Jean-Claude Chermann, qui a découvert le virus du sida en collaboration avec les lauréats du Nobel 2008, raconte dans un livre comment le prestigieux prix lui a échappé et où en sont ses recherches sur un vaccin.
AFP - Jean-Claude Chermann, co-découvreur du virus du sida avec les lauréats du Nobel 2008 Luc Montagnier et Françoise Barré-Sinoussi mais "oublié" du jury, raconte dans un livre comment le virus a été trouvé, comment le Nobel lui a échappé et où il en est de ses recherches sur un vaccin.
Dans "Tout le monde doit connaître cette histoire", le chercheur, répondant aux questions du journaliste Olivier Galzi, raconte son arrivée à l'Institut Pasteur, où il devient rétrovirologue et découvre avec son équipe -dont Françoise Barré-Sinoussi- le virus du sida, dans une unité que coiffe Luc Montagnier.
C'est lui qui écrit l'article du magazine spécialisé Science qui homologue la découverte, dit-il. D'où sa déconvenue, le 6 octobre 2008, quand le prix Nobel 2008 de médecine récompense "la découverte faite dans (son) laboratoire", sans récompenser "le chef du labo".
"C'est comme si le prix Pulitzer, rêve de tout journaliste, récompensait un de vos reportages en primant d'un côté le stagiaire qui vous a assisté, de l'autre le patron de votre chaîne en vous oubliant au passage", dit-il. "Je considère que le comité Nobel a entaché comme jamais sa réputation en prenant cette décision incompréhensible".
"Comment réparer ?" s'est demandé ensuite, selon lui, Nicolas Sarkozy qui lui a remis la médaille d'Officier de la légion d'honneur et a "promis une aide pour (ses) nouvelles recherches sur le vaccin".
Jean-Claude Chermann parle longuement des recherches elles-mêmes, explique en termes simples ce qu'est un rétrovirus, "un mécanisme de transformation de cellules tout à fait extraordinaire" qui "remonte dans l'ADN" de la cellule en utilisant une enzyme.
Il raconte la "guerre" de deux ans avec l'Américain Robert Gallo, qui assurait avoir lui-même trouvé le virus. Après un procès, les présidents Ronald Reagan et Jacques Chirac avaient signé un accord partageant entre les deux pays la paternité de la découverte, auquel le Pr Chermann était totalement opposé. Ce qui l'incite à démissionner de l'Institut Pasteur.
Dans son "Unité de recherche sur les rétrovirus et les maladies associées" (URRMA), à Marseille, le chercheur s'intéresse aux "non progresseurs", les porteurs du virus qui ne développent pas la maladie, qui "disposent d'un anticorps naturel dans leur organisme" bloquant un antigène "qui appartient à la cellule du patient".
Il dit avoir mis au point un kit pour dépister les non-progresseurs, "en cours de développement", et prévoit la mise au point d'un anticorps thérapeutique puis d'un vaccin thérapeutique, avant "un vaccin prévenant l'infection".
"Je suis peut-être un chercheur farfelu, mais je suis un chercheur farfelu qui trouve", assure Chermann, qui a fêté cette année ses 70 ans.
Jean-Claude Chermann, "Tout le monde doit connaître cette histoire", Stock, 288 pages, 19,50 euros.