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Loi sur la "sécurité globale" : le controversé article 24 sera réécrit

Après une réunion de crise à l'Élysée, la majorité a décidé de proposer "une nouvelle écriture complète" du contesté article 24 de la proposition de loi sur la "sécurité globale". De son côté, Gérald Darmanin a listé lors d'une audition à l'Assemblée nationale les "sept péchés capitaux" de la police.

Soucieuse d'éteindre l'incendie, la majorité a décidé, lundi 30 novembre, une "réécriture totale" de l'article 24 de la proposition de loi sur la "sécurité globale" afin de "lever les doutes", qui n'ont cessé de s'intensifier ces derniers jours jusqu'à provoquer une crise politique majeure.

C'est après une réunion de crise organisée à l'Élysée autour d'Emmanuel Macron que les présidents des groupes parlementaires LREM, MoDem et Agir ont annoncé "la nouvelle écriture complète" de l'article controversé, qui prévoit de pénaliser la diffusion malveillante de l'image des forces de l'ordre, et qui cristallise les tensions.

"Cette nouvelle rédaction sera conduite dans le cadre d'un travail collectif aux trois groupes parlementaires de la majorité", a déclaré Christophe Castaner, chef du groupe LREM à l'Assemblée nationale, entouré de ses homologues du Modem, Patrick Mignola et du groupe Agir, Olivier Becht.

"Ce n'est ni un retrait ni une suspension mais une réécriture totale du texte", a martelé Christophe Castaner, en parlant d'"une proposition que nous allons faire au gouvernement". Dès lundi soir "nous rencontrerons le Premier ministre et les membres du gouvernement concernés pour un premier échange", a-t-il affirmé. "Nous pourrons alors dans ce cadre et dans le cadre de nos prérogatives constitutionnelles respectives, discuter du véhicule législatif et du calendrier".

#PPLSécuritéGlobale

Notre objectif reste inchangé : protéger les forces de l'ordre et leur famille sans jamais mettre en cause nos libertés fondamentales.

Sur l'article 24, il reste des inquiétudes que nous devons dissiper. La majorité en proposera donc une nouvelle écriture.

— Christophe Castaner (@CCastaner) November 30, 2020

"Nous savons que des doutes persistent encore" et "nous devons éteindre ces doutes" car "lorsqu'une telle incompréhension ne cesse de s'intensifier sur un sujet aussi fondamental, nous avons le devoir de nous interroger collectivement", a-t-il ajouté.

"L'exécutif et sa majorité vont d'erreur en erreur"

En attendant, la gauche, LFI et PCF en tête, continue à réclamer la suppression pure et simple de la proposition de loi Sécurité globale. Et à droite, le patron ses sénateurs LR Bruno Retailleau a estimé que "l'exécutif et sa majorité vont d'erreur en erreur", ajoutant que la réécriture de l'article "dépend désormais du Sénat" où le texte doit en principe être examiné en janvier.

"Réécrire un article déjà voté, c'est original comme méthode... nous sommes gouvernés par un gouvernement de pieds nickelés", a ironisé le porte-parole du RN Sébastien Chenu.

"Leur inventivité et leur potentiel d'enfumage sont sans limites ! Cette petite phrase 'la majorité parlementaire suspend l'article 24' ne passerait même pas le cap d'un TD de première année en droit constitutionnel", a dénoncé la sénatrice PS Laurence Rossignol.

Leur inventivité et leur potentiel d’enfumage sont sans limites! Cette petite phrase « la majorité parlementaire suspend l’article 24 » ne passerait même pas le cap d’un TD de 1ere année en droit constit. https://t.co/JqgxbTbQEk

— Laurence Rossignol (@laurossignol) November 30, 2020

La pression politique n'a cessé de monter après un week-end de manifestations fournies contre un texte conspué par la gauche, les journalistes et les défenseurs des libertés publiques. Les tensions engendrées par la proposition de loi avaient auparavant explosé, jeudi, après la diffusion des images du passage à tabac du producteur Michel Zecler.

Face à ce trouble, certains députés de la majorité réclamaient la suppression pure et simple de l'article 24.

Gérald Darmanin réitère sa "confiance" au préfet Didier Lallement

Pour tenter de sortir au plus vite de cette crise, Emmanuel Macron a réuni, lundi, en fin de matinée, le Premier ministre Jean Castex, le ministre de l'Intérieur, celui de la Justice, Éric Dupond-Moretti, et les présidents des groupes.

De source gouvernementale, le chef de l'État s'est exprimé avec "une grande clarté et fermeté", estimant qu'il y avait "une incompréhension entre la perception du texte, notamment par les médias, et sa réalité".

Entendu dans la soirée pendant plus de deux heures par la Commission des lois de l'Assemblée nationale, le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a lui reconnu qu'il existait "peut-être" des "problèmes structurels" au sein de la police et a listé les "sept péchés capitaux" de l'institution. Parmi ces péchés, la question de la formation, du matériel, de l'encadrement, ou de l'IGPN, "la police des polices".

Il a néanmoins expliqué son attachement à certains aspects de l'article 24. "Je souhaite que nous gardions et je le souhaite intensément, profondément, avec une énorme conviction, la protection comprise dans l'article 24 pour les policiers", a-t-il dit.

Des individualités ne font pas un tout. Je ne supporte pas et je ne supporterai pas que l’on porte atteinte à l’institution, aux policiers et aux gendarmes, qui font un travail admirable et dont je rappelle que samedi, 98 d’entre eux ont été blessés. pic.twitter.com/1ulfMzUZ9t

— Gérald DARMANIN (@GDarmanin) November 30, 2020

Le ministre, qui a réitéré sa "confiance" au préfet de police de Paris, Didier Lallement, a également estimé qu'il n'y avait "pas de divorce entre la police et sa population".

Cette audition est intervenue, alors que quatre policiers ont été mis en examen dans l'affaire Michel Zecler, dont trois pour "violences volontaires par personne dépositaire de l'autorité publique", avec des circonstances aggravantes dont "des propos à caractère raciste". Deux ont été écroués et deux placés sous contrôle judiciaire.

Avec AFP et Reuters