
Arrivé lundi soir à Yaoundé, Emmanuel Macron s'est entretenu, mardi, avec son homologue Paul Biya, 89 ans, qui dirige le Cameroun d'une main de fer depuis près de 40 ans. Lors d'une conférence de presse conjointe des deux chefs d'État, le président français a assuré que le pays était un "partenaire stratégique" en Afrique centrale. Il a également demandé à des historiens de "faire la lumière" sur l'action de la France pendant la colonisation.
Début de la tournée africaine d'Emmanuel Macron. Le président français est arrivé, lundi 25 juillet au soir, à Yaoundé, pour sa première visite au Cameroun et en Afrique centrale, avec l'objectif de relancer les relations politiques et économiques entre les deux pays, en perte de vitesse.
C'est le premier déplacement du président français sur le contient africain depuis sa réélection, en mai dernier, mais aussi la première visite d'un chef d'État français à Yaoundé, depuis 2015, quand François Hollande s'y était rendu.
Emmanuel Macron a été accueilli vers 22 h 40 locales (23 h 40 à Paris) à l'aéroport de Yaoundé par le Premier ministre camerounais, Joseph Dion Ngute, avant une courte cérémonie protocolaire.
Ce déplacement de 4 jours, qui le mènera aussi au Bénin et en Guinée Bissau, doit lui permettre de réaffirmer son "engagement dans la démarche de renouvellement de la relation de la France avec le continent africain" au début de son second quinquennat, a expliqué l'Élysée.

"Un partenaire stratégique en Afrique centrale"
Emmanuel Macron est arrivé mardi matin au palais présidentiel pour un entretien avec son homologue Paul Biya, 89 ans, qui dirige le Cameroun d'une main de fer depuis près de 40 ans.
Ils devaient discuter de la sécurité sur fond de menaces jihadistes dans le nord du Cameroun, avec Boko Haram, et du conflit opposant dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, depuis plus de cinq ans, des groupes armés séparatistes aux forces de l'ordre.
Lors d'une conférence de presse conjointe avec Paul Biya, Emmanuel Macron a souligné que le Cameroun "était un partenaire stratégique en Afrique centrale", une région à laquelle le président français souhaite consacrer plus de temps lors de son second mandat.
Cette visite intervient alors que la France, ancienne puissance coloniale, voit son influence s'éroder, en particulier sur les plans économique et commercial, face à la Chine, l'Inde ou l'Allemagne. Les entreprises françaises ne pèsent plus qu'environ 10 % de l'économie contre 40 % dans les années 1990.
Le but affiché de cette visite est également de nouer de nouveaux partenariats agricoles avec le Cameroun, première économie d'Afrique centrale, alors qu'une crise alimentaire, provoquée par la guerre en Ukraine, menace le continent.
L'enjeu est aussi stratégique. La Russie courtise le Cameroun, et les deux pays ont signé un accord de coopération militaire en avril dernier.
Ouverture "en totalité" des archives françaises
Emmanuel Macron a également demandé à des historiens de "faire la lumière" sur l'action de la France au Cameroun pendant la colonisation et après l'indépendance de ce pays, annonçant l'ouverture "en totalité" des archives françaises sur des "moments douloureux" et "tragiques".
"Je souhaite que nous puissions avoir et lancer ensemble un travail conjoint d'historiens camerounais et français", a déclaré Emmanuel Macron.
"Je prends ici l'engagement solennel d'ouvrir nos archives en totalité à ce groupe d'historiens qui nous permettront d'éclairer ce passé", a-t-il dit. "Il convient d'établir factuellement" des "responsabilités", a ajouté le président français.
Après la défaite de l'Allemagne en 1918, la Société des Nations (SDN, ancêtre de l'ONU) avait confié la majeure partie de la colonie allemande du Kamerun à la tutelle de la France et le reste – la partie occidentale bordant le Nigeria – à la Grande-Bretagne.
Avant l'indépendance du pays en 1960, les autorités françaises ont réprimé dans le sang les "maquis" de l'UPC (Union des populations du Cameroun), un parti nationaliste fondé à la fin des années 1940 et engagé dans la lutte armée contre le colonisateur et ses alliés camerounais, particulièrement en Pays bamiléké.
Plusieurs dizaines de milliers de militants pro-UPC, dont le leader indépendantiste Ruben Um Nyobè, ont été massacrés d'abord par l'armée française, puis après l'indépendance par l'armée camerounaise du régime d'Ahmadou Ahidjo.
Au cours de la dernière visite d'un président français à Yaoundé, François Hollande avait concédé en 2015 qu'il y avait "eu des épisodes extrêmement tourmentés, tragiques même". "Nous sommes ouverts pour que les livres d'histoire puissent être ouverts et les archives aussi", avait-il ajouté.
Avec AFP