Le débat prévu dimanche après-midi au sommet annuel de l'Union africaine sur l'accréditation d'Israël à l'organisation en tant qu'observateur a été "suspendu". Si les 55 pays membres de l'UA sont fortement divisés sur cette question, ils ont en revanche parlé d'une même voix pour condamner "sans équivoque" les coups d'État survenus récemment sur le continent.
Lors de son sommet annuel, l'Union africaine (UA) a choisi, dimanche 6 février, de ne pas afficher ses dissensions en ajournant le débat sur le sujet hautement sensible de l'accréditation d'Israël à l'organisation en tant qu'observateur.
Source de vifs débats parmi les 55 États membres, le sujet a été "suspendu" et le débat prévu dimanche après-midi reporté, évitant une crise inédite au sein de l'organisation panafricaine adepte du consensus.
La décision d'accréditation d'Israël, prise en juillet par Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l'Union africaine, divise l'organisation.
Plusieurs États membres, dont l'Afrique du Sud et l'Algérie, s'en sont indignés, estimant que ce choix va à l'encontre des déclarations de l'organisation soutenant les Territoires palestiniens.
Un comité va être créé
Les deux pays ont fait pression pour inscrire ce sujet à l'ordre du jour du sommet. Un débat était prévu dimanche après-midi mais il a été "suspendu", ont indiqué des sources diplomatiques à l'AFP. Un comité va être créé "pour étudier la question".
Ce comité comprendra l'Afrique du Sud et l'Algérie, mais aussi le Rwanda et la République démocratique du Congo, qui soutiennent la décision de Moussa Faki Mahamat, ainsi que le Cameroun et le Nigeria, selon les diplomates interrogés.
Ce report évite la possibilité d'un vote qui, selon de nombreux analystes, aurait pu provoquer une scission sans précédent dans l'histoire de l'UA, qui fête ses vingt ans.
Dans un discours samedi, le Premier ministre palestinien, Mohammed Shtayyeh, avait demandé aux dirigeants africains de retirer l'accréditation d'Israël.
Moussa Faki Mahamat avait, lui, défendu son choix et appelé à un "débat serein". Il a assuré que l'engagement de l'UA dans la "quête d'indépendance" des Palestiniens était "immuable et ne peut que continuer à se renforcer". Mais l'accréditation d'Israël peut constituer, selon lui, "un instrument au service de la paix".
Les coups d'État condamnés "sans équivoque"
Les dirigeants africains ont en revanche parlé d'une seule voix pour condamner "sans équivoque" la récente "vague" de coups d'État sur le continent.
Les putschs qui ont secoué le continent durant l'année écoulée – le dernier au Burkina Faso, il y a deux semaines – était un sujet inévitable pour le sommet annuel de l'UA.
Lors de la réunion du Conseil de paix et de sécurité, "chaque dirigeant africain de l'assemblée a condamné sans équivoque (...) la vague de changements anticonstitutionnels de gouvernement", a déclaré son dirigeant, Bankole Adeoye. L'UA "ne tolérera aucun coup d'État militaire sous quelque forme que ce soit", a-t-il ajouté, rappelant que tous les pays ayant connu des putschs ont été suspendus.
"À aucun moment dans l'histoire de l'Union africaine, nous n'avons eu quatre pays suspendus en 12 mois : le Mali, la Guinée, le Soudan et le Burkina Faso", a-t-il ajouté.
Dans un discours prononcé samedi, Moussa Faki Mahamat avait également évoqué la "funeste vague" de coups d'État et souligné des "liens de causalité connus" avec le terrorisme.
Position délicate de l'UA sur le conflit au Tigré
Il n'est pas clair si le sommet, dont la plupart des sessions se sont déroulées à huis clos, a abordé la question de la guerre qui fait rage dans le pays-hôte.
Le nord de l'Éthiopie est ravagé depuis 15 mois par un conflit entre forces progouvernementales et rebelles du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), qui a fait des milliers de morts et, selon l'ONU, mené des centaines de milliers de personnes au bord de la famine.
Bankole Adeoye a assuré que "toutes les situations de conflit étaient à l'agenda du sommet".
L'UA, dont le siège se trouve dans la capitale éthiopienne, se trouve dans une position particulièrement délicate sur ce conflit. Moussa Faki Mahamat a attendu le mois d'août dernier – soit neuf mois après le début des combats – pour nommer l'ancien président nigérian Olusegun Obasanjo comme envoyé spécial chargé d'arracher un cessez-le-feu.
L'Éthiopie a également continué à siéger au Conseil de paix et de sécurité de l'UA durant le conflit. Elle n'a toutefois pas été reconduite cette semaine pour un nouveau mandat, ont déclaré des diplomates.
Bankole Adeoye a déclaré dimanche qu'il n'était "pas vrai" que l'UA a été lente à réagir. "Il était impossible que l'UA ne s'engage pas dans une telle situation, étant donné précisément sa situation en Éthiopie", a-t-il affirmé, soulignant le rôle de "la diplomatie discrète, des navettes diplomatiques, qui ne peuvent généralement pas être rapportées".
Olusegun Obasanjo doit se rendre cette semaine dans les régions touchées par la guerre, a-t-il indiqué.
Avec AFP