La Pologne s'est dite prête à transmettre à l'Ukraine ses chasseurs Mig-29, réclamés avec insistance par Kiev. Mais Varsovie, craignant une contagion du conflit, a renvoyé cette décision entre les mains des États-Unis et de l'Otan. Washington et Berlin se sont prononcés contre, invoquant eux aussi le risque d'un élargissement du conflit.
L'annonce surprise a provoqué un imbroglio diplomatique avec Washington. La Pologne a pris les Américains de court, mardi 8 avril, en se disant "prête à déplacer sans délai et gratuitement tous ses avions Mig-29 sur la base de Ramstein [en Allemagne] et à les mettre à la disposition du gouvernement des États-Unis", pour que ces derniers les livrent à l'Ukraine, en proie à une invasion russe depuis le 24 février.
Une proposition immédiatement rejetée par Washington, qui craint un élargissement du conflit, la Russie ayant prévenu qu'elle considérerait l'envoi de tels avions par un pays tiers comme une implication directe dans la guerre en Ukraine. "Nous ne pensons pas que la proposition de la Pologne soit viable", a ainsi déclaré le porte-parole du Pentagone, John Kirby. La décision de transférer ou non des avions polonais à l'Ukraine "revient en fin de compte au gouvernement polonais", a-t-il indiqué.
La vice-présidente américaine, Kamala Harris, en visite en Pologne mercredi, doit cependant discuter avec les dirigeants polonais de la manière de fournir une "assistance militaire" à l'Ukraine, selon des responsables de l'administration américaine, qui ont requis l'anonymat.
La Pologne s'en remet à l'Otan
Autre perche tendue par la Pologne, Varsovie s'est dite prête mercredi à mettre ses avions de combat à la disposition de l'Ukraine, via l'Otan ont elle est membre. Il s'agit d'une "décision très sérieuse" qui devrait être prise par tous les membres de l'alliance de l'Otan, car elle affecte la sécurité au sens large, a prévenu le premier ministre Mateusz Morawiecki. "Nous n'avons pas accepté de fournir des avions par nous-mêmes, car cela doit être la décision de l'ensemble de l'Otan", a-t-il ajouté.
Selon le dirigeant polonais, la décision de mettre ou non les avions Mig-29 à la disposition de l'Ukraine, qui lutte contre l'invasion russe, est désormais entre les mains de l'Otan et des États-Unis.
Dans le même temps, le président ukrainien Volodymyr Zelensky continuait de supplier les Occidentaux de lui envoyer "au plus vite" des avions de chasse, à commencer par les Mig-29 proposés par Varsovie. "Prenez une décision au plus vite, envoyez-nous des avions !", a-t-il lancé aux Occidentaux dans une nouvelle vidéo publiée mercredi sur sa chaîne Telegram. Il a remercié Varsovie d'avoir proposé d'envoyer ces avions de combat à l'Ukraine tout en regrettant qu'"aucune décision" "n'ait [encore] été prise".
Le refus allemand d'engager l'Otan dans une réponse militaire
Côté européen, l'Allemagne a coupé court à l'élan polonais. La question de savoir si l'Otan doit fournir à l'Ukraine des avions à réaction Mig-29 polonais n'est pas sur la table actuellement , a estimé mercredi un porte-parole du gouvernement allemand. Un porte-parole du ministère des Affaires étrangères a ajouté que toute décision devait être prise dans le but d'éviter que la guerre en Ukraine ne déborde sur l'Otan.
Le chancelier allemand, Olaf Scholz, est allé dans le même sens mercredi en affirmant qu'une solution militaire au conflit ukrainien n'avait aucun sens et qu'il espérait plutôt qu'une solution puisse être trouvée dans le cadre de pourparlers entre la Russie et l'Ukraine. S'exprimant lors d'une conférence de presse conjointe avec le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, il a redit que l'Allemagne n'enverrait pas d'avions de combat en Ukraine.
La Pologne "en ligne de tir directe" de la Russie et du Biélorussie ?
Seuls quelques pays d'Europe de l'Est, anciens membres du Pacte de Varsovie, disposent officiellement dans leur flotte de Mig-29, dont les capacités correspondent le mieux aux besoins ukrainiens.
La Pologne possède une trentaine de ces appareils de conception soviétique, mais selon des médias, seuls 23 seraient techniquement prêts à être envoyés à Ramstein, la plus grande base aérienne des forces américaines en Europe.
À Londres, tout en assurant la Pologne de son soutien, le ministre britannique de la Défense, Ben Wallace, a indiqué mardi que la livraison d'avions polonais à l'Ukraine relevait d'une décision de Varsovie qui serait "une bonne chose", mais pouvait amener la Pologne "en ligne de tir directe" de la Russie et de la Biélorussie.
Avec AFP