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Dette de la France : les agences de notation vont rendre leur verdict
Moody's et Fitch doivent se prononcer, vendredi, sur la note de la dette souveraine de la France. L'agence de notation S&P se prononcera à son tour le 31 mai. Ces évaluations interviennent après que Bercy a revu à la hausse ses prévisions de déficit pour 2024.

Les notations de la France par les agences reprennent vendredi 26 avril, avec celles de Moody's et Fitch, avant S&P fin mai. 

Ces évaluations arrivent après une série de mauvaises nouvelles budgétaires depuis février : abaissement de 1,4 % à 1 % de la croissance attendue cette année, nécessité de 10 milliards d'euros d'économies immédiates, avant 20 milliards – au lieu de 12 initialement annoncés – en 2025.

L'Institut national de la statistique (Insee) a aussi annoncé fin mars que le déficit public (toutes administrations confondues) avait été de 5,5 % du PIB en 2023 au lieu de 4,9 % espérés, en raison de mauvaises recettes principalement. Bercy a reconnu qu'il serait encore de 5,1 % cette année, au lieu de 4,4 %, d'où une deuxième vague de 10 milliards d'euros d'efforts à réaliser en 2024.

Malgré leurs critiques récurrentes, les agences ont fait preuve d'une certaine "magnanimité" envers la France ces dernières années, en lui conservant des notes parmi les meilleures du monde, remarque Éric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of management.

La dette française est en effet "très liquide", et les agences de notation "apprécient la solidité des banques françaises, (...) la forte diversification de la production du pays et, avance-t-il, l'ampleur des patrimoines et revenus privés qui peuvent être potentiellement taxés en cas de problème de financement". "Mais le risque est que ces arguments deviennent insuffisants pour éviter une dégradation", prévient-il.

Les agences s'inquiètent particulièrement du montant de la dette, qui dépasse les 3 000 milliards d'euros. Selon Bercy, elle a atteint 110,6 % du PIB en 2023, sera à 112,3 % cette année, et toujours à 112 % en 2027.

Le montant annuel des remboursements est énorme, et devrait passer de 46,3 milliards d'euros en 2024 à 72,3 milliards en 2027, hausse due au refinancement d'anciennes "souches" de dette à faibles taux d'intérêt par d'autres à taux plus élevés.

Crainte d'une baisse de la note ou d'un signal négatif des agences

L'an dernier, l'agence de notation Fitch était passée à l'action la première, abaissant d'un cran la note de la France à AA-, avec perspective "stable".

Ce mois-ci, elle a jugé "peu ambitieux et de plus en plus hors de portée" les objectifs de réduction du déficit avancés par le gouvernement, mais a indiqué qu'elle n'abaisserait pas de nouveau la note, sauf "improbable" nouvelle aggravation importante de la dette.

Moody's, qui place la France à Aa2 – un cran au-dessus de Fitch – avec perspective "stable", juge peu crédible, comme Fitch, comme le FMI ou encore comme le Haut Conseil des Finances publiques (HCPF), l'hypothèse d'un redressement du déficit public sous les 3 % du PIB en 2027, annoncé par le gouvernement pour se conformer aux obligations de Bruxelles.

Abaissera-t-elle sa note vendredi, ou assortira-t-elle la note actuelle d'une perspective "négative" ? Moody's a déjà souligné fin mars "les risques" liés à "des hypothèses économiques et de recettes optimistes, ainsi que des baisses sans précédent de la dépense".

"Je maintiens notre ambition de revenir sous 3 % de déficit en 2027", a pour sa part déclaré le ministre des Finances Bruno Le Maire la semaine dernière, en marge des réunions du FMI et de la Banque mondiale à Washington.

Lui qui échange régulièrement avec les agences doit encore convaincre les analystes de S&P du sérieux de la France. La plus regardée des agences se prononcera à son tour le 31 mai. Si elle voulait donner un signal négatif, il lui faudrait directement abaisser son AA, équivalant du Aa2 de Moody's, car sa perspective est déjà "négative" : un mauvais signal à neuf jours des élections européennes.

Avec AFP