L'Iran et l'AIEA ont annoncé dimanche avoir trouvé un compromis pour maintenir une surveillance des activités nucléaires malgré les limites imposées par Téhéran. Cet accord de trois mois, susceptible d'être suspendu à tout moment, prévoit le maintien du nombre d'inspecteurs sur place ainsi que la possibilité de contrôles inopinés.
Un résultat "très significatif". L'Iran s'est félicité lundi 22 février des pourparlers à Téhéran avec le chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, à la veille d'une échéance fixée par l'Iran pour limiter les inspections.
Les pourparlers avec le gendarme onusien du nucléaire "ont abouti à un résultat diplomatique très significatif", a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Saïd Khatibzadeh, lors d'une conférence de presse, à l'approche de la mise en application d'une loi limitant les inspections des activités nucléaires en cas de maintien des sanctions américaines.
L'échéance fixée par la loi iranienne expire dimanche 21 février, mais un responsable iranien a affirmé qu'elle n'entrerait en vigueur que mardi 23 février, à moins d'une annonce par les États-Unis d'une levée de leurs sanctions.
Ces sanctions ont été rétablies en 2018 par l'ex-président Donald Trump qui a retiré unilatéralement son pays de l'accord international de 2015 censé encadrer le programme nucléaire iranien.

À son retour de Téhéran après cette visite de 24 heures, Rafael Grossi a annoncé avoir trouvé avec l'Iran une "solution temporaire" de trois mois pour maintenir une surveillance "satisfaisante" des sites nucléaires, même si les inspections seront limitées à compter de mardi.
L'accord trouvé "sauve la situation dans l'immédiat"
"L'accès sera réduit, ne nous voilons pas la face, mais nous serons en mesure de maintenir le degré nécessaire de surveillance et de vérification", a déclaré le chef de l'AIEA lors d'un rapide point presse à l'aéroport de Vienne, ville où se situe le siège de l'Agence.
"Cela sauve la situation dans l'immédiat", a-t-il ajouté, évoquant "un résultat raisonnable après des consultations intenses".
Selon les termes de cet "accord bilatéral technique", le nombre d'inspecteurs sur place reste ainsi inchangé et l'AIEA pourra procéder à des inspections inopinées.
Mais la loi iranienne, qui prévoit de restreindre certaines inspections, y compris sur des sites militaires suspects, si les sanctions américaines ne sont pas levées, "existe et va être appliquée" à partir du 23 février, a regretté Rafael Grossi.
"Nous estimons que l'heure est grave mais l'AEIA continue de servir la communauté internationale", a-t-il souligné. "Bien sûr, pour parvenir à une situation stable, il faudra une négociation politique, et ce n'est pas de mon ressort".

Arrivé samedi 20 février, Rafael Grossi a rencontré le président de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique (OIEA), Ali Akbar Salehi, et le ministre des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif.
"L'Iran et l'AIEA ont eu des discussions fructueuses fondées sur le respect mutuel et dont les résultats seront publiés en soirée", avait tweeté plus tôt Kazem Gharibabadi, l'ambassadeur d'Iran auprès de l'AIEA, "gendarme" nucléaire de l'ONU.
Dans une déclaration quelques heures plus tôt à Press TV, la chaîne en anglais de la télévision d'État, Mohammad Javad Zarif a indiqué que n'aboutirait pas à une "impasse" dans la collaboration entre l'Iran et l'AIEA. Et Rafael Grossi pourra "s'acquitter de ses obligations de montrer que le programme nucléaire iranien reste pacifique".
"Pas d'enregistrements"
Le chef de la diplomatie iranienne a précisé que la loi votée en décembre par le Parlement obligeait son gouvernement à "ne pas fournir les enregistrements" des caméras de surveillance installées sur les sites à l'AIEA.
Selon le vice-ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, "les inspections de l'AIEA seront réduites d'environ 20 % à 30 % après la mise en œuvre de la loi". "Cela ne signifie certainement pas un retrait de l'accord" de 2015.
Ce pacte prévoit une levée progressive des sanctions, en échange de la garantie que l'Iran ne se doterait pas de l'arme atomique. Même si l'Iran a toujours démenti avoir un tel but.
Après le retrait unilatéral américain et le rétablissement des sanctions qui étranglent l'économie iranienne, l'Iran s'est affranchi progressivement à partir de 2019 de plusieurs limites qu'il avait accepté d'imposer à son programme nucléaire en vertu de l'accord conclu en 2015 avec le groupe 5+1 (États-Unis, France, Allemagne, Grande-Bretagne, Russie, Chine).
D'après Mohammad Javad Zarif, "les stocks d'uranium enrichi vont augmenter" également, en attendant que l'autre camp respecte ses obligations.
"Une fois que tout le monde aura fait sa part et rempli ses obligations, alors il y aura [une reprise] des discussions", a-t-il ajouté.
En décembre, le Parlement iranien a exigé du gouvernement de restreindre certaines inspections de l'AIEA sur des installations non nucléaires, y compris des sites militaires suspects en Iran, si les sanctions ne sont pas levées au 21 février.
"Escroquerie occidentale"
Dans un geste à l'égard de l'Iran, les États-Unis ont accepté jeudi 18 février une invitation des Européens à participer à des pourparlers pour relancer l'accord de 2015. Mais le lendemain, Joe Biden a appelé les puissances européennes à travailler de concert avec les États-Unis pour répondre aux "activités déstabilisatrices" de l'Iran au Moyen-Orient.
Dans ce contexte diplomatique complexe et alors que l'Iran et les États-Unis n'entretiennent pas de relations diplomatiques depuis 1980, Abbas Araghchi a indiqué que l'Iran examinait la proposition de l'UE pour une "réunion informelle".
Avec AFP