logo

Alors que la guerre au Yémen est présentée par l'ONU comme l'une des pires catastrophes humanitaires de ces dernières années, trois ONG mettent en cause la responsabilité d'entreprises françaises. Elles ont ainsi déposé une plainte pour "complicité de crimes de guerre", à l'encontre de Thalès, Dassault et MBDA, les accusant d'exporter des armes à la coalition emmenée par l'Arabie Saoudite "tout en sachant qu'elle commet des crimes de guerre depuis 2015".

Trois ONG ont annoncé, jeudi 2 juin, avoir porté plainte à Paris pour "complicité de crimes de guerre" contre Dassault, Thalès et MBDA France, qu'elles accusent d'avoir vendu des armes à l'Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis qui ont servi contre des civils au Yémen.

Ces trois entreprises "exportent des armes à la coalition (émirato-saoudienne, ndlr), tout en sachant qu'elle commet des crimes de guerre depuis 2015", a déploré Cannelle Lavite, du Centre européen pour les droits constitutionnels et les droits humains (ECCHR, l'une des parties civiles). Selon elle, cela soulève la question de leur complicité.

Les plaignants poursuivent également les trois entreprises pour "complicité de crimes contre l'humanité".

Yémen : une plainte déposée contre Thalès, Dassault et MBDA pour "complicité de crimes de guerre"

Selon ces ONG, Dassault rend possible des attaques "contre des civils et des infrastructures civiles" en ayant vendu et surtout en assurant la maintenance de 59 Mirage acquis par les Émirats arabes unis, leur permettant de "rester opérationnels", a poursuivi Cannelle Lavite.

Dans la même logique, la vente actée en décembre de 80 Rafale à ce pays peut être interprétée comme "un encouragement" à commettre des violations du droit international humanitaire, a insisté la juriste.

Des milliers de victimes civiles

La société MBDA France est de son côté visée pour avoir exporté des missiles Storm Shadow et Scalp aux belligérants, alors que le groupe Thalès est pointé pour leur avoir fourni un système de guidage de missiles baptisé Damoclès et Thalios, selon la même source.

"Si on fournit des armes à un auteur présumé de crimes récurrents, on facilite la commission de ces crimes", a insisté Cannelle Lavite.

La guerre au Yémen oppose depuis 2014 les rebelles Houthis, soutenus par l'Iran, aux forces du gouvernement, assisté par l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Elle a fait des centaines de milliers de morts, des millions de déplacés et est présentée par l'ONU comme l'une des pires catastrophes humanitaires actuelles au monde, exposant une grande partie de la population à une situation de faim aiguë, proche de la famine. 

L'ONG yéménite Mwatana, également partie civile, tout comme l'ONG française Sherpa, affirme avoir documenté "mille attaques contre des civils" ayant fait "au moins 3 000 morts et 4 000 blessés" grâce à des "armes récentes" vendues aux Emirats et à l'Arabie saoudite, selon son directeur exécutif Abdulrasheed al-Faqih.

"Les exportations d'armes alimentent le conflit et la souffrance des yéménites. En enquêtant sur les potentielles responsabilités d'acteurs économiques dans les crimes commis au Yémen, la justice française pourrait jouer un rôle essentiel dans la lutte contre l’impunité et l’accès à la justice pour les personnes affectées par des crimes internationaux", souligne Anna Kiefer, chargée de contentieux et plaidoyer à Sherpa dans un communiqué.

En avril 2019, le média d'investigation français Disclose avait révélé l'existence d'une note du renseignement militaire français datant d'octobre 2018 et confirmant l'utilisation d'armes françaises au Yémen.

Avec AFP