
Sous la férule de l’emblématique sélectionneur français Patrice Lagisquet, l'équipe du Portugal participera, pour la deuxième fois de son histoire, au plus grand événement rugbystique de la planète. L'occasion de mettre un coup de projecteur sur ce sport dans un pays où le rugby reste quasi-amateur.
Deux jours avant le début de la Coupe du monde de football au Qatar, le 20 novembre 2022, la prouesse des rugbymen du Portugal a eu du mal à se faire place en une des trois quotidiens sportifs locaux. Le journal Record s'est ainsi contenté le lendemain d'un discret "Les Loups reviennent dans le Mondial de rugby" relégué en bas de sa première page. L'information n'avait pourtant rien d'anodin puisque 16 ans après leur première participation à une Coupe du monde de rugby, ils venaient de nouveau de décrocher leur billet pour cette compétition qui se déroulera du 8 septembre au 28 octobre en France.
Les "Lobos" avaient remporté la veille à Dubaï un tournoi qualificatif réunissant quatre équipes (États-Unis, Kenya, Hong Kong et Portugal) au terme duquel était attribuée la vingtième et dernière place du Mondial-2023. Une compétition que les Portugais ont gagnée à la différence de points marqués, après un dernier match nul contre les États-Unis (16-16) arraché au-delà du temps réglementaire sur un coup de pied de pénalité.
The kick that sends @PortugalRugby to France 🤩#RWC2023 pic.twitter.com/HWs8UHjMDb
— Rugby World Cup (@rugbyworldcup) November 18, 2022Cette égalisation cruciale a été l'œuvre de Samuel Marques, demi-de-mêlée du Portugal. Âgé de 34 ans, il a connu ses premières sélections sous le maillot du Portugal en 2012, rejoignant alors de nombreux joueurs nés en France de parents de nationalité portugaise. "C'était une opportunité unique pour connaître le niveau international et découvrir une autre culture", explique ce joueur de l'US Carcassonne, qui s'apprête à vivre un "grand moment de plaisir" lors de la prochaine Coupe du monde.
Samuel Marques savoure d'autant plus cette qualification qu'il avait choisi de se mettre à l'écart de la sélection portugaise pendant huit ans, privilégiant sa carrière en club. Son retour en 2021 s'explique par la présence à la tête des Lobos d'une grande figure du rugby français, Patrice Lagisquet. "Il a contribué à ce que la sélection portugaise se professionnalise. Son arrivée a tout changé", assène Samuel Marques.
Une génération prometteuse
L'ancien joueur du XV de France, qui compte 46 sélections chez les Bleus et a notamment disputé la première finale de Coupe du monde en 1987, a lui-même proposé ses services à la Fédération portugaise à l'été 2019. Il a mis en avant son expérience d'entraîneur du Biarritz olympique - avec trois titres de champion de France à la clef – et celle acquise au sein de l'encadrement des Bleus lors de la Coupe du monde 2015. "J'avais envie d'être le sélectionneur d'une équipe nationale et je me suis dit que ce poste était compatible avec mes activités professionnelles et associatives", explique Patrice Lagisquet, qui ne possédait pas de liens particuliers avec le Portugal et qui utilise souvent l'anglais pour communiquer avec le groupe.
Il a attaqué cette mission avec un staff composé d'entraîneurs français et de techniciens portugais en charge de la sélection locale des moins de 20 ans. "Il y avait une génération de joueurs très talentueux et on savait qu'il y avait du potentiel", explique Patrice Lagisquet, en mentionnant la pépite Rodrigo Marta. À seulement 23 ans, cet ailier licencié à l'US Dax possède déjà le record d'essais marqués sous le maillot portugais. Il est également passé par l'équipe nationale de rugby à 7 et la franchise des Lusitanos, qui évolue en Rugby Europe Super Cup, une compétition créée pour apporter un cadre professionnel et international aux petites nations d'Europe.
Congratulations to Rodrigo Marta who became the leading try scorer in the history of Portuguese rugby at the age of just 23! pic.twitter.com/ZFq39RL1Je
— Rugby Europe (@rugby_europe) February 14, 2023Patrice Lagisquet, âgé de 60 ans, se réjouit de pouvoir s'appuyer sur "la vitesse et la créativité" des trois-quarts portugais qu'il combine avec l'expérience de joueurs évoluant depuis de longues années dans le rugby professionnel français. C'est notamment le cas au sein du paquet d'avants, avec le talonneur Mike Tadjer ou le deuxième-ligne Steevy Cerqueira. "On a bien progressé sur le plan de la puissance. On l'a vu en contre la Géorgie, on a su tenir une mi-temps", analyse le sélectionneur des Lobos.
Les retrouvailles avec la Géorgie
La rencontre à laquelle fait allusion Lagisquet était la finale du "Tournoi des 6 nations B", dont le nom officiel est le Rugby Europe Championship, une sorte de deuxième division du rugby européen. Mené d'un seul point à la mi-temps (11-12), le Portugal avait craqué lors de la deuxième période de cette rencontre disputée le 19 mars et s'est incliné 11 à 38 contre la redoutable Géorgie, qui a ainsi signé son sixième sacre consécutif dans cette compétition.
Ces deux équipes s'affronteront de nouveau lors de la Coupe du monde de rugby 2023, en phase de poule. Actuellement classé à la 16e position mondiale, le Portugal jouera tout d’abord contre le pays de Galles (9), la Géorgie (11e), l'Australie (7e) et enfin les Fidji (13e). Le défi s'annonce très relevé pour le Portugal, qui avait connu 4 défaites lors de l'édition 2007, dont une très large face à la Nouvelle-Zélande (108-13). Il ne s’était par contre incliné que de 4 points face à la Roumanie (10-14) "Nous voulons proposer un beau rugby. Cette équipe a beaucoup à apprendre et les jeunes joueurs vont acquérir une précieuse expérience", estime Patrice Lagisquet.
🏉 #RencontresàXV | Patrice Lagisquet a remporté deux fois le Tournoi des Six Nations comme joueur puis a connu le XV de France en tant qu'entraîneur adjoint.
🇵🇹 Son aventure s'écrit aujourd'hui à la tête de la sélection du Portugal, qu'il a qualifiée pour la Coupe du Monde. pic.twitter.com/2ZafV820MP
Contrairement aux autres nations participantes, l'équipe du Portugal a disposé d'une phase de planification plus courte puisqu'elle a été la dernière à se qualifier pour la Coupe du monde. Elle peine du coup à trouver des adversaires chevronnés disponibles pour des matchs amicaux cet été. Sa préparation durera cependant aussi longtemps que celle des autres sélections en lice, avec notamment un stage de 15 jours à Font-Romeu, dans les Pyrénées françaises.
Les déplacements de la sélection portugaise, qui jouera à Nice, Toulouse (2 fois) et Saint-Étienne, devraient donner lieu à de belles scènes de liesse en raison de l'importance de la communauté portugaise en France. Le temps d'un Mondial, l'équipe nationale de rugby va tenter de la convertir au ballon ovale. Et la Fédération portugaise de rugby espère bien tirer profit des prestations de la sélection emmenée par le capitaine Tomas Appleton pour aider le rugby à prendre son envol au Portugal.
La Coupe du monde 2023, qui se déroulera du 8 septembre au 28 octobre dans dix villes françaises, verra 20 sélections réparties en quatre groupes se disputer le titre mondial. France 24 vous propose, d’ici le coup d’envoi de cet événement sportif majeur, une série d’articles sur les équipes en lice. Avec une publication le "XV" de chaque mois.
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