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Publié le : 21/12/2023 - 08:37

A la Une de la presse ce jeudi, la grande explication d'Emmanuel Macron, qui tente d'éteindre la crise et assume sa loi immigration, qui a vu sa majorité se fracturer. Un thème qui s'impose aussi à la Une de la presse européenne après l'accord des 27 pour réformer la politique migratoire européenne. Enfin, le limogeage de la direction de la télévision publique polonaise signe la fin de l'ère du parti Droit et Justice.

La presse française titre et passe au crible ce matin la grande explication d’Emmanuel Macron qui s’est livré au service après-vente de sa loi immigration mercredi soir sur le plateau de l’émission de C à vous. "Le grand déni", titre Libération, pour qui Emmanuel Macron et Elisabeth Borne "jouent l’air du tout va bien (…) malgré les cris de victoire du Rassemblement national, la démission du ministre de la Santé et les critiques de son propre camp". Le journal de gauche s’indigne et estime que "le chef de l’Etat pousse l’audace jusqu’à y voir une défaite pour le Rassemblement national".

Pour le Figaro, cette longue séance d’explication se destinait en réalité à "rassurer sa gauche" après que la loi immigration a vu sa majorité se fracturer. Sans concession, l’édito d’Yves Thréard assène : "Le roi est nu" car "faute de cap précis, Emmanuel Macron a donc inventé une nouvelle forme de cohabitation, une espèce de cohabitation intérieure, interne à sa majorité". L’éditorialiste de s’interroger : "Pourra-t-il même échapper à une vraie cohabitation d’ici à la fin de son mandat?" Un président qui "assume et ne lâche rien (…) et qui revendique le "et en même temps" au cœur de sa loi". Dans son dessin du jour, KAK dans l'Opinion  prolonge l’interview d’Emmanuel Macron : "Cette loi, c’est comme un vaccin, on injecte une petite quantité d’extrême droite pour éviter de choper la maladie".

Vu d'Espagne, la Vanguardia estime qu’Emmanuel Macron sort plus affaibli de cette séquence avec une loi immigration "bénie par Le Pen" et avec l’aile gauche de son parti qui se rebelle. Quant à la presse suisse, Le Temps s’interroge dans l’edito : "La France ne serait donc plus un régime présidentiel (…) mais un régime parlementaire comme la plupart de ses voisins ?". Dans un pays où l’on souligne régulièrement l’usage vertical du pouvoir avec un pouvoir présidentiel qui dicte l’agenda législatif sans grande ouverture à la négociation, "c’est finalement à des habitudes très parlementaristes auxquelles on assiste ces derniers jours (…). C’est le Parlement qui fait désormais la loi".

L’immigration est aussi plus largement à la Une de la presse européenne, après l’adoption de la réforme de la politique migratoire européenne par les 27. C’est une "Europe qui se referme" déplore le Der Tagesspiegel. Le quotidien allemand estime que le texte perçu comme une percée pour certains est pour d’autres une génuflexion devant les populistes de droite. L’Union européenne se voulait pourtant "un havre de liberté ouverte aux hommes quelques soit leur apparence ou leur religion", regrette ce journal.  Même les personnes qui fuient les guerres pourront à l'avenir être expulsées si elles passent par un pays tiers considéré comme sûr. Le journal regrette par ailleurs que l’Europe n’ait pas réussi à réintroduire une mission de sauvetage en mer, "la mort en Méditerranée devrait se poursuivre même après cette réforme". Un pacte migratoire qualifié "d’historique" par le journal espagnol El Pais. L’Espagne étant en première ligne face à l’arrivée de migrants subsahariens notamment dans les Canaries, le journal se félicite qu’il y ait pour la première fois des quotas d’accueil obligatoire de migrants pour chaque Etat membre, la démonstration d’une vraie solidarité européenne. Enfin, le Guardian met l’accent sur le sort des migrants. Selon le journal britannique , les Etats membres sont parvenus à un accord "qui va créer un système cruel", selon les associations de défense des droits de l’homme. Dans un communiqué un collectif de 15 ONG estime que l'accord "causera plus de morts en mer". "Cet accord est un échec historique et un hommage aux partis de droite européens".

La presse commente également la décision du nouveau gouvernement de Donald Tusk en Pologne de licencier les dirigeants des médias d’Etat et notamment de la première chaine publique. Le tabloïd Fakt parle de la façon dont Tusk secoue "TVP". Au cours des huit dernières années, la chaîne était devenue un organe de l'ancien gouvernement du parti de droite Droit et Justice. Hier soir, pour la première fois en huit ans, il n'y a pas eu de journal télévisé sur la chaîne publique. La Gazeta Wyborcza publie la photo d’un nouveau présentateur apparu mercredi soir pour déclarer que de nouvelles émissions seraient diffusées dès jeudi, promettant qu'il s'agirait d'une "eau limpide" et non d'une "soupe de propagande". Mais le parti Droit et Justice n’a pas forcément dit son dernier mot. Le New York Times revient sur ce rassemblement du leader du parti et d'autres politiciens devant le siège de la télévision polonaise pour tenter d'empêcher la nouvelle direction de prendre ses fonctions. Le journal américain estime qu'il s'agit d'un "possible signe avant-coureur des batailles à venir", alors que le parti Droit et Justice tente de maintenir son emprise sur les institutions de l'État. Le journal rappelle que les tribunaux ont également été remplis de partisans inconditionnels du parti Droit et Justice.