
Les Roumains commémorent les 20 ans de la révolution qui a mis fin au régime communiste de Nicolae Ceausescu. Le deuil est difficile car des zones d’ombre demeurent, notamment sur l’exécution du dictateur et de son épouse.
Vingt ans après la chute du régime communiste, le général Dan Voinea retourne dans la caserne militaire de Tirgoviste, à cent kilomètres de Bucarest. C’est ici qu’il a joué le rôle du procureur dans un procès qui allait bouleverser un pays entier. La chute du régime communiste est encore très présente à son esprit.
Le 22 décembre 1989 Nicolae Ceausescu tient son dernier discours. Devant la foule en colère qui n’hésite pas de le huer le dictateur prend la fuite en hélicoptère. Il allait être arrêté quelques heures plus tard et exécuté après un procès expéditif qui a choqué tout le monde.
Vingt ans après, de retour sur les lieux de l’exécution, le procureur militaire Dan Voinea dévoile la parodie qui s’est jouée dans les coulisses du procès. « Ceux qui ont récupéré le pouvoir en Roumanie à l’époque ont décidé au siège du ministère de la Défense qu’il fallait exécuter les Ceausescu tout de suite après le procès, affirme-t-il. Pour ma part je n’avais pas été mis au courant ce jour-là. »
Le procès expéditif des Ceausescu n’était que le début du drame. Les combats ont continué dans les rues de Bucarest après l’exécution du dictateur. Le deuxième échelon du Parti communiste avait récupéré le pouvoir et donné l’ordre à l’armée de tirer pour défendre une soi-disant révolution. Les tirs chaotiques ont fait plus de 800 victimes après l’exécution de Ceausescu. Aussitôt après ces événements troubles le général Dan Voinea a été officiellement chargé d’enquêter sur ces crimes oubliés. Mais son élan a été coupé à la fin de l’année dernière lorsque son enquête s’était approchée des hauts dignitaires de l’époque. Le général qui dérangeait trop fut mis à la retraite. « En Roumanie le régime communiste est tombé mais les communistes sont toujours là, déclare-t-il. On les retrouve partout dans tout l’appareil administratif de ce pays. »
Pendant vingt ans la Roumanie n’a pas eu la volonté politique pour résoudre les zones d’ombre d’une révolution ratée. Personne n’a osé désigner les coupables des victimes innocentes tuées par des balles perdues en décembre 1989. Eugenia Duta se promène toujours avec la photo de son mari sur elle. Il étai parti au travail mais elle allait le retrouver une semaine plus tard à la morgue de Bucarest. « La mère de mon mari est morte sans savoir qui a tué son enfant, témoigne-t-elle. Comment décrire la douleur d’une mère dont on a tué l’enfant innocent sans rien lui dire pendant vingt ans ? » Vingt ans après, le procureur du procès Ceausescu accuse. « C’est l’équipe qui est arrivé au pouvoir le 22 décembre 1989 qui est responsable », s’insurge le général. Les Roumains espèrent tourner la page du passé mais ils ont encore du chemin à faire.
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