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À Montréal, une série de scandales jette le trouble sur la campagne électorale

Pots-de-vin, financement illégal de partis, réseaux mafieux... La campagne pour l'élection municipale à Montréal tourne au vinaigre.

AFP - Pots-de-vin pour contrats surévalués, financement illégal de partis, rôle quasiment reconnu de la mafia dans le bâtiment et la politique: à quelques jours des municipales du 1er novembre, Montréal est souvent comparée à Palerme.

Les allégations de corruption visent tant le parti du maire Gérald Tremblay, 67 ans, au pouvoir depuis 2001 et qui avoue craindre pour sa famille, que la principale formation d'opposition, rendant l'issue du scrutin imprévisible.

Sous une rafale de révélations dans les médias et d'accusations qui ne trouvent pas toujours de confirmation convaincante, deux hommes occupent le devant de la scène.

L'un est un riche homme d'affaires, Tony Accurso, très présent dans le secteur du bâtiment, notamment au sein de ce qui est dénoncé comme un cartel de 14 entreprises qui monopolisaient les contrats municipaux.

Profitant de cette entente secrète, elles feraient allègrement monter les prix, en moyenne plus élevés de 25% par rapport aux marchés comparables dans les autres provinces canadiennes. Une partie de l'excédent ainsi dégagé irait financer le parti du maire, Union Montréal.

Les voyages d'agrément de responsables politiques aux frais de M. Accurso et leur présence à bord de son grand yacht font depuis plusieurs jours l'objet d'accusations et de démentis à répétition.

M. Accurso lui-même a affirmé vendredi qu'aucun ministre ou député québécois n'est monté à bord de son bateau, démentant ainsi les propos de l'autre star de ce dossier, l'ancien numéro deux de l'opposition municipale Benoît Labonté.

Contraint d'admettre - après avoir soutenu le contraire - qu'il avait aussi reçu des financements illégaux d'un entrepreneur en 2008, M. Labonté a dû démissionner et interrompre une carrière politique prometteuse.

Il a réagi en accusant à la fois le maire de Montréal et la dirigeante de sa propre formation, Vision Montréal, Louise Harel, d'être au courant du système de financements illégaux de la vie politique municipale.

Dans une interview à Radio-Canada, Labonté a parlé de "cancer" et de "système mafieux" à la mairie. Comme, avant de passer dans l'opposition, il avait fait partie de l'équipe du maire sortant, ses propos peuvent avoir une certaine crédibilité.

Il a révélé l'existence d'un "Monsieur 3%", dont il a donné le nom, Bernard Trépanier, ancien directeur financier d'Union Montréal et toujours intermédiaire entre le parti du maire, des responsables des services municipaux et les sociétés qui briguent des contrats de la ville.

Vendredi, le quotidien La Presse et Radio-Canada ont diffusé le contenu d'une conversation téléphonique entre M. Trépanier et le patron d'un groupe d'ingénieurs, Bernard Poulin.

Il semble en découler que le coût d'un contrat de décontamination d'un terrain a été très fortement surévalué, permettant à la ville de le vendre bien au dessous de son prix réel à une société immobilière, Construction Frank Catania.

Alors que les gros titres des journaux parlent de "Mafia à l'hôtel de ville" (Le Devoir), de "Sales secrets de l'administration Tremblay" (La Presse) ou encore d'"Enquêtes policières et soupçons de mafia dans la Palerme canadienne" (Globe and Mail), le gouvernement québécois résiste fermement aux demandes de créer une commission d'enquête publique, affirmant faire confiance à sa police.

Mais il a annoncé jeudi le lancement de l'Opération Marteau, la création d'un groupe d'enquêteurs de choc spécialisé dans la lutte contre la corruption dans le secteur du bâtiment.

Tags: Canada, Corruption,