Dominée par les problèmes d'approvisionnements des Vingt-Sept, en particulier au sujet du vaccin d'AstraZeneca, la réunion du sommet de l'Union européenne par visioconférence a aussi été l'occasion, jeudi, d'un court échange avec le président américain Joe Biden.
Les difficultés d'approvisionnement en vaccins de l'Union européenne ont dominé les discussions, jeudi 25 mars, des Vingt-Sept réunis en sommet par visioconférence. AstraZeneca ne sera pas autorisée à exporter ses doses produites dans l'UE tant qu'elle n'aura pas rattrapé ses retards de livraison aux Vingt-Sept, a averti la Commission.
Critiquée pour sa stratégie, l'UE a décidé de muscler son jeu, notamment face au Royaume-Uni, accusé de garder les vaccins produits sur son sol tout en recevant des livraisons depuis le continent.
Pour améliorer l'accès aux précieux flacons, la Commission européenne a renforcé son mécanisme de contrôle des exportations, afin de les restreindre drastiquement vers les pays qui en produisent eux-mêmes ou dont la population est déjà largement vaccinée.
"Rattraper le retard"
Interrogée à l'issue de la réunion des 27, la présidente de l'exécutif européen a prévenu : "Dans le cas d'AstraZeneca, il est clair que l'entreprise devra d'abord rattraper son retard pour remplir le contrat qu'elle a avec les États membres de l'UE avant qu'elle puisse s'engager à nouveau dans des exportations de vaccins" hors du continent.
Le mécanisme a déclenché l'ire du Royaume-Uni, premier destinataire des doses exportées hors du continent. Même si Londres et l'UE se sont engagés à trouver une solution et pourraient parvenir à un accord dès samedi, croit savoir le Premier ministre néerlandais Mark Rutte, dont le pays héberge une usine produisant le vaccin AstraZeneca.
Ce dispositif de contrôle des vaccins, un moyen de pression comparé à un "pistolet chargé sous la table" par une source européenne, est soutenu par plusieurs pays dont l'Italie et la France. C'est "la fin de la naïveté", a jugé le président français Emmanuel Macron devant la presse. "Nous devons bloquer toutes les exportations aussi longtemps que des laboratoires ne respectent pas leurs engagements avec des Européens", a-t-il soutenu.
Mais certains sont plus réservés. "Nous avons toute confiance dans l'action de la Commission" mais il est "souhaitable que les chaînes d'approvisionnement ne soient pas remises en question", a déclaré la chancelière allemande Angela Merkel. Une préoccupation partagée par la Belgique et les Pays-Bas, terres de nombreux sites de production pharmaceutique. "Je ne suis pas certain que cela nous aidera à obtenir davantage de vaccins", a commenté Mark Rutte, tout en reconnaissant l'utilité de cet outil.
Dans leur déclaration finale, les Vingt-Sept soulignent qu'"accélérer la production, les livraisons et le déploiement des vaccins reste essentiel et urgent pour surmonter la crise", et que "les efforts en ce sens doivent être intensifiés". L'UE s'est fixé comme objectif de vacciner 70 % de la population adulte d'ici la fin de l'été. Un objectif réaffirmé par Ursula von der Leyen, qui table sur les livraisons prévues dans les prochaines semaines.
L'UE, principal producteur de vaccins d'ici l'été
Emmanuel Macron, le président français, a de son côté annoncé que l'Union européenne deviendra d'ici l'été le principal producteur mondial de vaccins contre le Covid-19.
L'UE peut se targuer d'avoir beaucoup exporté de vaccins : depuis début décembre, 21 millions de doses produites sur son sol sont allées au Royaume-Uni, soit les deux tiers de celles qui ont été administrées aux Britanniques, selon des chiffres de la Commission. Au total, 77 millions de doses ont été expédiées vers 33 pays, sans compter les contributions à l'initiative internationale Covax en faveur des pays défavorisés. Et 88 millions de doses sont restées dans l'UE pour être distribuées aux États membres.
Autre question sensible, la répartition des vaccins au sein des 27 : six pays, dont l'Autriche, qui s'estiment lésés, ont demandé un mécanisme de correction du système. L'UE est prête à chercher une solution pour aider les pays les plus en difficulté comme la Bulgarie, la Lettonie et la Croatie, mais cela ne concerne pas l'Autriche, qui "n'est pas en mauvaise posture pour le moment", selon Mark Rutte.
"Amérique de retour"
Dans la soirée, le président américain Joe Biden s'est joint à la réunion virtuelle, peu après sa première conférence de presse à la Maison Blanche, lors de laquelle il a annoncé doubler son objectif de vaccinations contre le Covid-19 pour ses 100 premiers jours. "L'Amérique est de retour. Nous sommes heureux que vous soyez de retour", a déclaré le président du Conseil, Charles Michel, en accueillant le responsable démocrate, appelant à "un nouvel état d'esprit transatlantique".
La dernière participation d'un président américain à une réunion des chefs d'État et de gouvernement européens remonte à 2009, quand Barack Obama avait participé à un sommet UE-États-Unis. "En se tenant côte à côte, l'UE et les États-Unis peuvent montrer que les démocraties sont les mieux à même de protéger leurs citoyens, promouvoir la dignité et servir la prospérité", a tweeté Charles Michel.
Côté diplomatie, l'UE s'est dite prête à renouer avec Ankara après des mois de tensions en Méditerranée orientale, mais a posé des conditions au président Recep Tayyip Erdogan. Les Européens, qui ont prévu de faire un point en juin, demandent la poursuite de "la désescalade actuelle", et que "la Turquie s'engage de manière constructive".
Avec AFP