logo

Xi Jinping confronte Justin Trudeau au G20, Pékin dément toute réprimande

En marge du sommet du G20,le président chinois, Xi Jinping, avait reproché à son homologue canadien, Justin Trudeau, d'avoir fait fuiter à la presse la teneur d'une conversation. Malgré un sourire de façade, le ton franc de Xi Jinping pourrait refléter l'état des relations entre les deux pays.

C'est une scène rare : voir le président chinois converser franchement avec un de ses homologues, dans les coulisses du G20 en Indonésie. Une scène d'autant plus rare car ce n'était que la deuxième sortie du territoire chinois de Xi Jinping depuis le début de la pandémie. 

Watch as Chinese President Xi Jinping confronts Canadian Prime Minister Justin Trudeau, alleging leaks of their closed-door meeting at the G20 summit https://t.co/pMiAjBnFql pic.twitter.com/kNcg3bLyrB

— Reuters (@Reuters) November 17, 2022

Durant ce court échange, mercredi 16 novembre, avec le dirigeant canadien, Justin Trudeau, le président chinois a réprimandé, de façon cordiale mais ferme, son interlocuteur devant les caméras des journalistes, après la fuite supposée dans la presse des détails d'un entretien qui s'est déroulé la veille entre les deux hommes.

Le Premier ministre canadien disait avoir évoqué lors de cette rencontre "la question de l'ingérence" chinoise après qu'Ottawa a accusé Pékin de s'ingérer dans ses systèmes démocratique et judiciaire.

"Aller raconter aux journaux ce qu'on a dit lors de notre conversation, ce n'est pas approprié", déclare Xi Jinping à Justin Trudeau, selon cette vidéo d'environ une minute publié sur le réseau social Twitter.

Ton calme et sourire

D'un ton calme et avec le sourire, le président s'exprime en chinois et poursuit : "Et en plus, ce n'est pas la façon dont la discussion s'est déroulée". Ses propos sont traduits en anglais par un interprète.

"S'il y a de la sincérité (de votre part), alors nous devrions avoir une discussion basée sur le respect mutuel. Si tel n'est pas le cas, difficile d'en attendre trop", poursuit Xi Jinping à l'adresse de Justin Trudeau.

Le président chinois tente alors apparemment de prendre congé du Premier ministre canadien, mais ce dernier répond, avant même d'écouter la traduction des propos de Xi Jinping.

"Au Canada, nous croyons au dialogue libre, ouvert et franc, et c'est ce que nous allons continuer à faire", déclare Justin Trudeau en anglais.

"Nous continuerons à chercher à travailler ensemble de manière constructive, mais il y aura des choses sur lesquelles nous ne serons pas d'accord", souligne-t-il.

Les mains levées et à plat devant lui, Xi Jinping met alors fin à la conversation, en lui déclarant calmement à deux reprises : "À vous de créer les conditions (nécessaires à l'amélioration des relations)".

Souriant, il serre la main du Premier ministre canadien, puis les deux hommes se séparent.

Interrogée jeudi sur le sujet lors d'un point presse régulier, une porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning, en a minimisé la portée.

"La vidéo (...) contenait une brève conversation entre les dirigeants des deux pays lors du sommet du G20. C'est quelque chose de normal", a-t-elle déclaré.

"Je ne pense pas que cela devrait être interprété comme une critique ou une réprimande de qui que ce soit de la part du président Xi".

Tensions anciennes

Le ton de l'échange était semblable à celui "d'une 'grande' puissance s'adressant à une moins grande", juge Van Jackson, professeur en relations internationales à l'université Victoria de Wellington, en Nouvelle-Zélande.

"Le langage et la posture de M. Xi n'ont rien d'inhabituelles - en privé - pour une conversation entre responsables gouvernementaux qui ne sont pas en bons termes", souligne-t-il auprès de l'AFP.

La rencontre, mardi, entre Xi Jinping et Justin Trudeau était le premier dialogue en face-à-face entre les deux dirigeants depuis 2019.

La police fédérale canadienne a indiqué, la semaine dernière, mener une enquête sur de supposés "postes de police" mis en place illégalement par la Chine au Canada pour contrôler notamment les Chinois exilés ou expatriés.

Justin Trudeau a également déclaré, la même semaine, que la Chine se livrait "à des jeux agressifs" après que la chaîne canadienne Global News a fait état d'une ingérence chinoise dans le processus électoral au Canada.

Les relations entre Pékin et Ottawa se sont fortement dégradées ces dernières années, notamment après l'arrestation, en 2018, par le Canada, sur demande des États-Unis, de la directrice financière de Huawei, géant chinois des télécoms.

Malgré une détente relative après sa libération l'an dernier et celle de deux Canadiens qui avaient été arrêtés en représailles, ces dernières semaines ont été marquées par un nouveau durcissement des relations.