens sur les problèmes des personnes avec handicap.
Est-ce que le succès des JO dépend du succès des Jeux paralympiques ?
L'expérience a montré que les Jeux olympiques peuvent booster les Jeux paralympiques.
Quand des JO se déroulent bien, les gens sont mieux informés sur les Jeux paralympiques. Et certains ont envie d'acheter des tickets pour que l'euphorie des JO dure encore un peu. Mais il faut aussi noter que les Paralympiques peuvent souffrir de la concurrence des JO. Les gens peuvent garder leur budget pour préférer des billets olympiques.
Pour Paris 2024, le choix a été fait d'unifier JO et Para avec les mêmes lieux, les mêmes médailles, le même logo, une seule équipe de France… Est-ce la voie à suivre pour l'inclusion et la visibilité des para-athlètes ?
Chaque édition des Jeux veut raconter sa propre histoire. Paris a adopté cette approche qui correspond très bien à la façon dont la France en tant que société et nation voit le monde.
Les Jeux olympiques et paralympiques de Paris seront les premiers à organiser la cérémonie d'ouverture en dehors d'un stade. Vous étiez sceptique au départ... ?
C'était une idée du comité d'organisation qui proposait une approche très audacieuse. En tant que CIP, nous étions sceptiques quant à l'organisation mais nous adorons le concept.
Accueillir la cérémonie d'ouverture sur l'avenue la plus célèbre du monde et sur la place de la Concorde, c'est comme si la ville de Paris accueillait les athlètes paralympiques en son cœur pour embrasser la diversité et le handicap. Le symbole est incroyable. Cela va rendre les athlètes paralympiques très proches des Parisiens.
Il y a aujourd'hui des doutes sur la faisabilité de la cérémonie d'ouverture le long de la Seine. On parle de plan B et de plan C. Qu'en est-il de celle des Jeux paralympiques ?
Je ne suis pas un expert en sécurité mais les autorités françaises ont de l'expérience pour sécuriser le périmètre des Champs-Élysées et de la Concorde. L'arrivée du Tour de France s'y déroule depuis des lustres. Il y avait une grande fan-zone à la Concorde pour la Coupe du monde de rugby.
Il faut aussi noter que les JO ont lieu avant les Paralympiques. Donc il est logique que l'attention soit portée sur eux. La cérémonie d'ouverture de nos Jeux aura lieu un mois et deux jours après. Des enseignements seront tirés. Nous voulons tous que la cérémonie d'ouverture soit la plus sûre possible.
Cette olympiade est marquée par le déclenchement de deux conflits majeurs : l'invasion de l'Ukraine par la Russie et la guerre entre Israël et le Hamas à Gaza. Comment le premier conflit a-t-il abouti à l'exclusion de la Russie et de la Biélorussie ?
En tant qu'organisation, nous avons été affectés dès le début du conflit survenu entre le début des Jeux olympiques d'hiver de Pékin et celui des Jeux paralympiques. La décision d'exclure les athlètes a été prise immédiatement.
En septembre 2023, l'Assemblée générale du CIP a pris la décision d'exclure les deux comités olympiques de Paris 2024 tout en autorisant les sportifs à concourir sous drapeau neutre, à condition qu'ils n'aient pas soutenu l'invasion. Une agence indépendante vérifie les antécédents des athlètes. Nous annoncerons bientôt la liste des athlètes autorisés à concourir.
Comment expliquer qu'un processus différent ait été retenu concernant la guerre à Gaza ?
Le Comité paralympique russe et le Comité paralympique biélorusse utilisent le mouvement paralympique pour promouvoir l'invasion de l'Ukraine. Ce n'est pas autorisé par notre Constitution.
Le cas des comités israéliens et palestiniens est différent. Aucun n'est allé à l'encontre de notre règlement en faisant la promotion de la guerre. Un pays ou un comité paralympique national n'est pas suspendu automatiquement parce que son pays est en guerre. Donc pour le moment, la situation reste différente selon notre comité.