
La Première ministre a présenté mardi la réforme des retraites voulue par Emmanuel Macron pour "préserver" le système par répartition. Le gouvernement a notamment annoncé le relèvement progressif de l'âge légal de départ à 64 ans au lieu de 62 ans actuellement, ainsi que la fin des principaux régimes spéciaux. Les organisations syndicales appellent à une première journée de mobilisation contre la réforme le 19 janvier.
La Première ministre, Élisabeth Borne, a dévoilé mardi 10 janvier le projet de réforme gouvernemental du système de retraites français dont la mesure phare est le recul progressif de l'âge légal de départ de 62 ans à 64 ans en 2030.
La Première ministre a confirmé lors d'une conférence de presse l'arbitrage qui avait largement fuité depuis plusieurs jours, après une séquence de plusieurs mois mêlant consultations, atermoiements et report-surprise de l'annonce au mois de décembre.
"J'ai bien conscience que faire évoluer notre système de retraite suscite des interrogations et des craintes chez les Français. Nous voulons y répondre, et convaincre" et surtout "garantir l'équilibre du système en 2030", a déclaré Élisabeth Borne alors que les partis de gauche, le Rassemblement national et l'ensemble des syndicats de salariés sont opposés à un report de l'âge de départ.

Mais le report de l'âge légal à 65 ans, engagement initial d'Emmanuel Macron, n'a "jamais été une fin en soi", a-t-elle insisté, présentant la réforme retenue comme le fruit des nombreuses consultations avec les syndicats et les partis politiques, au premier rang desquels Les Républicains, dont le gouvernement espère le soutien.
À compter du 1er septembre, l'âge légal de départ sera donc "relevé progressivement de trois mois par an pour atteindre 64 ans en 2030. Nous serons donc à 63 ans et 3 mois à la fin du quinquennat" en 2027, a détaillé Élisabeth Borne.
"Nous n'irons pas plus loin que les 43 ans de cotisation prévus par la réforme Touraine pour partir avec une retraite à taux plein. Mais nous atteindrons cette cible plus vite, en passant à un rythme d'un trimestre par an", a-t-elle développé. Il faudra donc avoir cotisé 43 ans dès 2027 au lieu de 2035 pour une retraite à taux plein.
Une revalorisation des petites retraites
Autre mesure-phare sur laquelle le gouvernement compte pour faire accepter la réforme : le relèvement à 85 % du Smic net, soit 1 200 euros brut actuellement, de la pension minimum pour les carrières complètes, une mesure étendue aux actuels retraités. "Près de deux millions de petites retraites vont être augmentées", a fait valoir Élisabeth Borne.
La réforme comprend également un dispositif "adapté" pour les carrières longues, "pour qu'aucune personne ayant commencé" à travailler tôt ne soit obligée de travailler plus de 44 ans", selon le gouvernement.
Elle "actera l'extinction des principaux régimes spéciaux", subsistants, à savoir "les nouveaux embauchés à la RATP, dans la branche des industries électriques et gazières et à la Banque de France" seront notamment affiliés au régime général pour la retraite, a précisé Élisabeth Borne.
Sur le volet pénibilité, "un fonds d'investissement dans la prévention de l'usure professionnelle" sera instauré et doté d'un milliard d'euros sur le quinquennat.
En outre, le gouvernement veut créer un "index seniors" que les entreprises de plus de 50 salariés devront publier. Une mesure qui suscite l'hostilité du patronat.
"Un index sera créé sur la place des salariés en fin de carrière. Cet index sera simple. Il sera public. Il permettra de valoriser les bonnes pratiques et de dénoncer les mauvaises", a fait valoir la Première ministre.
Le gouvernement devrait inscrire sa réforme dans un projet de budget rectificatif de la Sécurité sociale présenté en Conseil des ministres le 23 janvier, avant examen dans la foulée au Parlement.
"Nous sommes prêts à faire encore évoluer notre projet, et cela sera possible grâce à un débat parlementaire loyal et constructif", a précisé la Première ministre.
"La mère des batailles"
Les réactions ne se sont pas faites attendre. Jean-Luc Mélenchon a dénoncé une "grave régression sociale". Marine Le Pen a assuré de sa "détermination" à "faire barrage" à une "réforme injuste" que le gouvernement entend faire adopter "avec le soutien de LR".
Report de l’âge de départ. Augmentation des annuités. Suppression des régimes spéciaux avantageux. La réforme #Macron #Borne c’est une grave régression sociale. #ReformeDesRetraites
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) January 10, 2023Le président des députés LR Olivier Marleix s'est, lui, dit "satisfait d'avoir été entendu", sur le rythme de la réforme et les petites retraites.
Au plan social, les dirigeants des huit grands syndicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) ont appelé à une première journée de manifestations et de grèves le 19 janvier.
Cette première journée doit "donne(r) le départ d'une puissante mobilisation sur les retraites dans la durée", affirment dans un communiqué commun ces syndicats dont les secrétaires généraux et présidents se sont réunis à la Bourse du travail mardi soir.
"Si Emmanuel Macron veut en faire sa mère des réformes (...), pour nous ce sera la mère des batailles", résume Frédéric Souillot, patron de Force ouvrière.
"Même avec des mesures positives sur les carrières longues ou la pénibilité", "il n'y aura pas de deal avec la CFDT", a de son côté prévenu le secrétaire général du syndicat réformiste, Laurent Berger, dont l'exécutif a un temps espéré le soutien.
|| COMMUNIQUE DE PRESSE INTERSYNDICAL || #RéformeDesRetraites Suite à l'annonce du report de l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans, l'ensemble des organisations syndicales appellent à la mobilisation le 19 janvier ! #64anscestnon https://t.co/C9QK07wldf pic.twitter.com/lRWwuaTXNa
— CFDT (@CFDT) January 10, 2023De son côté, le Medef, la principale organisation patronale a salué "les décisions responsables et pragmatiques" du gouvernement.
Selon les derniers sondages, une large majorité de Français est opposée au relèvement de l'âge légal.
S'il prédit "un mouvement d'ampleur" des syndicats, le député Renaissance Marc Ferracci, proche d'Emmanuel Macron, affiche en revanche la détermination du pouvoir : "Il faut qu'on montre qu'on ira jusqu'au bout".
La réforme des retraites sera débattue en février au Parlement par l'intermédiaire d'un futur projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificatif.
Avec Reuters et AFP