Au moins 82 personnes sont mortes lors d’un incendie dans la nuit de samedi à dimanche dans une unité de soins intensifs pour malades du Covid-19 en Irak, pays arabe le plus touché par l’épidémie et au système de santé délabré depuis des décennies.
Un incendie a ravagé une unité de soins intensifs dédiée aux malades du Covid-19 dans un hôpital du sud-est de Bagdad, samedi 24 avril dans la nuit, tuant au moins 82 morts et faisant 110 blessées, selon le ministère irakien de l'Intérieur.
Une épreuve de plus pour l’Irak, pays de 40 millions d'habitants aux hôpitaux délabrés et dont bon nombre des médecins ont émigré au gré de quatre décennies de guerres à répétition.
Ce sont des bouteilles d'oxygène "stockées sans respect des conditions de sécurité" qui sont à l'origine du sinistre, ont expliqué des sources médicales à l'AFP. Puis, les flammes ont dévoré des heures durant des faux-plafonds non ignifugés sous lesquels des patients sous respirateur ont été brutalement arrachés à leur lit.

Si le nombre de victimes est si élevé, c'est parce que l'hôpital n'était pas équipé, et parce que les pompiers ne sont pas immédiatement arrivés dans l'hôpital situé dans la périphérie reculée de Bagdad.
"L'hôpital n'avait pas de système de protection contre les incendies et les faux-plafonds ont permis la propagation du feu jusqu'à des produits hautement inflammables", indique de son côté la Défense civile.
"La plupart des victimes sont mortes parce qu'elles ont été déplacées et privées de ventilateurs, tandis que d'autres ont été étouffées par la fumée", poursuit-elle.
Le ministre de la Santé suspendu
Cet incendie vraisemblablement dû à la négligence, laquelle est souvent liée à la corruption endémique en Irak, a aussitôt provoqué un intense débat. Le hashtag "Démission du ministre de la Santé" était en tête des mots-clé sur Twitter en Irak.
Le Premier ministre, Moustafa al-Kazimi, qui a proclamé trois jours de deuil national, et attribué 10 millions de dinars (environ 5 700 euros) à chaque famille de victime, a répondu à moitié. Il a "suspendu" et "mis à la disposition des enquêteurs" le ministre de la Santé Hassan al-Tamimi, un proche du très turbulent leader chiite Moqtada Sadr.
La même sanction a été appliquée au gouverneur de Bagdad, Mohammed Jaber, et au patron de la Santé pour l'est de Bagdad.
"Les résultats de cette enquête seront présentés sous cinq jours au gouvernement", selon un communiqué du bureau de Moustafa al-Kazimi.
Le directeur de l'hôpital et les chef de la sécurité et de l'entretien technique d'Ibn al-Khatib, eux, ont été convoqués pour interrogatoire dans la nuit.
"Le résultat d'années de sape des institutions de l'État"
Le président de la République irakien Barham Saleh a été très clair. "La tragédie d'Ibn al-Khatib est le résultat d'années de sape des institutions de l'État par la corruption et la mauvaise gestion.
C'est un "crime" contre "des patients harassés par le Covid-19 qui ont remis leur vie entre les mains du ministère de la Santé, et qui au lieu d'être guéris ont péri dans les flammes", a dénoncé de son côté la Commission gouvernementale des droits humains.
La mission de l'ONU en Irak a exprimé "sa douleur" et s'est dite "sous le choc", tandis que le pape François, qui était en Irak début mars, a appelé à "prier" pour les victimes de l'incendie.
Les cas de Covid-19 ont dépassé, mercredi 21 avril, le million en Irak, avec plus de 15 000 morts. Le pays, probablement en raison de sa population jeune enregistre un nombre de décès dus au Covid-19 relativement bas.
Pour éviter les hôpitaux délabrés, les malades préfèrent généralement installer une bouteille d'oxygène chez eux. Début mars, une timide campagne de vaccination a vu le jour dans le pays où la population, qui boude les masques depuis le début de l'épidémie, reste très sceptique.
Sur près de 650 000 doses de différents vaccins, la quasi-totalité reçues sous forme de don ou via le programme international Covax, environ 300 000 ont déjà été injectées, selon le ministère de la Santé.
Avec AFP