
"Regrettable", "scandaleux", "insultant" : le référendum suisse sur la construction de minarets, approuvé à 57,5 % des voix, suscite de nombreuses réactions politiques et religieuses dans le monde. Extraits.
Le référendum en Suisse, qui a vu une large majorité des votants (57,5 %) se prononcer contre la construction de nouveaux minarets dans le pays, suscite de nombreuses réactions sur la scène politique helvète, mais aussi à l’étranger. En France, la "votation" engendre des avis contraires : quand le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, se dit "scandalisé" par son résultat, le porte-parole de l’UMP Dominique Paillé s’interroge, lui, sur la nécessité des minarets. Dans les pays qui comptent les plus grandes communautés musulmanes du monde, comme l’Indonésie, le Pakistan et l’Égypte, les responsables religieux font part de leur inquiétude et appellent au calme.
Dans le monde musulman :
En Indonésie - le plus grand pays musulman de la planète -, Maskuri Abdillah, chef de la Nahdlatul Ulama (NU), la principale organisation musulmane du pays, estime que "c'est un signe de haine des Suisses vis à vis des musulmans. C'est vraiment regrettable". Il appelle cependant les Indonésiens à "ne pas réagir avec excès", bien qu’il sera "difficile d'éviter qu'ils ne manifestent pour exprimer leur mécontentement".
Au Pakistan, Khurshid Ahmad, vice-président du Jamaat-e-Islami, un parti islamique radical, estime que "cette affaire reflète l'islamophobie extrême répandue dans la population en Occident. (…) Cela illustre également la très grave discrimination à l'égard des musulmans."
Le grand mufti d'Égypte, Ali Gomaa, dénonce "une insulte aux sentiments de la communauté musulmane en Suisse comme ailleurs". Il a cependant conseillé aux musulmans de ne pas prendre cette interdiction comme une provocation et encourage les 400 000 musulmans vivant en Suisse à "dialoguer" avec les autorités, voire à utiliser les moyens légaux pour contester le résultat du référendum.
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Dans le monde catholique :
"Certainement, on note un sentiment d'aversion et de peur un peu partout, mais un chrétien doit savoir dépasser cela, même s'il n'y a pas de réciprocité", avait déclaré vendredi le président du conseil pontifical pour les migrants, Mgr Antonio Maria Sveglio. Lundi, le Vatican s'est déclaré "sur la même ligne que les évêques suisses", qui ont déclaré que le vote suisse était "un coup dur porté à la liberté religieuse".
En France :
Le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, a fortement réagi lundi au résultat du référendum suisse : "Je suis un peu scandalisé par cette décision (…). C'est une expression d'intolérance et je déteste l'intolérance". Et de poursuivre : la construction de minarets "n'est pas grand chose. Est-ce que c'est une offense dans un pays de montagnes qu'il y ait une construction un peu plus élevée [que les autres] ?"
Mais la "votation" suisse ne suscite pas que des réactions de désapprobation. Le secrétaire général de l'UMP (au pouvoir), Xavier Bertrand, a estimé dimanche qu'il n'était "pas certain que l'on ait forcément besoin de minarets" pour pratiquer l'islam. Cette opinion est partagée par le porte-parole adjoint du parti, Dominique Paillé, qui a déclaré, sur les ondes de France Inter : "Les salles de prières sont tout à fait indispensables mais, pour autant, faut-il des minarets au-dessus de ces salles de prière ? Moi je n'en suis pas sûr". Il faut, dit-il, "assumer ses convictions sans que cela blesse".
En Europe :
Le ministre suédois des Affaires étrangères, Carl Bildt, dont le pays assure la présidence de l'Union européenne (UE), a exprimé son inquiétude : "C'est l'expression d'un préjugé, et peut-être même d'une peur, mais il est clair qu'il s'agit à tous égards d'un signe négatif, il n'y a aucun doute à ce sujet".
L'intellectuel musulman controversé, Tariq Ramadan, a quant à lui jugé "catastrophique" le résultat du référendum suisse.
En Suisse :
Vice-président de l'UDC, Yvan Perrin, dit "assumer" le résultat et se félicite de voir que, grâce à ce scrutin, son parti "a gagné en respectabilité".