Les cheminots britanniques ont lancé mardi – et pour trois jours - leur plus grosse grève en trente ans. Ils réclament des hausses salariales en phase avec l'inflation galopante, l'amélioration de leurs conditions de travail ainsi que l'annulation de "milliers de licenciements" prévus.
Les gares britanniques sont en grande partie désertées, mardi 21 juin. Les usagers ont choisi d'éviter d'emprunter les chemins de fer, au lancement, par les cheminots, d'une grève de trois jours pour les emplois et les salaires, annoncée comme la plus importante en trente ans.
Le grand hall de la gare londonienne de King's Cross n'accueillait mardi matin qu'un public clairsemé, à la place de l'habituelle cohue des heures de pointe, alors qu'une ligne sur deux était fermée et quatre trains sur cinq supprimés dans le pays.
Seuls quelques voyageurs guettaient çà et là les panneaux d'affichages, à l'affût d'informations sur les quelques trains en circulation. Des voyageurs qui se montraient majoritairement compréhensifs envers la grève des cheminots.
Après l'échec de négociations de la dernière heure, les parties campaient sur leurs positions mardi. Le ministre des Transports Grant Shapps a encore parlé sur la chaîne Sky News d'un débrayage "inutile". "Nous devrons faire ces réformes quoiqu'il arrive", a-t-il affirmé.
Le "plus gros conflit sectoriel depuis 1989"
Le syndicat RMT avait indiqué début juin que plus de 50 000 employés des chemins de fer allaient cesser le travail "lors du plus gros conflit sectoriel depuis 1989", réclamant notamment des hausses salariales en phase avec l'inflation galopante.
Outre les salaires, RMT dénonce la dégradation des conditions de travail et "des milliers de licenciements" prévus, selon lui, par la myriade de compagnies ferroviaires privées qui composent le secteur au Royaume-Uni.
Grant Shapps fait, lui, valoir qu'il y a une offre salariale "sur la table" - insuffisante pour le RMT - et que les "suppressions de postes sont dans l'ensemble volontaires".
Le secrétaire général du RMT, Mike Lynch, a rétorqué que "ce bazar a été créé par Grant Shapps et la politique du gouvernement".
Mardi est la plus grosse journée de mobilisation, alors que les employés du métro de Londres sont eux aussi appelés à débrayer, mais la grève se poursuivra jeudi et samedi.
Appel de Boris Johnson au compromis
Le gouvernement doit se réunir mardi. "Les syndicats nuisent à ceux qu'ils prétendent aider", a jugé le Premier ministre Boris Johnson dans un communiqué, appelant à trouver "un compromis raisonnable pour le bien du peuple britannique et des travailleurs ferroviaires".
À l'approche de la grève, l'exécutif avait continué à appeler syndicats et entreprises à poursuivre les négociations, mais celles-ci ont échoué lundi en fin de journée, RMT jugeant "inacceptables" les propositions faites par les employeurs.
Le mouvement de grève "va apporter souffrance et chaos à des millions d'usagers", a déploré dans la foulée le ministre des Transports, Grant Shapps, devant le Parlement, critiqué tant par les syndicats que par l'opposition travailliste pour ne pas s'être lui-même assis à la table des négociations.
Mais "lors de telles discussions, c'est toujours à l'employeur et aux syndicats de se réunir et de négocier" et le gouvernement "n'est pas l'employeur", a rétorqué Grant Shapps, qui a dit aussi vouloir introduire dans la législation britannique un service minimum en cas de mouvement social.
D'autres secteurs pourraient suivre
Depuis la semaine dernière, l'exécutif répète que cette grève va nuire aux innombrables Britanniques empêchés de se rendre à leur travail ou à des rendez-vous médicaux.
Ce débrayage menace aussi de perturber de grands événements sportifs et culturels, comme le festival de musique de Glastonbury (sud-ouest de l'Angleterre), un concert des Rolling Stones à Londres samedi et les examens de fin d'études de certains lycéens.
Le gouvernement estime que les syndicats se tirent une balle dans le pied alors que le secteur ferroviaire, qui a bénéficié de 16 milliards de livres de subventions pour l'aider face à la chute des recettes pendant la pandémie, risque de voir le nombre de passagers reculer durablement face au développement du télétravail.
La fédération de syndicats TUC a accusé lundi le gouvernement d'"attiser les tensions", citant notamment l'idée avancée la semaine dernière par Grant Shapps d'autoriser le recours à des intérimaires pour remplacer les salariés grévistes si le mouvement devait s'éterniser.
La grève pourrait en effet s'étendre à d'autres modes de transports, notamment les bus, et durer au-delà de cette première semaine de grève, alors que d'autres syndicats des transports ont appelé leurs membres à se prononcer sur un débrayage.
Le mouvement pourrait même se propager à d'autres secteurs comme l'enseignement, la santé, la poste, ou encore les avocats : l'association du barreau criminel a annoncé lundi que ses membres s'étaient prononcés très majoritairement en faveur d'une grève dès la semaine prochaine.
Avec AFP