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Elizabeth II a aussi régné sur l'économie britannique et du Commonwealth
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En 70 années de règne, la reine Elizabeth II a été à la fois témoin et vecteur de changements économiques majeurs. Son influence s'est étendue bien au-delà des frontières du Royaume-Uni, jusque dans les pays du Commonwealth. Outre les profondes mutations liées à l'histoire et l'évolution du monde, la monarque pèse dans l'économie de son pays mais aussi dans sa monnaie. 

Lorsque Elizabeth II monte sur le trône en 1952, le Royaume-Uni est une économie qui ressent encore le poids de la Seconde Guerre mondiale : le beurre, le bacon, la viande y sont encore rationnés. En 70 années de règne, la monarque a assisté à une transformation radicale du pays. 

Désormais, l'économie britannique est environ cinq fois plus importante et sa population a grandi de 30 %. Les revenus moyens se sont améliorés. Selon PricewaterhouseCoopers (PwC), le PIB par habitant est passé d'environ 8 500 £ par an en 1952 à 32 600 £ en 2022.   

Sur cette période, le Royaume-Uni a changé d'économie. Il y a 70 ans, l'industrie représentait 29 % des emplois, contre seulement 7 % aujourd'hui. Le secteur des services s'est considérablement développé et la dérégulation du système bancaire a permis de faire de Londres un centre financier mondial. 

Parallèlement, les dépenses publiques sont restées stables mais leur affectation a changé. Au lendemain de la guerre, 23 % du budget national était consacré à la Défense ; ce n'est à présent plus que 5 % des dépenses du gouvernement. Les sommes consacrées à la Santé ont, elles, fait le chemin inverse, passant d'approximativement 7 % à 20 %. 

En revanche, l'inflation d'hier (11,2 % en février 1952) est à seulement un peu plus de deux points de pourcentage au-dessus de celle d'aujourd'hui (9 % en avril 2022), influencés par la guerre de Corée qui avait fait exploser les prix des matières premières dans les années 1950, ou la crise de l'énergie liée à la guerre en Ukraine aujourd'hui. 

Une économie au ralenti pour dire adieu à la reine

Pour ce qui est de l'impact direct de la reine sur l'économie du Royaume-Uni, on peut s'attendre à des fermetures de banques, commerces et entreprises en signe de déférence envers la souveraine, et cela à plusieurs reprises au cours des prochains jours. Lors du décès de la princesse Diana, en 1997, c'est ce que de nombreux Britanniques avaient choisi de faire. Les entités qui marqueront un temps d'arrêt ce vendredi pourraient aussi décider de fermer boutique pour les funérailles d'Elizabeth II puis à l'occasion de l'accession au pouvoir du nouveau roi Charles III. En tout, cela pourrait donc représenter trois jours chômés, 1,5 à 7 milliards d'euros de manque à gagner, selon diverses estimations. 

Difficile d'être plus précis car les précédents manquent. La seule comparaison possible en termes de "communion nationale" est le jubilé de platine de la reine, en juin dernier, à l'occasion des 70 ans de règne d'Elizabeth II. Les célébrations avaient eu un coût pour le budget national (Trooping the Colour, grand concert devant Buckingham Palace, défilés...) et les sujets de sa majesté n'avaient pas travaillé les jeudi et vendredi des festivités, entraînant une contraction de 0,6 % du PIB britannique, selon le Bureau des statistiques nationales.

Nouveau souverain, nouvelle monnaie

Cela pourrait sembler anecdotique, et pourtant...  Avec le décès d'Elizabeth II, il va falloir revoir les billets, pièces et timbres britanniques. Aujourd'hui frappés du portrait de la reine, ils vont devoir être renouvelés pour faire apparaître le visage du nouveau souverain. Le roi de 73 ans, Charles III, regardera à gauche, respectant ainsi la tradition voulant que le nouveau monarque regarde dans la direction opposée à celle de son prédécesseur. 

Il y a aujourd'hui environ 4,5 milliards de billets de banque en circulation portant le visage de la reine, pour une valeur totale de 80 milliards de livres sterling. Pendant un moment, les deux portraits cohabiteront, avant que pièces et billets à l'effigie d'Elizabeth II ne disparaissent totalement, sans doute dans un délai de deux ans. Lorsque les derniers billets synthétiques de 50 £ ont été émis, le remplacement total avait pris 16 mois à la Banque d'Angleterre. 

D'autres pays devront procéder à des changements car le portrait de la reine s'affiche sur les pièces et billets de plusieurs pays du Commonwealth, comme certains billets de 20 dollars au Canada, les pièces de monnaie en Nouvelle-Zélande et sur toutes les pièces et tous les billets émis par la banque centrale des Caraïbes orientales.

Elizabeth II était déjà reine et présente en image sur la monnaie britannique lorsque le système décimal a été mis en place au Royaume-Uni, le 15 février 1971. Avant le "Decimal Day" ("jour de la décimalisation"), le système pounds/shillings/pence était en vigueur selon une hiérarchie complexe (20 shillings = 1 £ et 12 pence = 1 shilling), remplacé par une livre sterling simplement divisée en 100 pence. 

Mais même si pièces et billets changent de profil, il y a fort à parier que de nombreux Britanniques ne changeront pas tout le contenu de leur porte-monnaie et choisiront de conserver de nombreux exemplaires de la souveraine comme souvenir.