Les Honduriens élisent, dimanche, leur prochain président, dans un pays en proie à un climat de violence généralisée et à une corruption atteignant les plus hautes sphères du pouvoir.
Près de 5,2 millions d'Honduriens sont appelés aux urnes, dimanche 28 novembre, pour élire le président d'un pays victime d'une violence généralisée et de puissants gangs de trafiquants de drogue, qui ont étendu leur corruption jusqu'au plus haut niveau de l'État.
Le scrutin s'annonce serré et le lendemain du vote sous tension.
Xiomara Castro, épouse de l'ex-président Zelaya renversé par un coup d'État en 2009, et leader du parti de gauche LIBRE, est donnée favorite par plusieurs sondages.
Le Parti national (droite) du président sortant, Juan Orlando Hernandez, au pouvoir depuis 2010, représenté par le maire de la capitale Tegucigalpa, Nasry Asfura, n'a cependant pas dit son dernier mot.
Les autorités ont mobilisé 42 000 militaires et policiers pour acheminer le matériel électoral aux 5 755 bureaux de vote à travers le pays et éviter toute "confrontation", quatre ans après les manifestations violentes qui avaient suivi les dernières élections générales.
"Nous garantissons (...) que demain les mesures de sécurité seront (déployées) sur tout le territoire national", a annoncé, la veille du scrutin, le chef des Forces armées du Honduras, le général Tito Livio Moreno. "Nous nous sommes déployés depuis plusieurs jours pour garantir au peuple du Honduras sécurité et paix", a-t-il ajouté.
Outre leur président, les électeurs doivent choisir 128 députés et 596 maires et maires adjoints, ainsi que des conseillers municipaux et une vingtaine de députés au Parlement régional centro-américain.
Depuis le coup d'État qui a renversé le président de gauche Manuel Zelaya en 2009, le Honduras a été dirigé par le Parti national sous la férule du président sortant, Juan Orlando Hernandez, soupçonné par les États-Unis d'être impliqué dans le trafic de drogue.
"Après une douzaine d'années de pouvoir du Parti national, marqué par la corruption généralisée et la violence criminelle, la majorité des Honduriens en ont assez et semblent vouloir un changement", estime Michael Shifter, président de Dialogue Interaméricain.
"Mais la machine du Parti national ne doit pas être sous-estimée et de puissants intérêts devraient faire tout ce qui est en leur pouvoir pour empêcher (Xiomara) Castro de prendre les rênes du pays", met-il en garde.
Sentant le vent tourner, le PN a durci le ton de sa campagne, taxant la leader de LIBRE de "communiste" et vilipendant ses propositions de légalisation de l'avortement et du mariage homosexuel, des thèmes particulièrement polémiques dans ce petit pays conservateur, où la population partage ses croyances entre Église catholique et obédiences évangéliques.
Le parti de droite est en outre réputé pour ne pas reculer devant la fraude pour gagner des élections.
Douteuse réélection
En 2013, Hernandez a battu d'une courte tête Xiomara Castro, et est ensuite passé outre la Constitution pour pouvoir se présenter pour un second mandat en 2017.
Sa douteuse réélection sur le fil face à la star de la télévision Salvador Nasralla avait déchaîné de violentes manifestations.
De nouvelles émeutes ne feraient pas l'affaire de Washington qui "veut éviter une répétition de (l'élection) de 2017 et une augmentation de la pression migratoire", assure Shifter.
Des dizaines de milliers d'Honduriens tentent de rejoindre, chaque année, le million de leurs compatriotes qui ont fui à l'étranger la violence et la misère, dans leur écrasante majorité aux États-Unis.
Plus de la moitié des 10 millions d'habitants vit sous le seuil de pauvreté et la pandémie de coronavirus n'a fait qu'accentuer la misère.
Le chômage a presque doublé en un an, passant de 5,7 % en 2019 à 10,9 % en 2020.
Avec un taux d'homicides de 37,6 pour 100 000 habitants en 2020, le Honduras est en outre un des pays les plus dangereux au monde (hors zones de conflit).
"Les politiques promettent et promettent, mais je ne vois rien venir", résume pour beaucoup d'Honduriens Jose Velasquez, 50 ans.
Au cours des deux dernières années, le Parlement a dissous une commission anti-corruption soutenue par l'Organisation des États américains (OEA) et adopté un nouveau code pénal prévoyant de plus faibles peines pour corruption ou trafic de drogue.
Il est vrai que beaucoup de parlementaires étaient visés par des enquêtes de cette commission.
Des trafiquants de drogue détenus aux États-Unis ont mis en cause le président Hernandez, tandis que Tony Hernandez, son frère, a été condamné, par un tribunal fédéral américain, à la prison à vie pour son implication dans le trafic de 185 tonnes de cocaïne.
Le Honduras "est un État en voie de décomposition, partiellement investi par le crime organisé", assène Victor Meza, directeur d'une ONG pro-démocratie du Honduras, et ancien ministre de l'Intérieur et de la Justice du président Zelaya.
Avec AFP