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Un ex-commandant condamné pour crimes de guerre au Liberia, une première

Un ancien chef rebelle libérien a été condamné, vendredi en Suisse, à 20 ans de prison pour de multiples crimes commis pendant la guerre civile des années 1990 au Liberia, l'une des rares décisions judiciaires portant sur ce conflit.

L'ex-commandant rebelle libérien, Alieu Kosiah, a été condamné, vendredi 18 juin, à 20 ans de prison par un tribunal suisse, devenant ainsi le premier Libérien à être condamné pour des crimes de guerre commis pendant le conflit dans son pays. 

La Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral suisse a déclaré Alieu Kosiah, 46 ans, coupable de multiples atrocités, notamment de meurtres, de viol et d'utilisation d'enfants-soldats, pendant la première des deux guerres civiles qui se sont succédées au Liberia et qui ont fait quelque 250 000 morts, entre 1989 et 2003.

Le verdict du Tribunal pénal fédéral de Bellinzone, dans le sud de la Suisse, marque la première condamnation d'un Libérien, que ce soit dans ce pays d'Afrique de l'Ouest ou ailleurs, pour des crimes de guerre commis pendant le conflit.

"C'est complètement historique", a déclaré à l'AFP l'avocat Alain Werner, représentant sept des victimes.  "En Suisse, c'est le premier verdict pour crime de guerre devant un tribunal fédéral, et au Liberia c'est la première fois, il n'y a jamais eu de jugement, de condamnation ou d'acquittement contre un Libérien pour crime de guerre, alors qu'il y a eu deux guerres civiles sur plus de 15 ans, 300 000 morts", a-t-il fait valoir.

Pour Balkees Jarrah, directrice adjointe du Programme Justice internationale de l'ONG Human Rights Watch, "en brisant le mur de l'impunité, ce verdict marque une avancée majeure pour les victimes libériennes et pour le système judiciaire suisse".

Détenu en Suisse depuis 2014

Alieu Kosiah, qui a plaidé son innocence, était accusé d'avoir commis une série de crimes de guerre alors qu'il était commandant du groupe armé de l'ULIMO (United Liberation Movement of Liberia for Democracy), faction de groupes armés hostiles au mouvement de Charles Taylor (le Front national patriotique du Liberia, NPFL). Il est détenu depuis son arrestation, en novembre 2014, en Suisse.

Il a été reconnu coupable de 21 des 25 chefs d'accusation, notamment d'avoir ordonné ou participé au meurtre de 17 civils et de deux soldats non armés. Il a également été reconnu coupable de viol, d'utilisation d'enfants-soldats, d'avoir ordonné des pillages et d'avoir infligé à plusieurs reprises des "traitements cruels, inhumains et dégradants" à des civils.

Il a été condamné à 20 ans de prison, mais doivent être déduits les plus de six ans et demi qu'il a déjà passés en détention. Le tribunal a également ordonné qu'il soit expulsé du territoire suisse pour une durée de 15 ans.

La Suisse reconnaît le principe de la justice universelle, ce qui lui permet de juger les personnes soupçonnées d'avoir commis des crimes internationaux, quel que soit le lieu où ils ont été commis. Elle a été appelée à traiter plusieurs affaires relevant de la justice internationale, mais c'est la première fois qu'une affaire de crimes de guerre passait devant une instance non militaire helvétique.

L'un des principaux acteurs du conflit, l'ex-chef de guerre devenu président (1997-2003) Charles Taylor, avait été condamné en 2012 pour des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre perpétrés en Sierra Leone, voisine du Liberia, mais il n'a pas été inquiété pour les atrocités commises dans son propre pays.

La plupart des commandants des différents groupes armés ont fui le pays après la guerre.

Plus de 15 ans après la fin du conflit, un grand nombre de personnalités directement impliquées dans la guerre civile occupent toujours des positions importantes dans les sphères du pouvoir politique et économique.

Avec AFP