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Syrie : la difficile reconstruction de Raqqa
Publié le : 03/11/2023 - 12:08

Raqqa est le symbole du destin tragique de la Syrie de ces douze dernières années. Dès le début de la révolution contre Bachar al-Assad en 2011, cette ville du nord de la Syrie a été l’une des principales cibles des groupes rebelles. Elle est ensuite devenue le fief de l’organisation État islamique, qui a fait de Raqqa la capitale de son califat autoproclamé. La ville a alors vécu trois années en enfer – entre exactions, pendaisons publiques ou encore ventes d’esclaves –, avant d’être bombardée, puis libérée en 2017 par la coalition internationale menée par l’armée américaine. Depuis, la "perle de l’Euphrate" n’en finit pas de panser ses blessures, tandis que la vie reprend difficilement son cours.

À Raqqa, au nord de la Syrie, six ans après la libération de la ville par la coalition internationale menée par l’armée américaine et les kurdes YPG, les infrastructures essentielles ont été reconstruites et la vie a doucement repris son cours. Mais d’énormes problèmes persistent : crainte des attentats islamistes, tensions entre populations kurdes et arabes... sur fond de hausse des prix du pétrole, de pénurie d’eau ou encore d’urgence alimentaire. Certains habitants préfèrent d'ailleurs quitter la ville.

Le Conseil civil de Raqqa, fondé à l’été 2017, a pour but de s’occuper de la gestion et de la reconstruction de la ville. Le projet initial avait belle allure, attribuant des postes politiques de manière équitable aux tribus arabes et aux Kurdes, et partageant de manière égale les sièges entre les femmes et les hommes. Un modèle qui se voulait rayonnant pour toute la région.

Mais la loi César, adoptée par le Congrès américain en 2020 – ce nouvel arsenal de sanctions dirigées contre le pouvoir syrien –, a mis une pression financière sur tout le pays. Elle pose notamment d’immenses difficultés sur les importations, qui pourraient pourtant aider à reconstruire la ville. Les chantiers et les projets sociaux sont au ralenti et seulement 50 % de la ville a aujourd’hui été reconstruite.

Conséquence : la livre syrienne a dévissé et l’urgence économique concerne à présent tout le monde, jusqu’aux enfants qui doivent travailler dans les chantiers plutôt qu'aller à l’école. Les salaires ont plongé, la colère gronde au sein de la population et le tissu social s’effrite.

Pour ceux qui ont encore eu moins de chance, comme les déplacés de Deir Ezzor vivants dans le camp informel de Salhat Elbanat, il s’agit littéralement de survivre au milieu de la grande décharge de Raqqa. Une extrême pauvreté qui risque de laisser le champ libre aux radicaux de l’organisation État islamique, qui restent présents dans le pays.

Nous sommes allés à la rencontre de ces différents Raqqaouis – jusqu’aux plus démunis –, pour tenter de comprendre ce que sera le futur de cette ville ancestrale, qui a toujours été stratégique pour la Syrie, mais peine à se relever.