Sans grande surprise, le chef de l'État sortant, Zine el-Abidine Ben Ali, devrait rempiler pour un cinquième quinquennat, dimanche. Au contraire des principaux médias, Internet offre une possibilité pour l'opposition de s'exprimer.
REUTERS - A la veille d'élections présidentielle et législatives à l'issue plus que probable, les jeunes Tunisiens vont chercher sur internet le débat politique qu'ils jugent totalement absent de la campagne officielle.
Le président Zine el Abidine ben Ali est quasiment assuré d'être reconduit dimanche à la tête de l'Etat pour un cinquième quinquennat et son parti, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) devrait lui aussi conserver une large majorité au parlement.
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© {{ scope.credits }} Dans les journaux et à la télévision, photos, déclarations et reportages sur le président sortant sont omniprésents, et les critiques sont rares.
Pour combler leur soif d'échanges et d'informations, certains Tunisiens se tournent vers les blogs et sites en ligne, et ils sont de plus en plus nombreux dans ce cas. Un Tunisien sur dix - 850.000 personnes - possède un compte Facebook.
"Il n'existe pas de lieu plus libre qu'internet pour exprimer ses idées. Les médias locaux bloquent toute opinion divergente", juge Sofain Chourabi, journaliste et opposant au président Ben Ali.
Le gouvernement tunisien affirme être favorable à la démocratie et la liberté d'expression et dément chercher à imposer des restrictions aux journalistes indépendants dans l'exercice de leur métier.
Mais pour les adversaires du chef de l'Etat, les autorités exercent leur influence sur tout ce qui apparaît dans les médias traditionnels.
Harcèlement et intimidation
Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), dont le siège est à New York, dit avoir constaté une recrudescence des opérations d'intimidation et de harcèlement de journalistes à l'approche du scrutin.
"Nous condamnons cette vague d'intimidations, de détentions, et d'attaques contre des journalistes critiques", a déclaré dans un communiqué le coordinateur du CPJ pour le Proche-Orient et l'Afrique du Nord, Mohamed Abdel Dayem.
"Les pays véritablement démocratiques n'agressent pas physiquement, ne harcèlent pas et n'emprisonnent pas les journalistes", a-t-il ajouté.
Privés d'un large accès aux journaux et à la télévision, les partis d'opposition ont recours aux sites internet pour faire passer leur message. L'Union démocratique unioniste publie ainsi sur Facebook des photos et des vidéos de son secrétaire général, Ahmed Inoubli, candidat à la présidence.
Sur Facebook, certains journalistes s'échangent également des reportages vidéo sur des inondations ou des manifestations violentes ignorées par la télévision d'Etat.
On trouve sur certains blogs des satires de Ben Ali dont la publication serait impensable dans un journal traditionnel.
L'opposition vise avant tout les jeunes, principaux utilisateurs de la Toile et qui représentent près de la moitié des dix millions de Tunisiens. Environ 450.000 d'entre eux, âgés de 18 à 20 ans, pourront voter pour la première fois.
Conscientes de l'impact potentiel d'internet, les autorités ne sont pas en reste. Le RCD utilise Facebook pour rendre compte de la campagne du président et susciter des adhésions.
Le parti présidentiel a également créé trois sites louant le bilan de Ben Ali depuis 22 ans et se faisant l'écho des propos flatteurs à son égard de plusieurs personnalités étrangères.
Les opposants craignent cependant que la liberté relative dont ils jouissent sur internet ne soit menacée.
Le Parti démocrate progressiste (PDP), la principale formation d'opposition qui boycotte le double scrutin, a annoncé cette semaine l'arrestation d'un de ses militants, Zouhair Makhlouf. Ce dernier avait publié sur internet des informations sur la situation à Nabeul. Il sera jugé le 3 novembre pour diffamation.